FRENCH
MON TÉMOIGNAGE I
MON TÉMOIGNAGE II
My Testimony II
My Testimony I
MON TÉMOIGNAGE II
MON TÉMOIGNAGE I
- رجل كُفء
- نجم اليوم
- المجد والسلطة
- العدالة الاجتماعية
- التربية
- التعصب
- التضامن
- نحن جميعًا أذكياء
- من نحن
- الأمن الروحي
- الألوهية والإنسانية
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EXTRAITS (French)
1
Certains hommes restent pauvres toute leur vie et certains hommes restent handicapés toute leur vie. Un pauvre doit-il pour autant accepter son état de pauvreté comme une fatalité pour lui et ne pas essayer d'améliorer ses conditions de vie?
La tristesse m'envelopperait au moment où j'apprendrais que je serai licencié, ou au moment où je quitterais mon lieu de travail pour la dernière fois. Je sais alors que je ne pourrai pas me tenir devant des gens qui ont la chance de conserver leur emploi sans ressentir une sorte de honte ou de culpabilité. Ce sont toujours des moments difficiles. Et oui, ce n'est pas toujours facile de penser et de rire.
Il s'agit en effet d'un problème très grave – même en temps normal. Même les personnes très instruites qui trouvent des offres d'emploi très exigeantes et très stimulantes dans des magazines prestigieux, qui répondent à ces annonces et réussissent tous les entretiens et sont acceptées et commencent à travailler avec de très bons salaires…, elles ne savent pourtant pas ce qui peut leur arriver à l'avenir. Toute l'éducation et les compétences que vous avez acquises, ça c'est le passé. Vous aurez peut-être encore à vous soucier du mariage, si vous n'êtes pas encore marié, ou de vos enfants, s'ils sont encore jeunes, ou de votre santé… et tout cela est dans le futur. En d'autres termes, les problèmes ne finissent jamais.
J'ai peut-être une bonne assurance. L'assurance, ma foi, ne résoudra que le côté argent. L'assurance ne remplacera pas un œil ou un membre perdu. L'assurance ne résoudra point le côté immatériel (sentiments et émotions, affection, santé mentale…). Et tout cela est dans le futur. Suis-je si sûr que mon esprit puisse anticiper (et éviter) de mauvaises choses pour mon humble personne ?
Imaginez maintenant que j'ai trouvé un bon travail après une longue période de chômage. La première chose à laquelle je penserais est probablement de montrer cela, de m'enorgueillir. J'aurais envie que tout le monde sache ce que je vaux. Et quand ça va mal, qu'est-ce que je fais ? J'essaierais éventuellement de me cacher des gens. Mais pour combien de temps vais-je me cacher des gens ? Ces gens-là finiront par savoir que je suis au chômage, que je souffre. Les gens finiront par me montrer leur vrai visage. Ils me montreront ce que je vaux à leurs yeux. Je me sentirais petit, indigne. Je réaliserais que je vaux ce que j'ai, ce que je possède. Je verrais comment les gens que je pensais être de bons amis réagiraient à ma misère. Je verrais comment les membres de ma famille bien-aimée réagiraient à mon chômage sans fin. Je verrais comment les gens me laisseraient tomber quand j'en ai le plus besoin. Mais comment me sentirais-je quand j'aurais à nouveau l'argent pour acheter ce que je ne pouvais pas m'acheter il y a un an, ou pour aller dans des endroits où je ne pouvais pas me montrer il y a six mois ? C'est la réponse du berger à la bergère, n'est-ce pas ?
Quand je pense à ces personnes fragiles que je croise dans la rue (mendiants, sans-abri, prostituées…), je me rends compte à quel point l'Homme peut devenir faible après toute sa force et son pouvoir.
Quand je sors dans la rue avec une veste et un pantalon propres, qui saura qu'il n'y a pas de sous dans mes poches ? Parce que je ne mendie pas, les gens penseront que je suis autosuffisant. Donc, personne ne viendra m'aider quand bien même serais-je surchargé de dettes et que je ne peux probablement même pas m’offrir le pain de ma journée. Je vais dans la rue comme une personne normale – comme si j'étais riche. Peut-être que je suis riche dans mon cœur. C'est-à-dire que je ne suis pas impressionné par ce que les autres ont. Qui a quoi, Je m'en fiche. Je ne suis pas ébloui par les réalisations des autres. Je respecte tout le monde. Je souhaite du bien à tout le monde. Mais – enfin ! – je souhaite tout de même être une personne normale, mais vraiment normale, moi aussi, « comme tout le monde », quoi. Si d'autres personnes veulent tout avoir dans ce monde ; si elles veulent obtenir quelque chose à 20 ans, d’autre chose à 30 ans, d’autre chose à 40 ans, d’autre chose à 50 ans… moi j'aimerais juste obtenir quelque chose avant de mourir. Et je ferais tout mon possible pour y parvenir, comme si j'allais vivre éternellement.
Au moins, en me parlant ainsi, si tant est que j’ai la chance d’avoir les nerfs
solides au bon moment, je réussirais peut-être à calmer momentanément les
ardeurs de mon âme qui n’accepte pas de s’incliner devant le fait accompli.
L'auto-coaching peut parfois être plus apaisant que le conseil de quelqu'un.
Maintenant, si j'en avais les moyens, est-ce que je penserais à ces gens qui se
diraient la même chose, qui auraient ces mêmes émotions, qui sont peut-être
dans la même situation et que je ne connais probablement pas parce qu'ils ont
l'air bien quand ils sortent dans la rue. Peut-être que beaucoup de ces
personnes se sont retrouvées dans le besoin de choses de base. Peut-être qu'ils
ont essayé en vain tout ce qu'ils pouvaient pour obtenir ces choses de base, de
première nécessité. Peut-être qu'ils ont suivi tous les conseils possibles et
écouté les meilleurs experts du développement personnel du monde ! Et peut-être
étaient-ils enfin convaincus qu'il n'y avait rien qui cloche avec leur
personnalité, ou leur intelligence, ou leur talent ou leur capacité physique de
trouver du travail, par exemple, et donc pouvoir acquérir ce dont ils avaient
besoin. Peut-être qu'ils blâment le destin. Je ne sais pas.
2
Je suis parmi ceux qui suivent l'actualité. Je vois que, dans de nombreux pays, beaucoup de gens se désintéressent de la politique. Ils ont la conviction que leur vote a été rendu inutile et que le jeu démocratique ne sert plus à rien. Pour eux, rien ne va changer. Et donc ils ne se déplacent aux urnes que lorsqu’il y a de fortes amendes. Mais je vois aussi que beaucoup de gens font encore confiance au – ou du moins attendent quelque chose du – gouvernement. Seulement, malheureusement, de nombreux gouvernements ont de plus en plus de mal à répondre aux besoins des personnes (emploi, santé, éducation…). Certaines personnes ont choisi de se révolter et de renverser des dirigeants et de changer des régimes. Ils voulaient, disaient-ils, avoir leur destin entre leurs mains. C'est la peur de l'avenir. Cette crainte est-elle légitime ?
Eh bien, même un grand empereur aurait peur de perdre son trône. Plus que la
peur, qui n'est peut-être pas toujours justifiable, il existe de nombreuses
réalités indéniables. L'âge est un fait : personne ne reste jeune et fort pour
toujours, et il y a la mort au bout du chemin. Même au plus fort de notre
jeunesse et de notre force physique et mentale, il y a le sommeil, par exemple,
et ce sommeil-là est une forme d'impuissance totale. Pensons-nous à de si
petites choses ?
Le monde ne fonctionne pas de manière mécanique ou automatique. Certes, un
grain de blé donnera toujours un grain de blé et un œuf donnera toujours un
poussin. C'est la règle. Mais ce n'est pas parce qu'un homme a couché avec une
femme qu'il y aura forcément un enfant. Ce n'est pas parce qu'il pleut que la
terre produira des fruits et des légumes. Ce n'est pas parce que c'est le même
père et la même mère que les enfants auront la même taille ou les mêmes traits
de visage... Dans certains endroits des gens sont tués par les inondations,
dans d'autres par la sécheresse ou parfois par un tremblement de terre.
Il se peut qu'un bébé naisse dans la meilleure clinique d'accouchement ou dans le meilleur palais du monde, mais pour lui, à la naissance, ce n'est pas comme dans l'utérus. C'est probablement pour ça qu'il pleure ! Qu'est-ce que cela signifie pour moi, de toute façon ? Cela signifie simplement qu'en tant qu'être humain, je devrais m'attendre au danger avant la quiétude, aux problèmes avant les solutions, aux huées avant les applaudissements, à la souffrance avant la délivrance... Les problèmes, le danger et la peur font partie de notre monde, qu’on le veuille ou non. Appeler ça pessimisme ou réalisme, ça ne change rien. Même si je me mettais à y penser de la manière la plus complexe, je ne pourrais jamais tout comprendre. Je ne pourrai jamais tout savoir.
C'est à moi de voir la beauté des humains, des oiseaux, des ruisseaux, des animaux, du ciel étoilé, de la mer, de la poésie, de la musique, des arts, des vêtements des gens, de leurs différences : physiques, culturelles, civilisationnelles et autre. C'est à moi d'apprécier cette chance qui m'est donnée de sentir et de jouir de la beauté de ce monde sous toutes ses formes. Certes, il ya tant de misère dans ce monde. Il y en a plein les problèmes. Et il y en aura encore plus à l’avenir. Qui n'a pas ses petits soucis et ennuis de chaque jour ? Toutefois, et quoique difficile et courte, la vie est bien plus belle que ça. Si elle est courte et difficile c'est certainement pour une raison. Quand on est jeune, on pense souvent à la belle vie. Mais même quand on y accède, il n'y a pas que le salaire et la voiture de fonction. On pourrait se retrouver face à une vie insipide, tout à fait monotone, dénuée de sens. On pourrait se retrouver avec une très belle situation, mais dans une ville pleine de pollution, d'ordures, de délinquance, etc. Alors on dirait que la vie n’est pas belle ? La vie ça se sent, ça ne se vit pas. Que vous mangiez du poisson ou de la viande, des pommes de terres ou du caviar, ça revient au même. Vous n'avez plus faim. Que vous vous en sentiez content ou pas, c’est ça la question !
Maintenant, si je veux bien me questionner par rapport à des réalités
existentielles plutôt qu’à mes soucis quotidiens uniquement, dois-je me
contenter de m'inspirer des oiseaux et ne pas voir leur beau plumage ou leur incroyable
migration ? Dois-je me contenter de distinguer les couleurs et les formes et
connaître leurs noms et ne pas penser à l'origine de toutes ces couleurs et
formes ? Qui les a créées ? Pourquoi ?
3
J'ai appris à croire que nous sommes tous humains. Mais c’est plus qu’une croyance. C’est une réalité. Nous sommes tous fragiles. Nous avons les mêmes peurs, les mêmes aspirations. Tous mangent des légumes et des fruits, du pain et du fromage – s’ils en ont. Tous veulent grandir, travailler, se marier. Tous auront – plus ou moins – les mêmes problèmes et les mêmes plaisirs. Nous avons tous besoin d'eau et d'oxygène. La même eau de la Seine, ou du Nil, est bue par les plantes, les animaux, les blancs, les noirs, les chrétiens, les juifs, les musulmans, les athées... Pourvu qu'il y ait de l'eau pour tous ! Parfois, il n'y en a pas, ou pas assez. Les gens meurent de faim ou de soif. D'autres migrent pour fuir la famine. Pas question de parler de beauté à ces gens-là. Mais qu’est-ce qu’on fait quand on a la pluie, quand on a la brise et les coquelicots, quand on a le beurre et le miel ? Qu’est-ce qu’on fait quand on a la vie facile ? Eh bien, on se moque du destin !
Je vois que nos yeux n'ont pas toujours la même couleur. Même les yeux de la
même couleur ne sont pas identiques. Chacun est un être à part, quelles que
soient ses croyances. Chacun a sa propre empreinte digitale et sa propre
empreinte oculaire, et ce n'est pas parce qu'il est chrétien, musulman ou
bouddhiste. Chacun a sa propre voix, son propre cœur, son propre cerveau, sa
propre vie. Qui a conçu tout ça ?
On pourrait tous dire que le monde aurait pu être un meilleur endroit sans
pauvre ni mendiant, sans veuve ni orphelin, sans guerre ni famine. Mais, je me
demande, quel serait notre mérite, nous les humains, si nous ne montrions pas
notre humanité au moment des tremblements de terre, des sécheresses, des
inondations, des éruptions volcaniques, des crises économiques, des drames
personnels, etc. ?
Et c’est bien le cas, heureusement. Dans la pire adversité, je vois une
incroyable entraide, de la solidarité, de la compassion … Oui, je vois aussi
des voleurs et des pillards. En temps de guerre, je vois ceux qui massacrent
des innocents, qui détruisent tout sur leur passage, et, en même temps, je vois
des gens qui prennent des risques incroyables pour sauver des vies ? Pourquoi
ne verrais-je donc pas dans ces événements et dans mes propres problèmes
personnels une sorte d'alerte, un rappel que j'ai peut-être trop oublié que je
ne fais que passer par ici sur cette terre et qu'il est grand temps que je me
prépare à ce qui pourrait m’arriver après la mort ?
C'est l'homme qui a osé tuer les humains. Un homme a tué son frère par
jalousie. Cette même jalousie mène encore à la guerre et met sur la route des
millions de réfugiés. Ce n'est aucunement une divinité ou une autre qui brûle
des centaines de tonnes de blé ou les jette à la mer pour augmenter les prix.
Ce n'est aucunement une divinité ou une autre qui a imposé à quiconque d'opter
pour le nucléaire ou permis à quiconque d'exploiter les gens. L'air est gratuit
pour tout le monde. Le soleil est gratuit pour tout le monde. La vie est
gratuite pour tout le monde. Néanmoins, je me dois toujours de laisser une
marge d’imprévu ; je dois toujours m'attendre à un problème, à une catastrophe
climatique ou à une grave crise économique ou sociale. Par pessimisme ou par
réalisme, ça ne change rien. Un bon gardien de but, si l’on parle foot, doit
toujours être en alerte même face à la plus petite équipe au monde !
4
Comme tout le monde, je vois le glamour de certains. Je vois comment vivent les gens « chanceux ». Je vois le fossé se creuser de plus en plus entre les pauvres et les riches... Et je me dis : tiens, il y avait avant nous, aux temps anciens, comme aux temps plus récents, des gens qui jouissaient, eux aussi, d'un certain prestige ; il y avait de beaux hommes et de belles femmes qui s'aimaient, qui avaient des enfants, qui vivaient dans de belles demeures, qui travaillaient (pour certains), qui écoutaient de la musique, qui se promenaient dans de beaux jardins, qui se disaient de belles paroles, qui faisaient l'amour, qui rêvait de jours meilleurs, qui tombaient malades, qui divorçaient, qui se faisaient la guerre, qui s'entretuaient, qui se blessaient et qui mouraient. Des gens comme nous, quoi. Est-ce donc une simple perpétuation de l'espèce humaine ? Où allons-nous ? Aurons-nous, êtres humains, toujours les mêmes plaisirs, les mêmes frustrations ? Pourquoi sommes-nous ici sur cette terre ? N'y aura-t-il pas un jour où le malheur disparaîtra à jamais ? Que vaut la vie si on ne la vit pas pleinement, dans la joie et la quiétude ? A quoi ça sert de passer son temps à ressasser les questions en boucles ? A quoi sert l'Histoire, à quoi sert la philosophie, à quoi sert la littérature... si les historiens eux-mêmes, si les philosophes, si les écrivains se suicident parfois pour échapper à leurs terribles réalités ? Je n'ai pas de réponses à cela. Cependant, je ne peux que remarquer qu'il y a beaucoup de gens qui ne se suicident pas. Ils affrontent la vie avec le peu de moyens dont ils disposent. Cela signifie que, au moins pour ces personnes-là, la vie vaut la peine d'être vécue. Maintenant, la vie vaut-elle vraiment la peine d'être vécue – quelles que soient nos peines ?
5
Quand il y a une crise tout le monde ou presque souffre. Et quand on souffre on n’a pas envie de réfléchir. Mais – ma foi – quand on n’a plus que nos yeux pour pleurer, il faut réfléchir. On a besoin d’un médicament au moins pour calmer un peu nos douleurs. Alors réfléchissons !
L'une des sources de notre malheur est notre anxiété face à l'avenir. Jusqu’à
quand vais-je garder mon emploi par ces temps de crise ? Et mes enfants ?
Comment pourrai-je leur donner une éducation appropriée si je perds mon emploi
? D'horribles cauchemars. Les personnes sans enfants sont également anxieuses.
Qui s'occupera de moi quand je serai vieux ? Je n'ai pas de sécurité sociale,
aurai-je quelqu'un pour me nourrir quand je serai trop vieux pour travailler ?
Nous vivons dans un monde où la précarité et la vulnérabilité ne surprennent
plus vraiment personne, les jeunes ne sachant pas quoi étudier, pendant combien
de temps, pour quelle opportunité, pour quelle carrière professionnelle ; avec
des parents qui ne savent quoi faire de leurs maigres revenus, s'ils en ont
encore. Chômage chronique, divorce, enfants nés hors mariage, enfants
abandonnés, mères célibataires, sans-abri, drogue, prostitution, pollution,
concurrence féroce dans tous les domaines, individualisme à outrance, peur de
l'inconnu... Nous sommes réduits à rêver de ce que nous ne sommes pas ou ce que
nous ne pouvons pas être. Mais en même temps, nous ne voulons pas nous résigner
à témoigner de notre impuissance, si impuissants que nous soyons, si écrasés, dépourvus
de tout outil de changement. Même notre chère démocratie ne nous garantit rien
de plus que ce que nous pouvons et devons recevoir de nos élus. Rien ne peut
être fait. Le système est plus fort que nous. Nous n'avons qu'à gérer notre
colère, notre faiblesse, notre peur. Et si seulement nous pouvions comprendre
ce qui se passe autour de nous ! Mais comment comprendre un monde plein de
richesses, plein de châteaux et de Limousines et où l'on nous dit que c'est
fini, c'est la fin du travail. Votre travail d'aujourd'hui ne vaudra plus rien
bientôt. A partir de maintenant, vous êtes seul, vous êtes abandonnés à votre
sort … ! On nous parle sans cesse de plans de restructuration, de plans de
sauvegarde de l'emploi et de délocalisations inévitables pour sauver des
entreprises nationales et des emplois ; on nous sermonne sur le déficit public,
la dette publique, la crise mondiale... On nous bombarde matin et soir de
statistiques alarmantes. Allez, vous êtes tout seul ! Inutile de mentionner le
consumérisme « effréné » et la solitude inévitable. Comment s'en sortir ?
Eh bien, la colère et l'indignation ne semblent plus avoir de sens. Les
actionnaires continueront à se remplir les poches. Les gouvernements
continueront à les défendre par peur de les voir fuir ailleurs. Ou du moins
c'est ce que ceux qui sont au sommet veulent nous faire croire. Même les grèves
et les protestations ne semblent pas pouvoir porter de bons fruits ces derniers
temps. Et quand un gouvernement met la main à la poche pour éviter ou limiter
les émeutes ou la casse dans la rue, il ne fait – en fait – que creuser le
déficit budgétaire et augmenter la dette publique. En d'autres termes, il crée
des problèmes pour les générations futures. Et nous avons vu ce que les
révolutions ont provoqué tout autour de nous. Que faire, alors ? Endurer sa
détresse et sa dépression sans agir ? Continuer à souffrir en silence ? Jusqu’à
quand ?
Imaginez que des enseignants en université se trouvent obligés de faire grève pour réclamer le paiement de six mois d'arriérés de salaires ! (Cela arrive en Afrique, mais pas impossible ailleurs.) Comment ces gens peuvent-ils vivre ? Il va sans dire qu'on ne peut laisser le peuple mourir. L'Etat se doit d'agir quitte à s'endetter. Ceci ne contredit nullement ce que j'ai dit plus haut. Cela a toujours été le cas depuis l'Antiquité. On a même fait la guerre pour cela. Mais parfois l'Etat ne peut rien. C'est ainsi que, à travers l'Histoire, des tribus et des peuples entiers ont dû quitter leur pays natal pour envahir d'autres contrées. Cela n'est malheureusement plus possible.
Mais – à part le pain et le riz – que cherchons-nous, en réalité ? Eh bien,
nous recherchons notre bien-être. Certains prient Bouddha, d'autres prient Ram,
d'autres prient Jésus ou Allah, pour obtenir d'eux ce à quoi nous aspirons tous
: du travail, un conjoint, une bonne santé, de bons enfants... Mais attendez
une minute ! Pourquoi, dirait-on, endurer la douleur de la patience et du
sacrifice pour quelque chose dont on n'est pas vraiment sûr ? Les gens se
tournent donc vers ceux qui, selon eux, peuvent leur fournir ce qu'ils veulent.
D'où l’État-providence. Nous n'avions pas cela dans nos cultures orientales
avant l'indépendance. Aujourd'hui, nous assistons à des scènes de misères
socio-économiques dans des pays censés être des havres de paix sociale, où les
démunis et les nécessiteux ne devraient normalement pas avoir à s'inquiéter de
leur avenir, puisqu'il existe un État-providence qui est là pour subvenir à
leurs besoins et garantir l'égalité de tous devant la loi. En Afrique, tout le
monde n'a pas accès à l'électricité. En Europe occidentale, beaucoup de ménages
se saignent pour payer leurs factures d'électricité. Tout cela nous montre
qu'il y a une certaine limite à ce que l'homme peut faire pour l'homme. Il
pourrait y avoir un besoin d'une force plus forte que l'Homme : pourquoi pas
Dieu ? De plus en plus de gens recherchent « la vérité », une solution
quelconque, de ce côté-là. Les États aux prises avec le fardeau de la dette et
des déficits sont quasi impuissants. Jusqu'à quand les gens peuvent-ils
attendre pour voir une amélioration dans leur vie ? Dans ce contexte qui
n'inspire guère confiance, certains sont prêts à essayer autre chose. Mais quoi
au juste ?
Le jeu du blâme fait partie de la nature humaine. Nous tous blâmons les autres
pour nos malheurs. Quand il n'y a personne en particulier à blâmer, nous
blâmons la malchance. Mais soyons objectifs un instant ! Le gouvernement le
mieux intentionné et le plus compétent ne peut garantir des emplois pour tous.
Le patronat le plus compatissant et le plus patriote au monde ne peut garantir
une croissance économique durable. Il y aura toujours une minorité de «
malchanceux ». Même les personnes très instruites (médecins, ingénieurs, hauts
cadres…) dans de nombreux pays du monde peuvent être surprises de ne pas
trouver d'emplois convenables. Même les gouvernements des pays développés
supplient les autres gouvernements des pays développés de faire mieux pour leur
économie nationale. Les Français voudraient que les Allemands fassent plus pour
la croissance économique allemande. Les Allemands voudraient que les Français
fassent plus pour réduire leur déficit budgétaire. Les États-Unis appelleraient
l'Europe à faire plus pour éviter ou sortir de la récession.
6
Maintenant, supposons que nous ayons du travail, nous avons un salaire. Supposons que nous puissions acheter tout ce que nous voulons. Est-ce pour autant la fin de nos problèmes ? Eh bien, on dirait que le salaire est de l'argent reçu en échange d'un travail. Les bénévoles mis à part, chaque travailleur s'attend à être payé. Comme on le sait tous, certains refusent même de travailler s'ils ne bénéficient pas de congés payés, d'un droit à un congé de maladie et d'une pension. Que demanderait de plus un employé ? Là, ça dépend.
Comme on le sait tous, certains travailleurs négocient leur salaire avec leur
employeur. Les personnes hautement qualifiées avec des diplômes universitaires
prestigieux obtiennent généralement les meilleurs salaires. Certains changent
d'emploi pour un meilleur salaire ou des conditions de travail plus
confortables. Les travailleurs moins qualifiés peuvent adhérer à des syndicats
pour demander une augmentation de salaire ou d'autres droits. Mais, enfin,
est-ce tout ?
Fait intéressant, certaines personnes rétrogradent pour des raisons de paix et
de quiétude. Ils abandonnent des postes où ils étaient bien rémunérés et
acceptent des emplois destinés à des personnes moins qualifiées. La raison,
disent-ils, est le stress. Ils étaient prêts à sacrifier une partie de leurs
revenus d'origine pour le bien de leurs nerfs.
Il existe encore une autre catégorie de travailleurs. Ce sont des gens qui ne «
travaillent » pas et pourtant reçoivent leur salaire chaque mois. Ils se
rendent simplement sur leur lieu de travail, pointent et s'assoient sans rien
faire sur des chaises tandis que d'autres travaillent de longues heures afin
d'obtenir le même salaire à la fin du mois. Curieusement, ceux qui « travaillent
» sont beaucoup plus heureux que ceux qui « ne travaillent pas ». Ces derniers
ne sont pas du tout contents parce que leurs collègues les taquinent toujours
en disant quelque chose comme : « Vous les gens inutiles, nous travaillons pour
vous nourrir. Vous volez notre argent... »
Beaucoup de ceux qui travaillent avant d'être payés ne sont pas contents, non
plus. La ou les raisons peuvent être le stress, le harcèlement, l'intimidation
ou toute forme d'injustice. Dans certains cas, il se peut que l'employeur soit
juste et équitable, mais pas assez empathique, par exemple. Il pourrait ne pas
se soucier si vous avez des problèmes personnels ou familiaux. Vos problèmes
sont votre propre problème ; ils ne doivent pas affecter votre travail.
D'autres travailleurs « se facilitent la vie » et protestent rarement, voire
jamais. Certains encore ne prennent presque jamais de vacances. Certains
travaillent dans des mines dangereuses ou dans la sidérurgie, où le feu est
quotidien. D'autres encore travaillent dans les champs sous un soleil de plomb.
D'autres travaillent loin de chez eux, laissant derrière eux leur conjoint,
leurs enfants et leurs proches. Certains sont des migrants, d'autres sont dans
l'armée ou des marins en haute mer. Ils font tout cela aussi gentiment que
possible parce qu'ils ne peuvent pas être payés s'ils ne le font pas.
Le travail acharné vaut bien mieux que le chômage. Un travailleur peut se payer
des choses qu'un chômeur ne peut pas. Cela fait une grande différence lorsque
vous ne pouvez pas emprunter de l'argent pour répondre à un besoin urgent parce
que vous ne pouvez pas en garantir le remboursement, alors qu'un travailleur
avec un revenu stable peut le faire. Pire, c'est absolument affreux de se voir
au chômage à quarante ans ou plus, alors que des amis et connaissances plus
jeunes sont déjà aisés.
Mais une fois que vous obtenez un emploi, vous devenez comme les autres
travailleurs. Vous aussi commencez à souffrir de problèmes nouveaux/anciens.
Vous commencez à penser aux vacances, entre autres.
Les vacances sont l'occasion pour beaucoup de se reposer et de s'amuser. En
France, par exemple, dès que les gens reviennent de vacances annuelles, ils
commencent à préparer les suivantes, lesquelles évidemment n'arriveront pas
avant onze longs mois. Une des raisons pourrait être que les Français aiment se
vanter de leurs vacances. Une autre raison pourrait être qu'ils en ont tout
simplement marre de travailler entre quatre murs. Mais cela n’est certainement
pas propre aux Français.
Ce que j'ai toujours trouvé un peu étrange, c'est que la plupart de ceux qui
remplissent les autocars de touristes dans mon pays est des personnes âgées.
Loin de moi l'idée de suggérer que les personnes âgées devraient rester à la
maison et aider leurs petits-enfants à faire leurs devoirs. Mais ceci,
cependant, m'amène à me demander si un grand nombre de personnes n'attendent
pas vraiment avec impatience le troisième âge et la retraite. Ne serait-ce pas,
pour eux, l'occasion de rattraper le « temps perdu » passé « entre quatre murs
» ?
Maintenant, pourquoi devrait-on attendre si longtemps ? Après tout, le travail
n'est pas une malédiction. En fait, le travail est souvent quelque chose de
merveilleux. Pourtant, le salaire qu'un employeur verse à un employé n'est
qu'une « compensation nominale » – disons morale – pour l'effort fourni au
travail. Ce salaire ne peut tout simplement pas compenser tous les efforts
qu'un travailleur investit dans son travail. Chaque effort physique, mental ou
psychologique que vous faites pour accomplir la tâche que votre employeur
attend de vous aura inéluctablement une incidence (négative) sur votre corps ou
santé mentale à un moment donné dans votre vie. L'argent ou les avantages que
vous pourriez obtenir en échange de votre travail ne remplaceront aucune partie
de votre corps une fois endommagée. L'argent ne peut pas remplacer un nerf
perdu ou un poumon atteint de lésion.
Le tabagisme, l'obésité et l'hypertension artérielle sont des problèmes liés au
travail. Si vous ajoutez à cela le harcèlement ou l'intimidation, par exemple,
à quoi ressemblerait votre vie ? Comment vous comporteriez-vous envers votre
famille ? Seriez-vous bien mentalement si vous criiez après votre conjoint
aimant à la maison alors que vous souriez à votre patron qui vous intimide au
travail ? Comment supporteriez-vous le stress des formalités et de l'étiquette
si votre enfant souffre à l'hôpital ?
Les choses empirent lorsque votre emploi n'est pas stable. Tant que votre
travail est précaire, l'anxiété ne vous lâchera guère. Si vous ne pouvez pas
assurer votre retraite plus tard, vous faites quoi alors ?
Vos enfants aussi souffriront si vous perdez votre emploi. Ils éviteront leurs
amis proches car ils ne peuvent tout simplement pas se payer les mêmes petites
choses, un bonbon plus. Ils pourraient même être « virés » d'une école privée,
par exemple, avec tout ce qui s'ensuit. Que faites-vous, alors ? Attendrez-vous
les prochaines élections pour voter pour le parti qui promet plus d'emplois ?
Même si vous trouvez un emploi après des années d'attente, cela n'atténuera pas
les effets de votre chômage. La peur de perdre votre nouvel emploi restera avec
vous. Cette peur affectera votre santé tôt ou tard.
Presque tous les travailleurs perdent quelque chose en faisant leur travail. Le
paysan qui travaille aux champs sous un soleil de plomb devra un jour faire
face à sa tête qui lui fait mal. La peur constante d'une mauvaise campagne
agricole s'ajoutera à ses problèmes. Idem pour tant d'autres travailleurs.
Alors, si tel est le travail, comment pourrait-il être « quelque chose de
merveilleux », me direz-vous ?
On pourrait imaginer que certains « travailleurs » n'ont rien à craindre, n'ont
pas de soucis à se faire. On pourrait imaginer que, disons, un artiste, par
exemple, est quelqu'un qui est libre, qui peut travailler à guise et avoir une
vie professionnelle réussie et agréable. Mais les artistes aussi souffrent. Un
artiste peut avoir à pleurer des jours et des nuits, peut-être des années,
avant de vous faire sourire quelques secondes. Un artiste aussi pourrait
souffrir de stress et d'anxiété. Un artiste aussi a besoin d'argent et de
stabilité. Lui aussi a ses propres relations sociales. Lui aussi craint la
pauvreté, s'il n'est pas déjà pauvre. Je ne vous apprends rien là. Pourtant, beaucoup
d’artistes s’estiment heureux et épanouis.
Même ces stars là-haut ont leurs propres « problèmes de travail ». Ce n'est pas
facile de devenir une star. Le glamour, la célébrité et de l'opulence
pourraient ne pas durer toute une vie. Et, pour les artistes, c'est douloureux.
Dès qu'une star devient un has-been, ses problèmes commencent à s'accumuler.
Mais c’est ce qui nous arrive à nous tous. Dès qu’on atteint un certain âge on
commence à avoir des soucis de santé, entre autres.
Il n'est pas rare de voir un écrivain avec un sourire heureux sur son visage
après avoir terminé un long roman. Il n'est pas rare de voir une femme sourire
béatement après avoir accouché. Il n'est pas rare de voir un étudiant au sommet
du monde après avoir obtenu un diplôme. Mais il demeure néanmoins que ce roman
doit être soumis à un éditeur, que ce bébé doit être élevé et que ce diplôme
doit être accepté par un employeur. Ainsi va la vie. C’est ça ce qui fait le
charme de la vie.
Les scientifiques disent que si votre tête se refroidit après un coup de
chaleur, cela ne signifie pas que vous échapperez aux effets à long terme de ce
coup de chaleur. La douleur disparaîtra, mais les effets de cela et de tout
coup de chaleur ultérieur s'accumuleront jusqu'à ce que – Dieu nous en préserve
– ils se transformeraient en quelque chose de pire à l'avenir. Par analogie,
tous les problèmes liés au travail ne feront que s'accumuler avec le temps.
Alors que faire ? Ne pas travailler ?
C’est pourquoi il est salutaire de prendre le temps de l’introspection, de réfléchir afin d’essayer de comprendre la vie et le monde qui nous entoure.
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Quand je lis maintenant des livres d'histoire ou des contes ou poèmes anciens, je peux facilement remarquer que les gens ont toujours été plus importants que leurs habitations, leurs montures, leur argent ou tout ce qu'ils pouvaient posséder. L'Homme a toujours eu peur de la maladie, de la mort, de la pauvreté, entre autres. L'Homme a toujours eu besoin de se sentir rassuré, protégé, en sécurité. L'Homme a toujours fait la paix après la guerre ; il a toujours créé des tribunaux pour rendre justice ; il a toujours construit des écoles pour éduquer les générations futures ; il a toujours construit des villes et des villages pour permettre aux hommes de se sentir proches les uns des autres, de créer toutes sortes de relations saines, de se donner la main, d'échanger des services, même lorsque les relations personnelles ou entre voisins immédiats ou lointains ne sont pas parfaites. Parfois l'Homme peut souffrir du froid, de la chaleur, de la faim, de la soif, de la fatigue, de la peur, de la perte d'êtres chers... Mais alors il apprécierait le plaisir de manger après la faim, le plaisir de boire après la soif, le plaisir de se reposer après la fatigue, le plaisir d'aimer, etc.
Il y a un siècle, la plupart des Arabes vivait à la campagne, la plupart était analphabètes, la plupart vivait de l'agriculture et du pâturage. Sous la domination coloniale, de nombreux Arabes ont migré vers les villes, beaucoup ont abandonné l'agriculture et le pâturage pour travailler comme cols bleus dans des usines ou comme artisans dans de petits ateliers. Leurs enfants sont allés à l'école et, lorsque les colonisateurs sont partis, sont devenus des cols blancs dans des franchises. Certains sont devenus fonctionnaires dans la nouvelle administration. De plus en plus de personnes goûtèrent aux plaisirs du travail à vie ; les jeunes devinrent financièrement indépendants, puis socialement indépendants. N'importe qui pouvait mener la vie qu'il souhaitait dans sa nouvelle maison. En quelques décennies, les villages sont devenus des villes et les petites villes sont devenues plus grandes. Beaucoup d'emplois dans le public, beaucoup d'usines (principalement des franchises), beaucoup d'ateliers, beaucoup de magasins de toutes sortes et de toutes tailles. La prospérité était à la portée de tant de personnes, alphabétisées et analphabètes. Il était facile pour beaucoup de gens de se faire construire ou de s'acheter une maison, d'envoyer leurs enfants à l'école, de créer des entreprises, de vivre en ville. Ceux qui sont allés à l'étranger, la plupart en tant que cols bleus, ont envoyé de l'argent chez eux, puis ont construit leurs propres maisons, créé leurs propres entreprises. Leurs enfants ont eu beaucoup de succès. Dans les États arabes nouvellement indépendants et riches en pétrole, les opportunités étaient bien plus importantes. On pouvait donc rêver de glamour et de pouvoir.
Puis, soudain, la première crise économique (dans les années 1980). Ensuite, le
problème de plus en plus grave du chômage. Ensuite, la crise toujours
croissante du logement et du mal logement. Ensuite, toutes sortes de problèmes.
La vie n'est plus aussi rose qu'avant. Aujourd'hui, les gens s'inquiètent pour
leur retraite, pour l'avenir de leurs enfants, pour les conséquences de la
pollution… De moins en moins de gens rêvent d'un emploi à vie et d'une retraite
confortable.
Ce qui s'est passé dans le monde arabe s'est également produit dans d'autres
parties du monde. L'État-providence a été créé pour donner aux gens un certain
sentiment de stabilité, de sérénité et de confiance. Malheureusement, les «
Trente Glorieuses » sont terminées. Certains sont encore nostalgiques de l'ère
communiste où ils pouvaient, au moins, trouver auprès de l'État un havre de
paix : logements, scolarisation des enfants, soins médicaux gratuits, etc. Ni
l'État providence, ni l'État communiste, ni le meilleur État démocratique du le
monde ne peut plus rassurer personne. La mondialisation a conquis tous les
aspects de nos vies au point que certains ont déjà commencé à parler de
démondialisation. Personne ne sait plus ce que l'avenir nous réserve. C'est la
même vieille histoire de la peur de l'inconnu.
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Où va le monde ? Pour tenter de répondre à cette question, il faut se poser une autre : d’où vient le monde ? Il y a de cela moins de 60 ans, les gens, y compris dans nos écoles publiques, écrivaient avec une plume-à-encre. Il n’y avait tout simplement pas de stylos dans la trousse de l’écolier. La plupart des enseignants n’avaient pas de voitures. Elles étaient trop chères. Les téléphones portables n’existaient pas encore. Il n’y avait que des machines à écrire pour taper des textes. Les photos étaient en noir et blanc. La télé aussi. Bref, le monde a beaucoup changé en moins de 60 ans. L’école n’est pas en reste. Alors, quelle serait l’école de demain ?
Depuis bien longtemps, on parlait de « métiers d’avenir ». On disait que ceci ou cela n’est pas un métier d’avenir. On exhortait donc les élèves à accorder plus d’importance aux langues étrangères, notamment l’anglais, et aux matières scientifiques. C’est ainsi que des générations de cadres d’entreprise, en cravate et chemise blanche, de médecins et d’ingénieurs sont sortis de nos écoles (publiques) et ont fortement contribué au développement du pays et ont grandement amélioré la situation socio-économique de leurs familles et de leurs propres personnes. En même temps, la science et la technologie ont connu un essor plus que spectaculaire. Il suffit de penser à Internet, où l’on trouve de tout. Vous vous souvenez tous du temps de la Covid : les cours se faisaient à distance, grâce à de nombreuses et diverses applications. La machine peut vous traduire tout ce que vous voulez en quelques secondes seulement, et avec de la voix en plus. ChatGPT peut même vous composer des livres et des thèses de doctorat en très peu de temps. Il y en a même le robot qui peut exprimer des sentiments et des émotions tel un être humain. Avec l’impression 3D vous pouvez fabriquer tout un tas de choses. Et ce n’est là que quelques exemples. Alors, quelles conséquences cela aura-t-il sur notre école d’aujourd’hui et de demain ? En d’autres termes, quel élève devrait-on préparer pour ce monde qui se profile devant nous ? Nous suffirait-il donc de continuer à œuvrer pour produire des futurs ingénieurs, médecins, cadres d’entreprise, etc. ? Ne devrait-on pas aussi et surtout préparer nos élèves aux chocs qu’ils pouvaient avoir avant ou en cours de leurs parcourt professionnel –tout en consolidant l’enthousiasme chez chaque élève, ainsi que son esprit d’ouverture et ses capacités d’adaptation au développement continuel que connait le monde ? Ne devrait-on pas prendre plus au sérieux ce qu’on appelle Soft Skills, ainsi que le côté psychologique de nos chers apprenants ? En d’autres termes, la littérature n’est-elle pas aussi importante que les sciences et techniques dans le développement personnel et l’épanouissement de nos élèves ? Etre ingénieur c’est très bien. Etre un ingénieur avec une culture générale conséquente et de solides Soft Skills a beaucoup plus de valeur ces jours-ci et à l’avenir. Il incombe à nous, les professionnels en charge de l’éducation, chacun à son niveau, de donner la possibilité à nos apprenants d’évoluer dans ce sens. C’est dans ce cadre-là que nous avons conçu ce magazine.
Et déjà dans le premier numéro, nous n’avons pas été déçus. Nous avons été agréablement surpris de voir à quel point notre établissement regorgeait de talents qui n’attendaient que de l’encouragement. L’école n’est pas censée tout transmettre à l’élève, mais plutôt faire en sorte que l’apprenant soit outillé pour enrichir son apprentissage par lui-même et encouragé à exprimer son talent de la meilleure manière possible, et ce sous la supervision de ses formateurs. C’est un travail d’accompagnement, ou, si vous voulez, de la pédagogie au sens pur du terme.
Cette approche ne diverge guère de la lettre et l’esprit de la politique d’aussi bien le gouvernement que le Ministère de l’Education Nationale. Au contraire, elle ne fait que la concrétiser et en donner un exemple à suivre, ce dont nous sommes fiers au Lycée qualificatif Ibn Araby.
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Une personne se demande
Le monde a-t-il besoin d'une machine qui invente des images ou des conversations humaines qui correspondent à la réalité, et même font croire à certains qu'elles sont réelles ! Peut être. Sans cette volonté effrénée d'imiter la nature, les avions qui transportent les gens d'un pays à l'autre et les fusées qui transportent les gens d'une planète à l'autre n'auraient pas été possibles. C'est le même désir qui a poussé le Samaritain à fabriquer pour les gens de leurs bijoux un veau qui avait un corps beuglant, et qui a fait que les sorciers fabriquèrent des bâtons et des cordes que les gens imaginèrent de leur magie qu'ils couraient. Alors, où est le problème ? Pourquoi les scientifiques se retrouvent-ils à tirer la sonnette d'alarme et à mettre en garde contre la poursuite dans cette direction ? Au temps de Moïse, les magiciens représentaient les confins de l'esprit humain. Pharaon et son peuple faisaient confiance aux magiciens alors qu'ils savaient qu'ils n'étaient que des magiciens, et ils ne faisaient pas confiance à Moïse le Prophète, même s'ils étaient eux-mêmes convaincus que le bâton de Moïse n'était pas de fabrication humaine et qu'aucun être humain ne pouvait venir avec ce que Moïse avait apporté sans avoir derrière lui une puissance au-delà de la nature. Lorsque des catastrophes naturelles leur sont arrivées, ils ont eu recours à Moïse, lui demandant d'appeler son Seigneur pour qu'il leur enlève la calamité. C'est la nature même de l'âme humaine. Les enfants, même les adultes, adorent les dessins animés et interagissent avec eux en sachant qu'ils ne sont pas réels. Cependant, les images irréalistes ne présentent-elles pas un danger pour l'homme ? Combien de personnes souffrent psychologiquement, et même financièrement, lorsqu'elles se voient loin de ce qu'elles voient sur les pages des influenceurs qui s'affichent de la meilleure des manières ! Combien de vies ont été détruites à cause de ce désir d'imiter ce qui n'est pas réel ! Est-ce pour cela que les scientifiques ont peur d'avancer dans le développement de ces technologies étonnantes qui accélèrent le temps pour faire émerger aux gens quelque chose de plus intelligent que l'homme et de plus fort que l'homme ? La science est-elle si dangereuse ? La science est-elle si mauvaise ? Alfred Nobel a recommandé la création du prix Nobel pour expier son invention de la dynamite, alors que ferait l'inventeur du CHATGPT, par exemple, pour expier son invention ? Rejoindra-t-il d'autres scientifiques et inventeurs pour résoudre le problème des célibataires dans certains pays asiatiques, par exemple, qui sont obligés d'acheter de grandes poupées qui ressemblent à des femmes et qui ne sont pas des femmes ? Les génies qui ont développé les techniques de clonage humain ne pourraient-ils pas développer des médicaments pour des maladies incurables ? Les scientifiques ne peuvent-ils pas créer de nouvelles opportunités d'emploi pour les millions de personnes qui perdront leur emploi à cause des applications de l'intelligence artificielle qui se développent à chaque minute et seconde ? Que feront les scientifiques pendant qu'ils arrêtent de développer ces horribles recherches et applications ? Et quel est le rôle des États et des gouvernements dans tout cela ? Seront-ils à l'affût de ce qui se passe dans les laboratoires et les conférences scientifiques ? Le monde est-il vraiment en danger ? Le monde appartient-il à l'homme ? Le monde n'a-t-il pas un Dieu qui le protège des folies humaines ?
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Aujourd’hui je crois en Allah alors que je ne Le vois pas. Mais c’est pas grave pour moi, je n’y vois aucun problème –d’autant plus que Lui, Il a la gentillesse de bien vouloir nous accorder l’accès à Son Paradis éternel pour le peu de bien que nous puissions faire dans notre courte vie d’ici-bas. Et en plus de ça, Lui, Il voit tous nos défauts. Il voit que nous sommes impurs. Par exemple, nous consommons de la nourriture et donc nous allons aux toilettes. Pourtant, Il est disposé à accepter nos prières même quand on n’est pas en mesure d’accomplir le wodoue (ablutions) pour manque d’eau ou pour des raisons de santé.
Je comprends alors qu’un être impur ne peut voir un Être Pur depuis un monde impur. Je comprends également que si Allah a fait que nos corps soient impurs ainsi, c’est pour que nous nous engagions dans un processus continu d’auto-purification physique et spirituelle. Quoique je fasse, et dans le meilleur des cas, je ne pourrais que devenir propre –comme une maison ou un bureau propre, mais jamais pur parfaitement. Je serai pur seulement au moment où je m’apprêterai à entrer au Paradis, car là il n’y aura ni impureté ni toilettes. Et c’est seulement là et alors que je pourrai voir Allah, Le Pur. Je le verrai comme je vois la lune dans ce monde. Et ce sera un très grand plaisir et honneur pour moi.
Cette impureté dont je parle ici est purement physique. ça n'a rien à voir avec l'âme. Alaah dit: « Allah aime ceux qui se repentent, et Il aime ceux qui se purifient. » (2 : 222) فيه رجال يحبون أن يتطهروا
Dans le Hadith :
أبو هريرة كنت جنبا إن المؤمن لا ينجس
D’ailleurs, à quoi me servirait de voir mon dieu s’il était en bronze ou en céramique que je pourrais déplacer comme un laptop de chambre en chambre ou de porter dans mon sac ? Que se passerait-il si je priais et criais à ce dieu-là pour qu’il me sauve d’une mauvaise situation alors que lui se contenterait obstinément de me regarder pleurer sans rien faire ? Ne serais-je pas tenté de le casser ou de le brûler ou de le jeter à la poubelle dans un moment de colère ou de folie passagère ? Si le Dieu en qui j’ai la chance et l’honneur de croire, et que je ne vois pas malgré tout, ne me répond pas tout de suite, je pourrais me consoler en me disant qu’Il a des raisons qui Lui appartiennent, et que je devrais peut-être patienter un peu afin d’y voir plus clair, le temps de me rendre compte de mes propres erreurs, de mes propres défauts. Ce serait alors un pas de plus dans mon processus d’auto-purification qui ne pourrait que me faire du bien tôt ou tard. Nous lisions tantôt : « Allah aime ceux qui se repentent, et Il aime ceux qui se purifient. » (2 : 222)
Et puis, si vous et moi avons les yeux pour voir Dieu, quid des non-voyants, quid de celles et ceux qui n’arrivent même pas à lire leurs factures avec les meilleurs lunettes au monde ?