jeudi 7 mars 2024

MON TÉMOIGNAGE I

 


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Un HOMME capable 

 

C'est samedi après-midi. Jilali, un ouvrier du bâtiment, touche son salaire hebdomadaire (1000 dirhams), remercie son patron et remonte sa vieille moto. En rentrant chez lui, il s'arrête chez le coiffeur. En attendant son tour, il appelle sa femme, depuis son ancien Smartphone, lui disant de préparer de l'eau chaude pour sa « douche ». Après s'être fait une belle coupe de cheveux, Jilali va chez l'épicier de son quartier. Il paie ses dettes de la semaine et commande de nouvelles choses pour faire plaisir à sa femme. Entendant le bruit familier de sa moto, ses enfants se précipitent pour ouvrir la portière. Les enfants et la femme sont tout sourire. Jilali est heureux aussi. Les enfants jubilent : Papa nous a acheté des biscuits et des yaourts ! La femme prend le sac dans la cuisine.

Quelques minutes plus tard, Jilali prend une « douche ». Il prend de l'eau dans un seau et se la verse sur lui-même. C'est un bidonville, et il n'y a pas toujours des douches dans les bidonvilles. Mais Jilali est content.

Après la douche, Jilali est assis dans le mrah, sorte de minuscule patio couvert servant de salon mais aussi de salle à manger et tout. La télévision est là. Devant lui se trouve un plateau à thé avec une théière chaude et du pain. Jilali est ravi. Il attend que la nuit tombe, et que les enfants s'endorment, pour que lui aussi s'endorme avec sa femme, pour que sa jouissance soit complète.

Maintenant comptez avec moi combien de choses Jilali apprécie. (1) Jilali a du travail, il aime ça. (Tout le monde n'a pas de travail.) (2) Jilali perçoit son salaire tous les samedis après-midi. (3) Jilali a une moto. (Certains de ses camarades viennent au travail à pied.) (4) Jilali peut se permettre une belle coupe de cheveux. (5) Jilali a un Smartphone. (6) Jilali a une femme. (7) Jilali a aussi des enfants. (8) La femme et les enfants de Jilali le reçoivent avec le sourire. (9) Jilali a un endroit pour se laver dans sa petite demeure. (Comparez avec les sans-abri.) (10) Jilali a un téléviseur. (11) Jilali a quelqu'un qui lui fait du thé à son retour du travail. COMMENT JILALI NE PEUT-IL PAS ÊTRE HEUREUX ?

Qui pourrait dire du mal de Jilali ? L'épicier ne s'est jamais plaint de lui. Personne ne l'a jamais vu ni entendu mendier qui que ce soit, nulle part. C'est un HOMME, un HOMME capable. Il peut subvenir aux besoins de sa famille sans l'aide de personne. Il n'a besoin des conseils ou de la prédication de personne. Sa femme et ses enfants sont toujours aussi bien habillés que n'importe qui d'autre dans le quartier. Ses enfants vont à l'école et ont toujours de bonnes notes. Sa femme va au marché hebdomadaire tous les dimanches et au bain turc une fois par semaine. Tout le monde sait que Jilali a beaucoup de choses de quoi se vanter. Jilali n'a aucun souci pour son image.

Jilali a certes une bonne image. Mais son cousin Larbi a une bien meilleure image que lui. Contrairement à Jilali, Larbi est allé à l'école, et c'est à l'école que Larbi a appris le travail du plâtre. Larbi travaille pour le même patron que Jilali, mais il est payé différemment. Larbi ne touche pas le plâtre de ses mains. Il a trois apprentis qui le font pour lui. Le patron paie Larbi pour l'ensemble des travaux de gypse et Larbi donne des salaires hebdomadaires à ses apprentis. C'est pourquoi Larbi vient au travail en voiture, et il a un beau gros Smartphone. Il a quitté le bidonville il y a bien longtemps puis a acheté un petit appartement dans un vieil immeuble d'un vieux quartier, et maintenant il habite une maison à trois étages près du centre-ville. Et il a épousé une seconde femme. Son développement personnel a rendu plusieurs personnes jalouses de lui.



Si Larbi est dans une meilleure situation que Jilali, il est loin d'être le meilleur. S'il a une maison à trois étages, il y a beaucoup, beaucoup de gens qui ont des villas et même des riyads. S'il a une belle voiture neuve, il y a beaucoup, beaucoup de gens qui ont des voitures beaucoup, beaucoup plus belles et plus chères. S'il a deux femmes, il y en a d'autres qui en ont quatre. Ses possessions ne le distinguent pas vraiment du reste de la foule. Pour se démarquer, il doit faire quelque chose d'exceptionnel. Il devrait être comme le beau-frère de son patron, qui est parti de rien pour devenir président du conseil municipal de la ville. Il est devenu l'un des personnages importants de la ville. Beaucoup de gens s'émerveillent encore de son ascension fulgurante dans la politique locale.


L'histoire du beau-frère du patron de Larbi n'est rien comparée à l'histoire d'Alejandro Toledo qui, à l'âge de six ans, a travaillé comme cireur de chaussures de rue, avant de devenir un économiste distingué, puis président de son pays, le Pérou, de 2001 à 2006. Tous les cireurs de chaussures ne peuvent pas espérer devenir président de leur pays.


Et pas seulement Jilali et Larbi vivent pour le plaisir et l'image. Nous le faisons tous. Nous aspirons tous au succès et à l'épanouissement. Et peut-être que nous aspirons tous à monter dans l’estime d’autrui. Au XIX e siècle, par exemple, on délaissa les calèches pour les trains, etc. Pour moudre leur blé, certains délaissèrent les moulins à vent pour les moulins à vapeur. Et qui de nous veut rater le train du progrès ?


A cette époque, on se vantait d'avoir inventé un moulin à vapeur, de pouvoir installer des moulins à vapeur, de moudre son blé et son orge dans des moulins à vapeur. L'un se vanterait d'avoir inventé le train, un autre qu'il conduisait un train, et un autre encore qu'il voyageait en train. C’est toujours un qui a inventé (produit) quelque chose, et un qui a utilisé (consommé) quelque chose.

Vous ne pouvez pas espérer parler toute une journée sans succomber à la tentation de vous vanter auprès de quelqu'un de quelque chose. Chacun de nous a besoin de sentir qu'il est important, qu'il n'est pas moins digne que les autres. Sinon, pourquoi nous regardons-nous dans le miroir ? C'est un besoin fondamental de reconnaissance.

Vous entrez dans une rue bondée, vous entrez dans le hall d'un hôtel, vous vous asseyez dans un café, et tous les yeux sont rivés sur vous. Tous les yeux vous suivront comme un serpent suivrait la pipe d'un charmeur de serpent. Vous êtes né avec un beau visage et votre beauté est restée avec vous, éblouissant les gens partout où vous allez. Ou peut-être êtes-vous allé au marché et avez-vous passé des heures à choisir jusqu'à ce que vous trouviez une robe ou un costume de rêve. Et vous vous sentez bien quand les gens vous regardent.

Plus vous êtes beau, plus votre costume est magnifique, plus les gens vous regarderont. Vous en êtes conscient et vous sortez donc rarement, voire jamais, avant de vous regarder dans le miroir.

Mais quoi que vous fassiez, vous ne pouvez pas toujours être accrocheur. Vous pouvez être complètement éclipsé par les riches et les célèbres. Même les belles personnes tendent l'oreille en entendant le tintement des pièces de monnaie ou le froissement des billets de banque ou, là où l’on n’utilise plus ceux-là, quand on parle d’argent. Pas étonnant donc qu'une belle fille préfère un vieil homme riche boutonneux à un beau jeune homme avec peu ou pas de revenus.


Le problème c'est quand on n'a pas de quoi se targuer alors que les autres autour de nous n'arrêtent pas de se vanter. Malheureusement, nous sommes exposés à la vantardise tous les jours. Même lorsque vous évitez les gens et restez chez vous (dans votre maison isolée), votre télévision ou votre Smartphone vous apportera toutes les vantardises du monde. On se vante dans les publicités, on se vante dans les feuilletons, on se vante dans la musique, plus des vantardises non déclarées de toutes sortes.

 

Parfois, tout le monde – y compris les gouvernements et les entreprises – passe de la vantardise à la mendicité. Une fois la crise passée, tout le monde recommence à se vanter. Les souffrances sont vite tombées aux oubliettes. Pas ou presque de retour à la raison, au bon sens. Je ne fais pas exception. Que Dieu ait pitié de nous !

 

2

La Star du jour 

 

 Tout le monde peut-il être riche ? Tout le monde peut-il devenir millionnaire, en tant qu'influencer, par exemple ? Il n'y aurait alors plus de sans-abri dans la Silicon Valley. Si tout le monde était riche, qui travaillerait dans les champs, dans les mines ou dans les usines ? Un locuteur natif français peut-il être un bon professeur de grammaire française ? Un bon commentateur de football peut-il être un bon entraîneur de football ? Un professeur de Management ferait-il un bon dirigeant d'entreprise ?


Voilà une voiture qui renverse un motocycliste et le fait tomber de son vélo, le blessant grièvement. L'ambulance arrive tout de suite, la police aussi. La victime est vite transportée à l'hôpital. Les médecins et les infirmières l'accueillent aux urgences. Sa famille apprend la triste nouvelle par téléphone et le rejoint bientôt à l'hôpital en lui offrant des fleurs. Un avocat vient s'enquérir des faits. Il veut savoir si la victime a la bonne assurance. Pendant ce temps, un mécanicien arrive pour réparer ce qu'il peut. Puis un balayeur vient nettoyer la zone de l'accident. Ne dit-on pas que le malheur des uns fait le bonheur des autres ? Quand quelqu'un travaille dans une PME qui fabrique des câbles, des systèmes informatiques, ou autre, pour des avions militaires, pense-t-il un instant aux victimes potentielles des avions équipés de ses câbles, etc. ? Que feraient les médecins, les infirmières, les pharmaciens... dans la vie s'il n'y avait pas de malades ? Que feraient les mécaniciens, les avocats, les assureurs, les ambulanciers, les tribunaux, les fleuristes, les opérateurs de télécommunications, les balayeurs, s'il n'y avait pas de tels problèmes ?


Qui peut compter combien de personnes « vivraient » d'un mariage ou d'une cérémonie de funérailles ? Apparemment, beaucoup de gens vivent de ça !

Nous pleurons quand nous perdons notre père, nous sourions quand nous recevons notre part d'héritage. C'est parce qu'on sait qu'on va avoir faim qu'on va chez l'épicier. Le coiffeur est là car il y a forcément des gens qui auront besoin d'une coupe de cheveux. A Casablanca, capitale économique du Maroc, de nombreuses personnes souffrent pendant la période de l'aïd-el-kebir, car de nombreux commerçants et presque tous les artisans (plombiers, mécaniciens, électriciens, réparateurs de réfrigérateurs, etc.) disparaissent de la ville. Ils vont passer les vacances en famille dans leurs villes et villages natals. Ils reviennent dix ou quinze jours plus tard pour faire revivre la ville blanche. Le barbier (arracheur de dents) a besoin de quelqu'un qui a mal aux dents mais qui n'a pas assez d'argent pour aller chez le dentiste ; le cordonnier a besoin de quelqu'un qui a déchiré ses chaussures mais qui ne peut pas en acheter de nouvelles ; le mécanicien a besoin de quelqu'un qui a eu un accident de la route… Quand X ou Y a un mal de dents si terrible la nuit, pense-t-il à tout ça ?


Certains hommes restent pauvres toute leur vie et certains hommes restent handicapés toute leur vie. Un pauvre doit-il pour autant accepter son état de pauvreté comme une fatalité pour lui et ne pas essayer d'améliorer ses conditions de vie ? Dois-je être comme Jilali quand je pense que je pourrais être bien mieux ?

Si tous les hommes étaient comme Jilali, tout heureux et content soit-il, y aurait-il eu des hommes comme Alexandre le Grand ou des civilisations comme l'Empire romain ou des monuments aussi beaux que le Taj Mahal en Inde et l'Alhambra en Espagne ? Si tous les hommes étaient comme Jilali, serait-il possible de prendre le petit-déjeuner à Paris, le déjeuner à New York et le dîner dans les airs sur le chemin du retour à Paris ? Si tous les hommes étaient comme Jilali, y aurait-il eu des villes comme New York ou Tokyo ou Dubaï ? Y aurait-il eu des guerres des étoiles, des conquêtes spaciales, des découvertes, de la science, de la littérature, un quelconque développement ? Si tous les hommes étaient comme Jilali, y aurait-il des rêves ?

Nous sommes tous tentés par le genre de vie visant le grand, fort et rapide. Ce qui est marrant, c'est que quoi que nous fassions, quel que soit le génie que nous soyons, il y aura toujours quelqu'un qui a une longueur d'avance sur nous, avec quelque chose d'un peu plus grand, plus fort ou plus rapide que nous. C'est un jeu de Tom et Jerry !


Je vais aux abords de la ville pour changer d'air et méditer un peu. Je vais un peu plus loin et trouve non seulement des champs vastes appartenant à des personnes riches, mais aussi des demeures d'une beauté éclatante. Chaque fois que je soupire (et me dis) « J'aimerais bien avoir une si belle demeure ! » j'en vois une autre, plus belle, puis une autre, beaucoup, beaucoup plus belle. C'est comme un homme obsédé par la beauté à la recherche d'une belle femme dans une grande ville, chacune le fait oublier les autres. Puis je vais un peu plus loin et trouve une route goudronnée. Je m'arrête quelques instants et je vois non pas une, mais plusieurs voitures que j'aimerais avoir pour moi. De qui serais-je alors jaloux ? Cette route goudronnée me mène, en passant devant de grandes maisons de ferme, jusqu'à une usine de volailles. Serais-je aussi jaloux du propriétaire de cette usine ? Combien de personnes travaillent dans cette usine ? Combien de familles soutiennent-ils ? Combien de personnes sans emploi seraient heureuses de trouver du travail, même saisonnier, dans cette usine ? Combien de poulets et d'œufs cette usine produit-elle chaque jour ? Combien de personnes achèteront, transporteront, etc., ces poules et ces œufs avant qu'ils n'atterrissent sur ma table ? Combien d'autres personnes mangeront les poulets et les œufs de cette usine ? Ce « pauvre » fermier et le « pauvre » propriétaire de cette usine de volaille et les gens qui travaillent pour eux…… sont tous des serviteurs de MOI ! Ils Me servent. Je ne peux pas compter les gens qui me servent tous les jours ! Les vêtements que je porte, qui les a faits pour moi ? Je ne les ai pas cousus moi-même ? La montre que je porte, mon portable, etc, etc, etc. Ne suis-je pas un roi ? Qui m'a dit, par exemple, que le fermier est heureux ? Toutes les personnes souriantes ne sont pas heureuses. Même un comédien insouciant qui rend des millions de personnes « heureuses » avec ses gags peut finir par se suicider, à la surprise générale.


Je regarde ces pauvres femmes et enfants assis par terre, attendant la fin de la récolte des pommes de terre. Pour passer le temps, certaines femmes discutent et plaisantent entre elles. D'autres se taisent en regardant des saisonniers, hommes et femmes, pauvres comme elles ou encore plus pauvres, déterrer les pommes de terre tandis que d'autres les mettent dans des caisses en bois ou en plastique. D'autres ouvriers, hommes et femmes, portent les caisses sur leurs épaules jusqu'aux camions à l'extérieur du champ. Près des camions se trouvent quelques voitures et quelques hommes. Une voiture et un homme se démarquent. N'importe qui peut dire qui est l'homme accrocheur. Il est évidemment le fermier. La voiture accrocheuse est la sienne.

 

Cet homme est la star du jour. J'imagine bien que les hommes souhaiteraient être comme lui, d'avoir ce qu'il a. Les femmes ne refuseraient probablement pas si facilement de l'épouser ou de l'accepter comme beau-fils. Il a un champ si vaste qui vaut beaucoup d'argent et une voiture si magnifique et il porte des vêtements et des lunettes si élégantes et tout le monde lui parle poliment et l'appelle Haj ! Peut-être qu'il a d'autres choses ailleurs. Sa femme est peut-être en train de faire du shopping, en ce moment, dans un centre commercial ou autre, ou peut-être jouer au golf ou peut-être prendre un sauna dans un hôtel 5 étoiles. Ses enfants, s'il en a, doivent être dans des écoles chères… Quelle chance il a lui et sa famille !


Pourtant, je m'arrête pour réfléchir. A commencer par la terre, elle a besoin d'ouvriers pour la travailler ; peut-être d'autres hommes et femmes pour faire les semis, etc. Le fermier pourrait avoir besoin d'un ingénieur ou de techniciens spécialisés. Il a certainement besoin de personnes pour transporter quelque chose, etc. Le jour de la récolte, il y a plus de travail pour plus de monde. Lorsque la récolte sera terminée, ces pauvres femmes et enfants assis et attendant patiemment seront autorisés à entrer dans le champ pour glaner les « mauvaises » pommes de terre… Les « bonnes » pommes de terre seront transportées et livrées aux marchés, supermarchés et petits magasins. Certaines seront exportées ou transformées, etc. Je me dis : Tu vois ? Le fermier ne mangera pas toutes ses pommes de terre ! Ce sont des gens comme moi qui vont manger les pommes de terre. Les enfants (et maris) de ces pauvres femmes seront ravis de manger ces « mauvaises » pommes de terre. Et qui sait ? Certains de ces enfants de femmes pauvres pourraient devenir, un jour, peut-être moins riches, mais bien meilleurs, d'une manière ou d'une autre, que les enfants de l'Étoile du Jour. Ensuite, une partie de l'argent que cet homme gagnera des pommes de terre ira dans les poches d'autres personnes : hôtels, restaurants, écoles, hôpitaux, etc. Je ne puis compter combien de personnes bénéficieront d'une manière ou d'une autre des pommes de terre de ce fermier. Je ne puis compter, par exemple, combien d'enfants seront heureux de manger les chips de ces pommes de terre. Sans oublier l'autre « chanceux », le propriétaire de l'usine de chips et ses employés…


Je me tiens entre deux vastes champs de pommes de terre pour méditer sur tout cela. Je pense aux saisonniers qui étaient heureux de trouver du travail dans ces domaines. Ces travailleurs, qui ont leur propre famille, étaient payés – quel que soit le salaire.


Cette petite méditation décontractée m'amène à me poser des questions : est-ce que je veux réussir à tout prix ou être heureux ? Ce n'est pas la même chose, je suppose. Je sais que beaucoup de gens qui ont réussi sont tout sauf heureux, et beaucoup de gens qui sont heureux n'ont pas eu autant de succès. Alors qu'est-ce que je veux ? Être à la fois heureux et réussi ? D'accord, mais qu'est-ce qui doit primer : le succès ou le bonheur ?

J'ai remarqué que les hommes restent des hommes, après tout. Ce sont des êtres humains. Il y a une limite à ce qu'ils peuvent supporter, quel que soit le niveau (élevé) de leur foi et le degré (exceptionnel) de leur sincérité. Même les prophètes ont connu des moments de faiblesse vis-à-vis de la société, car tout homme aime être aimé dans la société. Aucun homme ne voudrait que les autres disent du mal de lui, moi en premier.

Parfois je peux me dire que mon problème n'est pas tant avec Dieu, ou avec le gouvernement, c'est avec la société. Les gens ne cessent de me demander – ou de se demander – ce que je fais ; certains veulent que je dise que je suis au chômage. Ils me feront la leçon sur ce que je dois faire pour obtenir un (nouvel) emploi – comme si j'étais nouveau dans ce monde ! Ils veulent voir de la faiblesse dans mon regard, dans ma voix. Ils veulent que je me sente petit. Ils veulent que j'aie honte de moi. C'est ça mon problème. Mais alors je pense et finis par réaliser ce que la plupart des gens ont en commun : la cupidité, l'arrogance, l'impatience, l'envie, etc. Que diraient les gens si j'avais un bon travail, etc. etc. ? Ne m'envieraient-ils pas ? Ne serait-ce pas un problème aussi ?


Mais c'est dur, c'est très dur d'être côte à côte avec d'autres hommes quand je ne trouve même pas les mots pour expliquer ma situation sans leur mentir ? Comment puis-je persévérer ? Comment puis-je être un homme ambitieux quand je vois que des gens moins qualifiés que moi sont de loin mieux lotis ? De quoi me reste-t-il à rêver à cet âge ? C'est ça mon problème. Mon problème n'est pas avec Le Livre Saint ou avec l'État, c'est avec la société. Ensuite, je continue de penser jusqu'à ce que j'éclate de rire comme un fou !

La tristesse m'envelopperait au moment où j'apprendrais que je serai licencié, ou au moment où je quitterais mon lieu de travail pour la dernière fois. Je sais alors que je ne pourrai pas me tenir devant des gens qui ont la chance de conserver leur emploi sans ressentir une sorte de honte ou de culpabilité. Ce sont toujours des moments difficiles. Et oui, ce n'est pas toujours facile de penser et de rire.


Il s'agit en effet d'un problème très grave – même en temps normal. Même les personnes très instruites qui trouvent des offres d'emploi très exigeantes et très stimulantes dans des magazines prestigieux, qui répondent à ces annonces et réussissent tous les entretiens et sont acceptées et commencent à travailler avec de très bons salaires…, elles ne savent pourtant pas ce qui peut leur arriver à l'avenir. Toute l'éducation et les compétences que vous avez acquises, ça c'est le passé. Vous aurez peut-être encore à vous soucier du mariage, si vous n'êtes pas encore marié, ou de vos enfants, s'ils sont encore jeunes, ou de votre santé… et tout cela est dans le futur. En d'autres termes, les problèmes ne finissent jamais.


Vous pourriez aller sur des sites commerciaux et gagner de l'argent sans quitter votre chambre, mais ce n'est qu'une partie de la vie, un seul aspect.


J'ai peut-être une bonne assurance. L'assurance, ma foi, ne résoudra que le côté argent. L'assurance ne remplacera pas un œil ou un membre perdu. L'assurance ne résoudra point le côté immatériel (sentiments et émotions, affection, santé mentale…). Et tout cela est dans le futur. Les meilleurs esprits économiques du monde n'ont pas pu anticiper, encore moins empêcher, la crise financière de 2008, et maintenant le monde entier se bat contre la Covid et ses conséquences… Suis-je si sûr que mon esprit puisse anticiper (et éviter) de mauvaises choses pour mon humble personne ?


Imaginez maintenant que j'ai trouvé un bon travail après une longue période de chômage. La première chose à laquelle je penserais est probablement de montrer cela, de m'enorgueillir. J'aurais envie que tout le monde sache ce que je vaux. Et quand ça va mal, qu'est-ce que je fais ? J'essaierais éventuellement de me cacher des gens. Mais pour combien de temps vais-je me cacher des gens ? Ces gens-là finiront par savoir que je suis au chômage, que je souffre. Les gens finiront par me montrer leur vrai visage. Ils me montreront ce que je vaux à leurs yeux. Je me sentirais petit, indigne. Je réaliserais que je vaux ce que j'ai, ce que je possède. Je verrais comment les gens que je pensais être de bons amis réagiraient à ma misère. Je verrais comment les membres de ma famille bien-aimée réagiraient à mon chômage sans fin. Je verrais comment les gens me laisseraient tomber quand j'en ai le plus besoin. Mais comment me sentirais-je quand j'aurais à nouveau l'argent pour acheter ce que je ne pouvais pas m'acheter il y a un an, ou pour aller dans des endroits où je ne pouvais pas me montrer il y a six mois ? C'est la réponse du berger à la bergère, n'est-ce pas ?


Quand je pense à ces personnes fragiles que je croise dans la rue (mendiants, sans-abri, prostituées…), je me rends compte à quel point l'Homme peut devenir faible après toute sa force et son pouvoir.


Quand je sors dans la rue avec une veste et un pantalon propres, qui saura qu'il n'y a pas de sous dans mes poches ? Parce que je ne mendie pas, les gens penseront que je suis autosuffisant. Donc, personne ne viendra m'aider quand bien même serais-je surchargé de dettes et que je ne peux probablement même pas m’offrir le pain de ma journée. Je vais dans la rue comme une personne normale – comme si j'étais riche. Peut-être que je suis riche dans mon cœur. C'est-à-dire que je ne suis pas impressionné par ce que les autres ont. Qui a quoi, Je m'en fiche. Je ne suis pas ébloui par les réalisations des autres. Je respecte tout le monde. Je souhaite du bien à tout le monde. Mais – enfin ! – je souhaite tout de même être une personne normale, mais vraiment normale, moi aussi, « comme tout le monde », quoi. Si d'autres personnes veulent tout avoir dans ce monde ; si elles veulent obtenir quelque chose à 20 ans, d’autre chose à 30 ans, d’autre chose à 40 ans, d’autre chose à 50 ans… moi j'aimerais juste obtenir quelque chose avant de mourir. Et je ferais tout mon possible pour y parvenir, comme si j'allais vivre éternellement.

Au moins, en me parlant ainsi, si tant est que j’ai la chance d’avoir les nerfs solides au bon moment, je réussirais peut-être à calmer momentanément les ardeurs de mon âme qui n’accepte pas de s’incliner devant le fait accompli. L'auto-coaching peut parfois être plus apaisant que le conseil de quelqu'un.

Maintenant, si j'en avais les moyens, est-ce que je penserais à ces gens qui se diraient la même chose, qui auraient ces mêmes émotions, qui sont peut-être dans la même situation et que je ne connais probablement pas parce qu'ils ont l'air bien quand ils sortent dans la rue. Peut-être que beaucoup de ces personnes se sont retrouvées dans le besoin de choses de base. Peut-être qu'ils ont essayé en vain tout ce qu'ils pouvaient pour obtenir ces choses de base, de première nécessité. Peut-être qu'ils ont suivi tous les conseils possibles et écouté les meilleurs experts du développement personnel du monde ! Et peut-être étaient-ils enfin convaincus qu'il n'y avait rien qui cloche avec leur personnalité, ou leur intelligence, ou leur talent ou leur capacité physique de trouver du travail, par exemple, et donc pouvoir acquérir ce dont ils avaient besoin. Peut-être qu'ils blâment le destin. Je ne sais pas.


Je suis parmi ceux qui suivent l'actualité. Je vois que, dans de nombreux pays, beaucoup de gens se désintéressent de la politique. Ils ont la conviction que leur vote a été rendu inutile et que le jeu démocratique ne sert plus à rien. Pour eux, rien ne va changer. Et donc ils ne se déplacent aux urnes que lorsqu’il y a de fortes amendes. Mais je vois aussi que beaucoup de gens font encore confiance au – ou du moins attendent quelque chose du – gouvernement. Seulement, malheureusement, de nombreux gouvernements ont de plus en plus de mal à répondre aux besoins des personnes (emploi, santé, éducation…). Certaines personnes ont choisi de se révolter et de renverser des dirigeants et de changer des régimes. Ils voulaient, disaient-ils, avoir leur destin entre leurs mains. C'est la peur de l'avenir. Cette crainte est-elle légitime ?


Eh bien, même un grand empereur aurait peur de perdre son trône. Plus que la peur, qui n'est peut-être pas toujours justifiable, il existe de nombreuses réalités indéniables. L'âge est un fait : personne ne reste jeune et fort pour toujours, et il y a la mort au bout du chemin. Même au plus fort de notre jeunesse et de notre force physique et mentale, il y a le sommeil, par exemple, et ce sommeil-là est une forme d'impuissance totale. Pensons-nous à de si petites choses ?


Le monde ne fonctionne pas de manière mécanique ou automatique. Certes, un grain de blé donnera toujours un grain de blé et un œuf donnera toujours un poussin. C'est la règle. Mais ce n'est pas parce qu'un homme a couché avec une femme qu'il y aura forcément un enfant. Ce n'est pas parce qu'il pleut que la terre produira des fruits et des légumes. Ce n'est pas parce que c'est le même père et la même mère que les enfants auront la même taille ou les mêmes traits de visage... Dans certains endroits des gens sont tués par les inondations, dans d'autres par la sécheresse.


Il se peut qu'un bébé naisse dans la meilleure clinique d'accouchement ou dans le meilleur palais du monde, mais pour lui, à la naissance, ce n'est pas comme dans l'utérus. C'est probablement pour ça qu'il pleure ! Qu'est-ce que cela signifie pour moi, de toute façon ? Cela signifie simplement qu'en tant qu'être humain, je devrais m'attendre au danger avant la quiétude, aux problèmes avant les solutions, aux huées avant les applaudissements, à la souffrance avant la délivrance... Les problèmes, le danger et la peur font partie de notre monde, qu’on le veuille ou non. Appeler ça pessimisme ou réalisme, ça ne change rien. Même si je me mettais à y penser de la manière la plus complexe, je ne pourrais jamais tout comprendre. Je ne pourrai jamais tout savoir.


Mais le monde n’est tout de même pas aussi moche que ça. Il y a tellement de gens heureux dans le monde. C'est un fait. Il n’y a pas que des misérables. Alors qu'est-ce que je fais quand je suis devant une situation quelconque ? Eh bien, je choisis, en fonction de mes convictions personnelles, ou parfois selon les conditions dans lesquelles je vis, puis j'assume la responsabilité de mes choix. Mes choix, actifs ou passifs, libres ou contraints, peuvent m'éloigner des autres comme ils peuvent nous rapprocher. Il y a bien des gens qui se convertissent sans aucun problème. Il y a des gens qui fuient des pays où ils ne se sentent plus libres de faire ce qu’ils veulent ou de se comporter comme bon il leur semble. D’autres, au contraire, quittent les pays les plus libres pour aller vivre là où la vie peut ressembler à un enfer. C’est une question de choix. Et c’est aussi une question de possibilité. Ce n’est pas évident pour un sunnite de se convertir au chiisme ou pour un chiite de devenir sunnite, par exemple. Ce n’est donc pas toujours facile de choisir. Seulement, quand on choisit il faut assumer.


Il m'incombe juste d'user de mon intelligence pour discerner le bien du mal, pour démêler le vrai du faux. C'est à moi de voir la beauté des humains, des oiseaux, des ruisseaux, des animaux, du ciel étoilé, de la mer, de la poésie, de la musique, des arts, des vêtements des gens, de leurs différences : physiques, culturelles, civilisationnelles et autre. C'est à moi d'apprécier cette chance qui m'est donnée de sentir et de jouir de la beauté de ce monde sous toutes ses formes. Certes, il ya tant de misère dans ce monde. Il y en a plein les problèmes. Et il y en aura encore plus à l’avenir. Qui n'a pas ses petits soucis et ennuis de chaque jour ? Toutefois, et quoique difficile et courte, la vie est bien plus belle que ça. Si elle est courte et difficile c'est certainement pour une raison - comme on va voir dans la deuxième partie de ces réflexions. Quand on est jeune, on pense souvent à la belle vie. Mais même quand on y accède, il n'y a pas que le salaire et la voiture de fonction. On pourrait se retrouver face à une vie insipide, tout à fait monotone, dénuée de sens. On pourrait se retrouver avec une très belle situation, mais dans une ville pleine de pollution, d'ordures, de délinquance, etc. Alors on dirait que la vie n’est pas belle ? La vie ça se sent, ça ne se vit pas. Que vous mangiez du poisson ou de la viande, des pommes de terres ou du caviar, ça revient au même. Vous n'avez plus faim. Que vous vous en sentiez content ou pas, c’est ça la question !


Maintenant, si je veux bien me questionner par rapport à des réalités existentielles plutôt qu’à mes soucis quotidiens uniquement, dois-je me contenter de m'inspirer des oiseaux et ne pas voir leur beau plumage ou leur incroyable migration ? Dois-je me contenter de distinguer les couleurs et les formes et connaître leurs noms et ne pas penser à l'origine de toutes ces couleurs et formes ? Qui les a créées ? Pourquoi ?

 

J'ai appris à croire que nous sommes tous humains. Mais c’est plus qu’une croyance. C’est une réalité. Nous sommes tous fragiles. Nous avons les mêmes peurs, les mêmes aspirations. Tous mangent des légumes et des fruits, du pain et du fromage – s’ils en ont. Tous veulent grandir, travailler, se marier. Tous auront – plus ou moins – les mêmes problèmes et les mêmes plaisirs. Nous avons tous besoin d'eau et d'oxygène. La même eau de la Seine, ou du Nil, est bue par les plantes, les animaux, les blancs, les noirs, les chrétiens, les juifs, les musulmans, les athées... Pourvu qu'il y ait de l'eau pour tous ! Parfois, il n'y en a pas, ou pas assez. Les gens meurent de faim ou de soif. D'autres migrent pour fuir la famine. Pas question de parler de beauté à ces gens-là. Mais qu’est-ce qu’on fait quand on a la pluie, quand on a la brise et les coquelicots, quand on a le beurre et le miel ? Qu’est-ce qu’on fait quand on a la vie facile ? Eh bien, on se moque du destin !


Je vois que nos yeux n'ont pas toujours la même couleur. Même les yeux de la même couleur ne sont pas identiques. Chacun est un être à part, quelles que soient ses croyances. Chacun a sa propre empreinte digitale et sa propre empreinte oculaire, et ce n'est pas parce qu'il est chrétien, musulman ou bouddhiste. Chacun a sa propre voix, son propre cœur, son propre cerveau, sa propre vie. Qui a conçu tout ça ?


On pourrait tous dire que le monde aurait pu être un meilleur endroit sans pauvre ni mendiant, sans veuve ni orphelin, sans guerre ni famine. Mais, je me demande, quel serait notre mérite, nous les humains, si nous ne montrions pas notre humanité au moment des tremblements de terre, des sécheresses, des inondations, des éruptions volcaniques, des crises économiques, des drames personnels, etc. ?


Et c’est bien le cas, heureusement. Dans la pire adversité, je vois une incroyable entraide, de la solidarité, de la compassion … Oui, je vois aussi des voleurs et des pillards. En temps de guerre, je vois ceux qui massacrent des innocents, qui détruisent tout sur leur passage, et, en même temps, je vois des gens qui prennent des risques incroyables pour sauver des vies ? Pourquoi ne verrais-je donc pas dans ces événements et dans mes propres problèmes personnels une sorte d'alerte, un rappel que j'ai peut-être trop oublié que je ne fais que passer par ici sur cette terre et qu'il est grand temps que je me prépare à ce qui pourrait m’arriver après la mort ?


C'est l'homme qui a osé tuer les humains. Un homme a tué son frère par jalousie. Cette même jalousie mène encore à la guerre et met sur la route des millions de réfugiés. Ce n'est aucunement une divinité ou une autre qui brûle des centaines de tonnes de blé ou les jette à la mer pour augmenter les prix. Ce n'est aucunement une divinité ou une autre qui a imposé à quiconque d'opter pour le nucléaire ou permis à quiconque d'exploiter les gens. L'air est gratuit pour tout le monde. Le soleil est gratuit pour tout le monde. La vie est gratuite pour tout le monde. Néanmoins, je me dois toujours de laisser une marge d’imprévu ; je dois toujours m'attendre à un problème, à une catastrophe climatique ou à une grave crise économique ou sociale. Par pessimisme ou par réalisme, ça ne change rien. Un bon gardien de but, si l’on parle foot, doit toujours être en alerte même face à la plus petite équipe au monde !

 

3

Glamour et pouvoir 

 

Comme tout le monde, je vois le glamour de certains. Je vois comment vivent les gens « chanceux ». Je vois le fossé se creuser de plus en plus entre les pauvres et les riches... Et je me dis : tiens, il y avait avant nous, aux temps anciens, comme aux temps plus récents, des gens qui jouissaient, eux aussi, d'un certain prestige ; il y avait de beaux hommes et de belles femmes qui s'aimaient, qui avaient des enfants, qui vivaient dans de belles demeures, qui travaillaient (pour certains), qui écoutaient de la musique, qui se promenaient dans de beaux jardins, qui se disaient de belles paroles, qui faisaient l'amour, qui rêvait de jours meilleurs, qui tombaient malades, qui divorçaient, qui se faisaient la guerre, qui s'entretuaient, qui se blessaient et qui mouraient. Des gens comme nous, quoi. Est-ce donc une simple perpétuation de l'espèce humaine ? Où allons-nous ? Aurons-nous, êtres humains, toujours les mêmes plaisirs, les mêmes frustrations ? Pourquoi sommes-nous ici sur cette terre ? N'y aura-t-il pas un jour où le malheur disparaîtra à jamais ? Que vaut la vie si on ne la vit pas pleinement, dans la joie et la quiétude ? A quoi ça sert de passer son temps à ressasser les questions en boucles ? A quoi sert l'Histoire, à quoi sert la philosophie, à quoi sert la littérature... si les historiens eux-mêmes, si les philosophes, si les écrivains se suicident parfois pour échapper à leurs terribles réalités ? Je n'ai pas de réponses à cela. Cependant, je ne peux que remarquer qu'il y a beaucoup de gens qui ne se suicident pas. Ils affrontent la vie avec le peu de moyens dont ils disposent. Cela signifie que, au moins pour ces personnes-là, la vie vaut la peine d'être vécue. Maintenant, la vie vaut-elle vraiment la peine d'être vécue – quelles que soient nos peines ?


Question : pourquoi m'a-t-on enseigné l'Histoire à l'école ? Je ne sais pas. Mais quand je lis maintenant des livres d'histoire ou des contes ou poèmes anciens, je peux facilement remarquer que les gens ont toujours été plus importants que leurs habitations, leurs montures, leur argent ou tout ce qu'ils pouvaient posséder. L'Homme a toujours eu peur de la maladie, de la mort, de la pauvreté, entre autres. L'Homme a toujours eu besoin de se sentir rassuré, protégé, en sécurité. L'Homme a toujours fait la paix après la guerre ; il a toujours créé des tribunaux pour rendre justice ; il a toujours construit des écoles pour éduquer les générations futures ; il a toujours construit des villes et des villages pour permettre aux hommes de se sentir proches les uns des autres, de créer toutes sortes de relations saines, de se donner la main, d'échanger des services, même lorsque les relations personnelles ou entre voisins immédiats ou lointains ne sont pas parfaites. Parfois l'Homme peut souffrir du froid, de la chaleur, de la faim, de la soif, de la fatigue, de la peur, de la perte d'êtres chers... Mais alors il apprécierait le plaisir de manger après la faim, le plaisir de boire après la soif, le plaisir de se reposer après la fatigue, le plaisir d'aimer, etc.


Dans le passé, les gens apportaient le savoir des anciens – dans leurs têtes –, puis le transmettaient aux générations suivantes. A chaque fois de nouveaux palais, écoles, routes, jardins, usines, etc, ont été construits. La connaissance du monde de l'homme s'est élargie au fil du temps. Et à chaque fois il y avait un nouveau royaume, bon ou mauvais. La question est, pourquoi ces « bons » royaumes n'ont-ils pas duré éternellement ? Pourquoi y avait-il aussi de « mauvais » royaumes ? C'est difficile d'y répondre. Mais, fait intéressant, l'Histoire nous donne quelques indices.

Beaucoup de choses que nous utilisons aujourd'hui ont été inventées par différents peuples dans différents endroits à différentes époques. Le bronze, par exemple, a été inventé par les Chinois, le verre par les habitants de la Mésopotamie, le papier par les Égyptiens, l'alphabet par les Phéniciens, etc. Chaque peuple a appris des autres peuples et a fait ses propres inventions, élargissant ainsi la connaissance du monde de l'homme. Ces connaissances se sont propagées à travers le commerce et la conquête. Les conquérants ont hérité du savoir du peuple vaincu et l'ont emporté chez eux ou l'ont répandu dans d'autres lieux. En même temps, les conquérants apportaient leur mode de vie, leurs pensées, leurs arts et leur religion.


L'interaction entre tant de puissances, tant de civilisations et tant de modes de vie obligeait chaque peuple à défendre sa propre existence. Chaque peuple se devait de défendre tout ce qui était en jeu pour lui. Cela comprenait évidemment sa culture. Ainsi, ceux qui croyaient en une divinité, n'importe laquelle, devaient défendre leur propre foi en utilisant tous les outils disponibles, y compris ceux qui avaient été inventés ou développés par des nations qui ne partageaient pas forcément leur foi. De tels outils auraient inclus l'alphabet des Phéniciens et la logique grecque. Ainsi toutes les nations (je veux dire bonnes ou mauvaises) étaient tout sauf « redondantes ». Elles étaient toutes aussi utiles les unes aux autres.


Il est également intéressant de noter que la plupart de ces premières interactions entre diverses nations rivales ont eu lieu juste à l'intérieur ou autour de la Palestine. Les Égyptiens, les Babyloniens, les Perses, les Hittites, les Grecs, les Romains et bien d'autres encore - tous y ont pris pied à un moment donné de l'histoire. Et puis vinrent les Arabes, de La Mecque. Ces Arabes se sont retrouvés en train d’aller dans toutes les directions, allant vers des nations qui avaient connu des empires impressionnants, et ont fini par construire leur propre empire s'étendant sur la majeure partie du monde alors connu.


Il s'en est suivi une magnifique interaction mondiale. Les Arabes ont emprunté des connaissances anciennes (dormantes) aux Grecs, aux Perses et à d'autres nations, les ont mises à jour et enrichies, puis les ont diffusées dans toutes les directions. Bagdad est devenue la capitale mondiale de la science. Et en Occident, il y avait Cordoue, en Espagne, d’où la science arabe a été transmise à l'Europe par la traduction. Averroès parlait de Dieu aux musulmans et aux non-musulmans européens en utilisant la logique d'Aristote.

Bagdad a été détruite, mais le savoir islamique a survécu. Il a survécu parce que ce n'était pas seulement dans les livres que les Mongols ont jetés dans le Tigre, mais aussi dans le cœur et l'esprit des gens. Comme la destruction de la bibliothèque d'Alexandrie dans l'Antiquité, la perte des bibliothèques de Bagdad aurait pu être une tragédie bien plus terrible s'il n'y avait pas eu ce que j'ai appelé des interactions. Marrakech, qui a été construite et faite sa capitale par la dynastie almoravide du Maroc, a été délibérément et complètement détruite par ses successeurs almohades. Ceux-ci ont reconstruit toute la ville de la plus belle manière possible, car ils avaient déjà « reçu » les connaissances nécessaires de leurs prédécesseurs.

Même la reconstruction de toute une nation est possible s'il y a les connaissances et la volonté nécessaires. L'Europe a fait le meilleur usage des connaissances des premiers musulmans et s'est reconstruite en quelques générations parce que son propre peuple avait la volonté de le faire.


En Europe, le conflit entre l'Église et les nouveaux scientifiques a engendré une nouvelle pensée. Certains se sont accrochés à leurs croyances religieuses, se défendant en utilisant la logique et la philosophie. D'autres ont complètement rompu avec l'Église et ont appelé leur voie « laïcité ». Ils se défendaient en expérimentant leur connaissance du monde, excluant toute référence au Royaume Invisible.


La nouvelle connaissance du monde, basée sur l'expérimentation, a conduit à la révolution industrielle. L'essor de l'industrie a mené à une diffusion des connaissances à une échelle phénoménale.


La colonisation, elle, a permis à plus de gens d'aller dans plus d'endroits. Les Africains « sont allés » en Amérique, emportant avec eux leurs religions, dont l'Islam. D'autres musulmans ont été emmenés en Europe, où ils ont continué à pratiquer leur foi à une époque où un grand nombre de chrétiens cessaient d'aller à l'église. Les orientalistes (d'Europe) se sont rendus dans le monde arabe et islamique pour « restituer » une partie de l'héritage arabe et islamique aux Arabes et musulmans nouvellement éveillés.


Maintenant, cet héritage (importé) est réexporté avec une valeur ajoutée. Cela se fait via Internet et les chaînes de télévision par satellite. Et c'est ainsi que l'islam est devenu la religion à la croissance la plus rapide en Amérique. Cela a été rendu possible par la technologie américaine et l'argent du pétrole arabe.


L'argent du pétrole arabe a contribué, entre autres, à la construction de grandes mosquées, de grands instituts et bibliothèques islamiques, et à l'impression du Coran et d'autres livres religieux en grandes quantités dans de nombreuses langues dans de nombreuses régions du monde.

Même au sein des États islamiques les plus pauvres, l'islam croît aussi vite que la démographie. Partout où vous allez, il y a une nouvelle mosquée et une nouvelle école parce qu'il y a un nouveau village, une nouvelle ville ou une nouvelle banlieue. Les petites villes se transforment en grandes villes, et donc les petites mosquées et écoles deviennent de plus en plus grandes et nombreuses.


Les moyens de communication et de transport ainsi que les systèmes éducatifs modernes ont rendu l'interaction mondiale incroyablement plus facile chaque jour. De plus en plus de personnes surmontent leur analphabétisme. De plus en plus de gens apprennent plus et plus encore les uns des autres. De plus en plus de gens viennent les uns vers les autres. La migration, le tourisme, les voyages d'affaires, la guerre… jouent un grand rôle dans l'échange toujours croissant d'expériences humaines. La mondialisation n'a fait que pousser cet échange encore plus loin.


Quand, au 7ème siècle après JC, l'Islam a atteint les terres au-delà de la péninsule arabique, les musulmans non arabes (qui ont appris l'arabe pour des raisons sociales, politiques, professionnelles ou scientifiques) ont partagé l'émerveillement des Arabes devant la splendide langue du Coran. Si Romains et Perses avaient jusqu'alors exprimé leurs goûts esthétiques et leur savoir-faire à travers la manière dont ils ornaient leurs palais, églises et temples, les Arabes, eux, avaient exprimé la beauté à travers des descriptions poétiques de toutes les belles choses qu'ils pouvaient trouver ou voir autour d'eux : chevaux, chameaux, gazelles, corps et visages humains, paysage, sentiments... En rassemblant les mêmes lettres arabes, le Coran a fait incroyablement mieux que n'importe quel poète arabe ou non arabe. Le Coran est venu avec quelque chose de simple et de sophistiqué à la fois pour les Arabes et les non-Arabes. Ces non-Arabes utilisaient de minuscules morceaux de bois, de verre, de pierre, etc. pour créer les meilleures décorations possibles.


D'une certaine manière, l'histoire de l'Islam ne peut être différente de celle de l'Egypte ancienne ou de la Grèce ou de toute autre civilisation ou empire. Elles reflètent toutes la nature humaine d'une manière ou d'une autre. L'Islam a été victime de son propre succès. L'islam est apparu à La Mecque, puis s'est installé à Médine, puis s'est répandu en quelques années dans la quasi-totalité de la péninsule arabique. Médine est devenue la capitale. Il y avait tellement d'argent qui rentrait, un territoire en constante expansion et de nombreuses opportunités pour les personnes ambitieuses. Cela ne pouvait que conduire à des rivalités, même parmi les musulmans arabes. C'est tout à fait humain. Cela s'est produit dans toutes les nations à travers l'Histoire. Dans toutes les nations, des rois ont tué leurs fils et leurs frères et des princes ont tué leurs pères et leurs oncles - pour l'amour du pouvoir. Les petits-fils du prophète Mahomet ont tous les deux étés tués pour des raisons politiques : Hussein a été décapité et Hassan empoisonné. Cela s'est passé sous la dynastie des Omeyyades, la même dynastie qui a construit le magnifique Dôme du Rocher à Jérusalem et a introduit l'Islam en Espagne. Le dernier calife de la dynastie abbasside fut, selon certains historiens, « roulé dans un tapis et piétiné à mort » par les Mongols, les mêmes Mongols qui construisirent plus tard le magnifique Taj Mahal en Inde. Les Mongols n'ont pas seulement massacré d'innombrables personnes lors de leur conquête de l'Irak, ils ont également détruit les bibliothèques de Bagdad, qui contenaient des livres de philosophie et de sciences grecques, des livres de sagesse et d'art indiens et persans, des livres de théologie islamique : tout a été jeté dans le fleuve Tigre. Mais ces Mongols « barbares » ont donné naissance à des dirigeants mongols très civilisés qui ont amené l'islam à des terres s'étendant de l'Inde à la Chine en passant par la Russie… La plupart des vieilles mosquées dans ces endroits ont été construites par des Mongols – les mêmes Mongols qui ont commis des atrocités non seulement contre les Arabes, mais aussi beaucoup d'autres nations. Ce sont eux qui ont vendu en esclavage des hommes libres d'Asie centrale, des hommes comme Baibars, lequel est devenu l'un des plus grands dirigeants de l'histoire égyptienne et syrienne. Les Mamelouks, dynastie de Baibars, avaient leur part de « barbarie ». Eux aussi ont commis des atrocités, mais les gens se souviennent d'eux plus pour leur bel héritage que pour leur côté « barbare ». Le Caire, Jérusalem et Damas regorgent de magnifiques monuments mamelouks. Les Mamelouks ont été remplacés par les Ottomans, lesquels ont introduit l'islam profondément en Europe et ont construit un grand empire comprenant la majeure partie du monde arabe.

 

Au cours de mon année de baccalauréat, j'ai été chargé de donner un exposé en arabe sur Mahmoud Sami Al-Baroudi, un éminent poète égyptien d'origine turque. Certains de mes camarades de classe étaient des lecteurs avides et ils lisaient presque tout, surtout la philosophie et la littérature. Je savais que j'aurais du mal à leur répondre une fois qu'ils commenceraient à me poser des questions, peu importe la qualité de mon exposé. Leurs questions ont été en effet très difficiles et j'étais gêné, mais j'avais plus d'un tour dans mon sac. Quand je me suis senti vaincu, j'ai proposé de lire des extraits de la poésie d'Al-Baroudi. J'ai lu un de ses poèmes d'amour et il y a eu de gros applaudissements dans la classe ! Même ces éléments durs et intraitables, qui n'avaient jamais été convaincus par les réponses de personne, furent envoûtés par la beauté du poème d'Al-Baroudi. Al-Baroudi était un soldat qui aimait la langue arabe. Il lui a donné son cœur et elle lui a donné la renommée et la gloire. (Il devint plus tard Premier ministre d'Égypte.) Son époque marqua le début de la Renaissance arabe. Cette renaissance arabe a commencé avec la poésie arabe. Ahmad Chawqi, surnommé « Prince des poètes », était également égyptien d'origine turque. Ses poèmes chantés par Oum Kalthoum « unissaient » les âmes de tant d'Arabes et de musulmans à travers le monde. Ces « nouveaux Arabes » ont réalisé à quel point l'arabe classique était importante même à leur époque. Le Caire, Beyrouth et Bagdad ont fait revivre cette belle langue arabe. Etudiant, j'entendais le dicton : « Le Caire écrit, Beyrouth imprime et Bagdad lit » ! Il y avait des lecteurs, des écrivains et des journaux arabes même dans les Amériques ! En fait, des écrivains arabes chrétiens, tels que Jubran Khalil Jubran, Elia Abou Madi et Mikha'il Na'ima, qui vivaient aux États-Unis, ont encore enrichi davantage la littérature arabe avec leur poésie et leur prose en arabe. Tant de vieux livres arabes et islamiques ont été sortis de l'oubli (par les eux-mêmes Arabes et des orientalistes) et ont été imprimés, pour la première fois. Le Caire est devenu la Mecque des écrivains et traducteurs de langue arabe. Le nombre d'écoles et d'alphabètes arabes a commencé à augmenter de jour en jour. Mais tous les Arabes n'étaient pas fiers de leur histoire, de leur langue, de leur religion, de leur civilisation. De nombreux Arabes ont été impressionnés par les colonisateurs. Ibn Khaldoun avait souligné dans sa Mouqaddima que les peuples vaincus ont tendance à singer les vainqueurs.


Il y a un siècle, la plupart des Arabes vivait à la campagne, la plupart était analphabètes, la plupart vivait de l'agriculture et du pâturage. Sous la domination coloniale, de nombreux Arabes ont migré vers les villes, beaucoup ont abandonné l'agriculture et le pâturage pour travailler comme cols bleus dans des usines ou comme artisans dans de petits ateliers. Leurs enfants sont allés à l'école et, lorsque les colonisateurs sont partis, sont devenus des cols blancs dans des franchises. Certains sont devenus fonctionnaires dans la nouvelle administration. De plus en plus de personnes goûtèrent aux plaisirs du travail à vie ; les jeunes devinrent financièrement indépendants, puis socialement indépendants. N'importe qui pouvait mener la vie qu'il souhaitait dans sa nouvelle maison. En quelques décennies, les villages sont devenus des villes et les petites villes sont devenues plus grandes. Beaucoup d'emplois dans le public, beaucoup d'usines (principalement des franchises), beaucoup d'ateliers, beaucoup de magasins de toutes sortes et de toutes tailles. La prospérité était à la portée de tant de personnes, alphabétisées et analphabètes. Il était facile pour beaucoup de gens de se faire construire ou de s'acheter une maison, d'envoyer leurs enfants à l'école, de créer des entreprises, de vivre en ville. Ceux qui sont allés à l'étranger, la plupart en tant que cols bleus, ont envoyé de l'argent chez eux, puis ont construit leurs propres maisons, créé leurs propres entreprises. Leurs enfants ont eu beaucoup de succès. Dans les États arabes nouvellement indépendants et riches en pétrole, les opportunités étaient bien plus importantes. On pouvait donc rêver de glamour et de pouvoir.


Puis, soudain, la première crise économique (dans les années 1980). Ensuite, le problème de plus en plus grave du chômage. Ensuite, la crise toujours croissante du logement et du mal logement. Ensuite, toutes sortes de problèmes. La vie n'est plus aussi rose qu'avant. Aujourd'hui, les gens s'inquiètent pour leur retraite, pour l'avenir de leurs enfants, pour les conséquences de la pollution… De moins en moins de gens rêvent d'un emploi à vie et d'une retraite confortable. Et au milieu de tout cela, au milieu de tant de quartiers nouvellement construits, appartements sur appartements sur appartements, vous voyez une nouvelle mosquée.


Ce qui s'est passé dans le monde arabe s'est également produit dans d'autres parties du monde. L'État-providence a été créé pour donner aux gens un certain sentiment de stabilité, de sérénité et de confiance. Malheureusement, les « Trente Glorieuses » sont terminées. Certains sont encore nostalgiques de l'ère communiste où ils pouvaient, au moins, trouver auprès de l'État un havre de paix : logements, scolarisation des enfants, soins médicaux gratuits, etc. Ni l'État providence, ni l'État communiste, ni le meilleur État démocratique du le monde ne peut plus rassurer personne. La mondialisation a conquis tous les aspects de nos vies au point que certains ont déjà commencé à parler de démondialisation. Personne ne sait plus ce que l'avenir nous réserve. C'est la même vieille histoire de la peur de l'inconnu.

4

Justice  sociale

 

 Quelqu'un a dit : « Pour résoudre le problème du chômage de nos jeunes, nous n'avons qu'une solution : l'impérialisme. » Cela était peut-être possible au XIXe siècle. De toute vraisemblance, il est de plus en plus difficile d'envisager de telles solutions radicales. Que faire, alors ? Les multinationales ont de plus en plus de mal à se concurrencer alors que le pouvoir d'achat n’est pas au top dans une bonne partie du monde. Les systèmes éducatifs rencontrent de sérieuses difficultés même dans de nombreux pays développés. Le moral des ménages et des jeunes dans tant de pays n'est pas du tout brillant. De nombreux jeunes ont fait faillite avant même de commencer à travailler parce qu'ils étaient trop endettés pour leurs études supérieures. D'autres se tournent vers la prostitution pour financer leurs études. Bref, il y a problème.


Une révolution a éclaté en Tunisie en 2010, puis a atteint d'autres pays arabes. Les manifestants ont réclamé une nouvelle constitution. Mais les gens ne voulaient pas d'une nouvelle constitution juste pour l'amour d'une nouvelle constitution. Ils voulaient la justice sociale. Mais alors, ils ne voulaient pas de justice sociale juste pour l'amour de la justice sociale. Ce qu'ils voulaient, en fait, c'était une vie meilleure : des emplois surs, des logements décents, une meilleure scolarisation, de meilleurs services de santé, de meilleures infrastructures, des stades... et beaucoup de liberté. Tous ces droits sont désormais inscrits noir sur blanc dans la nouvelle constitution. Mais une vie meilleure, un certain sentiment d'amélioration et de sécurité ? Cela se fait toujours attendre. Ce genre de prospérité est malheureusement difficile à imaginer dans un avenir prévisible, dans cette partie du globe, l'Afrique du Nord.


Des milliers, voire des millions, de personnes dans ma région ont acheté des maisons à crédit et achètent toutes sortes de biens de consommation à crédit. Beaucoup de ces personnes vivent avec un budget serré. Et ceux et celles qui n'ont pas d'argent à dépenser ? Qu’est-ce qu’ils font ? J'entends souvent des hommes d'affaires, des analystes économiques et même des responsables gouvernementaux dire que si des dizaines de milliers de jeunes ne trouvent pas de travail, c'est à cause de l’inadéquation formation-emploi. Les diplômés en histoire-géographie, en philosophie, etc., s’ils n’ont pas la chance de décrocher un poste dans la fonction publique, eh bien, ils n'ont rien à faire dans le monde des affaires. Ils ne faisaient que perdre leur temps à l'université. Les entreprises veulent des gens compétents. Elles veulent des ingénieurs, des cadres, des techniciens spécialisés, etc. Alors que faire ? Et si, pour une raison ou une autre, vous ne pouviez pas étudier ce que veulent les entreprises ? Allez-vous donc vous joindre à des sit-in devant les bâtiments gouvernementaux pour faire pression sur le gouvernement pour qu'il vous trouve un emploi ? (Cela a marché pour certains, mais pas pour tout le monde.) Attendriez-vous la reprise économique ou une meilleure croissance économique ? Utiliseriez-vous de l'héroïne ou de la cocaïne pour oublier ces problèmes ?


C’est un véritable casse-tête. J’ai entendu des experts avancer toutes sortes de propositions, des plus sérieuses aux plus farfelues, et à la fin ils vous disent, c’est au gouvernement de prendre la décision, de trouver des solutions. Mais quel gouvernement au monde va attendre des propositions de quiconque s’il a les solutions ? Alors qui a la solution ?


Quel est le problème, d’abord ? Apparemment, il n’y a pas que les personnes à la recherche d’un emploi qui souffrent. Quand il y a une crise tout le monde ou presque souffre. Et quand on souffre on n’a pas envie de réfléchir. Mais – ma foi – quand on n’a plus que nos yeux pour pleurer, il faut réfléchir. On a besoin d’un médicament au moins pour calmer un peu nos douleurs. Alors réfléchissons !


L'une des sources de notre malheur est notre anxiété face à l'avenir. Jusqu’à quand vais-je garder mon emploi par ces temps de crise ? Et mes enfants ? Comment pourrai-je leur donner une éducation appropriée si je perds mon emploi ? D'horribles cauchemars. Les personnes sans enfants sont également anxieuses. Qui s'occupera de moi quand je serai vieux ? Je n'ai pas de sécurité sociale, aurai-je quelqu'un pour me nourrir quand je serai trop vieux pour travailler ?


Nous vivons dans un monde où la précarité et la vulnérabilité ne surprennent plus vraiment personne, les jeunes ne sachant pas quoi étudier, pendant combien de temps, pour quelle opportunité, pour quelle carrière professionnelle ; avec des parents qui ne savent quoi faire de leurs maigres revenus, s'ils en ont encore. Chômage chronique, divorce, enfants nés hors mariage, enfants abandonnés, mères célibataires, sans-abri, drogue, prostitution, pollution, concurrence féroce dans tous les domaines, individualisme à outrance, peur de l'inconnu... Nous sommes réduits à rêver de ce que nous ne sommes pas ou ce que nous ne pouvons pas être. Mais en même temps, nous ne voulons pas nous résigner à témoigner de notre impuissance, si impuissants que nous soyons, si écrasés, dépourvus de tout outil de changement. Même notre chère démocratie ne nous garantit rien de plus que ce que nous pouvons et devons recevoir de nos élus. Rien ne peut être fait. Le système est plus fort que nous. Nous n'avons qu'à gérer notre colère, notre faiblesse, notre peur. Et si seulement nous pouvions comprendre ce qui se passe autour de nous ! Mais comment comprendre un monde plein de richesses, plein de châteaux et de Limousines et où l'on nous dit que c'est fini, c'est la fin du travail. Votre travail d'aujourd'hui ne vaudra plus rien bientôt. A partir de maintenant, vous êtes seul, vous êtes abandonnés à votre sort … ! On nous parle sans cesse de plans de restructuration, de plans de sauvegarde de l'emploi et de délocalisations inévitables pour sauver des entreprises nationales et des emplois ; on nous sermonne sur le déficit public, la dette publique, la crise mondiale... On nous bombarde matin et soir de statistiques alarmantes. Allez, vous êtes tout seul ! Inutile de mentionner le consumérisme « effréné » et la solitude inévitable. Comment s'en sortir ?


Eh bien, la colère et l'indignation ne semblent plus avoir de sens. Les actionnaires continueront à se remplir les poches. Les gouvernements continueront à les défendre par peur de les voir fuir ailleurs. Ou du moins c'est ce que ceux qui sont au sommet veulent nous faire croire. Même les grèves et les protestations ne semblent pas pouvoir porter de bons fruits ces derniers temps. Et quand un gouvernement met la main à la poche pour éviter ou limiter les émeutes ou la casse dans la rue, il ne fait – en fait – que creuser le déficit budgétaire et augmenter la dette publique. En d'autres termes, il crée des problèmes pour les générations futures. Et nous avons vu ce que les révolutions ont provoqué tout autour de nous. Que faire, alors ? Endurer sa détresse et sa dépression sans agir ? Continuer à souffrir en silence ? Jusqu’à quand ?

 

Imaginez que des enseignants en université se trouvent obligés de faire grève pour réclamer le paiement de six mois d'arriérés de salaires ! (Cela arrive en Afrique, mais pas impossible ailleurs.) Comment ces gens peuvent-ils vivre ? Il va sans dire qu'on ne peut laisser le peuple mourir. L'Etat se doit d'agir quitte à s'endetter. Ceci ne contredit nullement ce que j'ai dit plus haut. Cela a toujours été le cas depuis l'Antiquité. On a même fait la guerre pour cela. Mais parfois l'Etat ne peut rien. C'est ainsi que, à travers l'Histoire, des tribus et des peuples entiers ont dû quitter leur pays natal pour envahir d'autres contrées. Cela n'est malheureusement plus possible.


Mais – à part le pain et le riz – que cherchons-nous, en réalité ? Eh bien, nous recherchons notre bien-être. Certains prient Bouddha, d'autres prient Ram, d'autres prient Jésus ou Allah, pour obtenir d'eux ce à quoi nous aspirons tous : du travail, un conjoint, une bonne santé, de bons enfants... Mais attendez une minute ! Pourquoi, dirait-on, endurer la douleur de la patience et du sacrifice pour quelque chose dont on n'est pas vraiment sûr ? Les gens se tournent donc vers ceux qui, selon eux, peuvent leur fournir ce qu'ils veulent. D'où l’État-providence. Nous n'avions pas cela dans nos cultures orientales avant l'indépendance. Aujourd'hui, nous assistons à des scènes de misères socio-économiques dans des pays censés être des havres de paix sociale, où les démunis et les nécessiteux ne devraient normalement pas avoir à s'inquiéter de leur avenir, puisqu'il existe un État-providence qui est là pour subvenir à leurs besoins et garantir l'égalité de tous devant la loi. En Afrique, tout le monde n'a pas accès à l'électricité. En Europe occidentale, beaucoup de ménages se saignent pour payer leurs factures d'électricité. Tout cela nous montre qu'il y a une certaine limite à ce que l'homme peut faire pour l'homme. Il pourrait y avoir un besoin d'une force plus forte que l'Homme : pourquoi pas Dieu ? De plus en plus de gens recherchent « la vérité », une solution quelconque, de ce côté-là. Les États aux prises avec le fardeau de la dette et des déficits sont quasi impuissants. Jusqu'à quand les gens peuvent-ils attendre pour voir une amélioration dans leur vie ? Dans ce contexte qui n'inspire guère confiance, certains sont prêts à essayer autre chose. Mais quoi au juste ?



Le jeu du blâme fait partie de la nature humaine. Nous tous blâmons les autres pour nos malheurs. Quand il n'y a personne en particulier à blâmer, nous blâmons la malchance. Mais soyons objectifs un instant ! Le gouvernement le mieux intentionné et le plus compétent ne peut garantir des emplois pour tous. Le patronat le plus compatissant et le plus patriote au monde ne peut garantir une croissance économique durable. Il y aura toujours une minorité de « malchanceux ». Même les personnes très instruites (médecins, ingénieurs, hauts cadres…) dans de nombreux pays du monde peuvent être surprises de ne pas trouver d'emplois convenables. Même les gouvernements des pays développés supplient les autres gouvernements des pays développés de faire mieux pour leur économie nationale. Les Français voudraient que les Allemands fassent plus pour la croissance économique allemande. Les Allemands voudraient que les Français fassent plus pour réduire leur déficit budgétaire. Les États-Unis appelleraient l'Europe à faire plus pour éviter ou sortir de la récession.

Maintenant, supposons que nous ayons du travail, nous avons un salaire. Supposons que nous puissions acheter tout ce que nous voulons. Est-ce pour autant la fin de nos problèmes ? Eh bien, on dirait que le salaire est de l'argent reçu en échange d'un travail. Les bénévoles mis à part, chaque travailleur s'attend à être payé. Comme on le sait tous, certains refusent même de travailler s'ils ne bénéficient pas de congés payés, d'un droit à un congé de maladie et d'une pension. Que demanderait de plus un employé ? Là, ça dépend.


Comme on le sait tous, certains travailleurs négocient leur salaire avec leur employeur. Les personnes hautement qualifiées avec des diplômes universitaires prestigieux obtiennent généralement les meilleurs salaires. Certains changent d'emploi pour un meilleur salaire ou des conditions de travail plus confortables. Les travailleurs moins qualifiés peuvent adhérer à des syndicats pour demander une augmentation de salaire ou d'autres droits. Mais, enfin, est-ce tout ?


Fait intéressant, certaines personnes rétrogradent pour des raisons de paix et de quiétude. Ils abandonnent des postes où ils étaient bien rémunérés et acceptent des emplois destinés à des personnes moins qualifiées. La raison, disent-ils, est le stress. Ils étaient prêts à sacrifier une partie de leurs revenus d'origine pour le bien de leurs nerfs.


Il existe encore une autre catégorie de travailleurs. Ce sont des gens qui ne « travaillent » pas et pourtant reçoivent leur salaire chaque mois. Ils se rendent simplement sur leur lieu de travail, pointent et s'assoient sans rien faire sur des chaises tandis que d'autres travaillent de longues heures afin d'obtenir le même salaire à la fin du mois. Curieusement, ceux qui « travaillent » sont beaucoup plus heureux que ceux qui « ne travaillent pas ». Ces derniers ne sont pas du tout contents parce que leurs collègues les taquinent toujours en disant quelque chose comme : « Vous les gens inutiles, nous travaillons pour vous nourrir. Vous volez notre argent... »


Beaucoup de ceux qui travaillent avant d'être payés ne sont pas contents, non plus. La ou les raisons peuvent être le stress, le harcèlement, l'intimidation ou toute forme d'injustice. Dans certains cas, il se peut que l'employeur soit juste et équitable, mais pas assez empathique, par exemple. Il pourrait ne pas se soucier si vous avez des problèmes personnels ou familiaux. Vos problèmes sont votre propre problème ; ils ne doivent pas affecter votre travail.


D'autres travailleurs « se facilitent la vie » et protestent rarement, voire jamais. Certains encore ne prennent presque jamais de vacances. Certains travaillent dans des mines dangereuses ou dans la sidérurgie, où le feu est quotidien. D'autres encore travaillent dans les champs sous un soleil de plomb. D'autres travaillent loin de chez eux, laissant derrière eux leur conjoint, leurs enfants et leurs proches. Certains sont des migrants, d'autres sont dans l'armée ou des marins en haute mer. Ils font tout cela aussi gentiment que possible parce qu'ils ne peuvent pas être payés s'ils ne le font pas.


Le travail acharné vaut bien mieux que le chômage. Un travailleur peut se payer des choses qu'un chômeur ne peut pas. Cela fait une grande différence lorsque vous ne pouvez pas emprunter de l'argent pour répondre à un besoin urgent parce que vous ne pouvez pas en garantir le remboursement, alors qu'un travailleur avec un revenu stable peut le faire. Pire, c'est absolument affreux de se voir au chômage à quarante ans ou plus, alors que des amis et connaissances plus jeunes sont déjà aisés.


Mais une fois que vous obtenez un emploi, vous devenez comme les autres travailleurs. Vous aussi commencez à souffrir de problèmes nouveaux/anciens. Vous commencez à penser aux vacances, entre autres.

Les vacances sont l'occasion pour beaucoup de se reposer et de s'amuser. En France, par exemple, dès que les gens reviennent de vacances annuelles, ils commencent à préparer les suivantes, lesquelles évidemment n'arriveront pas avant onze longs mois. Une des raisons pourrait être que les Français aiment se vanter de leurs vacances. Une autre raison pourrait être qu'ils en ont tout simplement marre de travailler entre quatre murs. Mais cela n’est certainement pas propre aux Français.


Ce que j'ai toujours trouvé un peu étrange, c'est que la plupart de ceux qui remplissent les autocars de touristes dans mon pays est des personnes âgées. Loin de moi l'idée de suggérer que les personnes âgées devraient rester à la maison et aider leurs petits-enfants à faire leurs devoirs. Mais ceci, cependant, m'amène à me demander si un grand nombre de personnes n'attendent pas vraiment avec impatience le troisième âge et la retraite. Ne serait-ce pas, pour eux, l'occasion de rattraper le « temps perdu » passé « entre quatre murs » ?


Maintenant, pourquoi devrait-on attendre si longtemps ? Après tout, le travail n'est pas une malédiction. En fait, le travail est souvent quelque chose de merveilleux. Pourtant, le salaire qu'un employeur verse à un employé n'est qu'une « compensation nominale » – disons morale – pour l'effort fourni au travail. Ce salaire ne peut tout simplement pas compenser tous les efforts qu'un travailleur investit dans son travail. Chaque effort physique, mental ou psychologique que vous faites pour accomplir la tâche que votre employeur attend de vous aura inéluctablement une incidence (négative) sur votre corps ou santé mentale à un moment donné dans votre vie. L'argent ou les avantages que vous pourriez obtenir en échange de votre travail ne remplaceront aucune partie de votre corps une fois endommagée. L'argent ne peut pas remplacer un nerf perdu ou un poumon atteint de lésion.

Le tabagisme, l'obésité et l'hypertension artérielle sont des problèmes liés au travail. Si vous ajoutez à cela le harcèlement ou l'intimidation, par exemple, à quoi ressemblerait votre vie ? Comment vous comporteriez-vous envers votre famille ? Seriez-vous bien mentalement si vous criiez après votre conjoint aimant à la maison alors que vous souriez à votre patron qui vous intimide au travail ? Comment supporteriez-vous le stress des formalités et de l'étiquette si votre enfant souffre à l'hôpital ?


Les choses empirent lorsque votre emploi n'est pas stable. Tant que votre travail est précaire, l'anxiété ne vous lâchera guère. Si vous ne pouvez pas assurer votre retraite plus tard, vous faites quoi alors ?


Vos enfants aussi souffriront si vous perdez votre emploi. Ils éviteront leurs amis proches car ils ne peuvent tout simplement pas se payer les mêmes petites choses, un bonbon plus. Ils pourraient même être « virés » d'une école privée, par exemple, avec tout ce qui s'ensuit. Que faites-vous, alors ? Attendrez-vous les prochaines élections pour voter pour le parti qui promet plus d'emplois ?


Même si vous trouvez un emploi après des années d'attente, cela n'atténuera pas les effets de votre chômage. La peur de perdre votre nouvel emploi restera avec vous. Cette peur affectera votre santé tôt ou tard.


Presque tous les travailleurs perdent quelque chose en faisant leur travail. Le paysan qui travaille aux champs sous un soleil de plomb devra un jour faire face à sa tête qui lui fait mal. La peur constante d'une mauvaise campagne agricole s'ajoutera à ses problèmes. Idem pour tant d'autres travailleurs.


Alors, si tel est le travail, comment pourrait-il être « quelque chose de merveilleux », me direz-vous ?


On pourrait imaginer que certains « travailleurs » n'ont rien à craindre, n'ont pas de soucis à se faire. On pourrait imaginer que, disons, un artiste, par exemple, est quelqu'un qui est libre, qui peut travailler à guise et avoir une vie professionnelle réussie et agréable. Mais les artistes aussi souffrent. Un artiste peut avoir à pleurer des jours et des nuits, peut-être des années, avant de vous faire sourire quelques secondes. Un artiste aussi pourrait souffrir de stress et d'anxiété. Un artiste aussi a besoin d'argent et de stabilité. Lui aussi a ses propres relations sociales. Lui aussi craint la pauvreté, s'il n'est pas déjà pauvre. Je ne vous apprends rien là. Pourtant, beaucoup d’artistes s’estiment heureux et épanouis.


Même ces stars là-haut ont leurs propres « problèmes de travail ». Ce n'est pas facile de devenir une star. Le glamour, la célébrité et de l'opulence pourraient ne pas durer toute une vie. Et, pour les artistes, c'est douloureux. Dès qu'une star devient un has-been, ses problèmes commencent à s'accumuler. Mais c’est ce qui nous arrive à nous tous. Dès qu’on atteint un certain âge on commence à avoir des soucis de santé, entre autres.


Il n'est pas rare de voir un écrivain avec un sourire heureux sur son visage après avoir terminé un long roman. Il n'est pas rare de voir une femme sourire béatement après avoir accouché. Il n'est pas rare de voir un étudiant au sommet du monde après avoir obtenu un diplôme. Mais il demeure néanmoins que ce roman doit être soumis à un éditeur, que ce bébé doit être élevé et que ce diplôme doit être accepté par un employeur. Ainsi va la vie. C’est ça ce qui fait le charme de la vie.



Les scientifiques disent que si votre tête se refroidit après un coup de chaleur, cela ne signifie pas que vous échapperez aux effets à long terme de ce coup de chaleur. La douleur disparaîtra, mais les effets de cela et de tout coup de chaleur ultérieur s'accumuleront jusqu'à ce que – Dieu nous en préserve – ils se transformeraient en quelque chose de pire à l'avenir. Par analogie, tous les problèmes liés au travail ne feront que s'accumuler avec le temps. Alors que faire ? Ne pas travailler ?

 

C’est pourquoi il est salutaire de prendre le temps de l’introspection, de réfléchir afin d’essayer de comprendre la vie et le monde qui nous entoure.

 

 

5

Education 

 

 Pouvez-vous imaginer un monde sans problèmes ? Pouvez-vous imaginer un monde sans pauvreté ? Pouvez-vous imaginer un monde sans larmes ? Pouvez-vous imaginer un monde sans désordre ? Alors ce ne serait pas le monde que nous connaissons sur la planète que nous connaissons.


Les problèmes, la pauvreté, les larmes et le désordre sont autant de causes de malheur pour certains, de bonheur pour d'autres. Aucun système politique ou économique n'a jamais pu éradiquer la pauvreté ou le désordre. Les historiens racontent qu'à l'époque du calife Omar Ibn Abdul'aziz (682 - 720), il n'y avait absolument aucun pauvre. Tous les hommes se sont mariés avec leur propre argent ou avec de l'argent d'État. Les fonds de l'État étaient tels que le calife dit un jour à son vizir : « S'il n'y a plus de pauvres, si tous les hommes sont mariés, et qu'il reste encore de l'argent dans nos coffres, alors achetez d'énormes quantités de céréales et nourrissez tous les oiseaux du pays. ! » Et pourtant, seuls quelques califes omeyyades ont succédé à Omar Ibn Abdul'aziz. Son califat ne dura pas longtemps après lui. La question est, pourquoi tous les dirigeants n'étaient-ils pas aussi bons qu'Omar ibn Abdul'aziz ? Pourquoi tous les dirigeants n'étaient-ils pas aussi justes qu'Omar Ibn Al-Khattab (584 - 644) ? Pourquoi tous les dirigeants n'étaient-ils pas aussi passionnés de science que le calife abbasside Al-Ma'moun (786-833) ? Les raisons de tout cela sont-elles intrinsèques ou extrinsèques ? Ces bons dirigeants ont-ils fait ce qu'ils ont fait juste pour rester au pouvoir ou parce que chacun d'eux était ce qu'il était par nature ? En d'autres termes, est-ce une question d'éducation ?

Prenez, par exemple, une petite ville où des chiens errants (sans propriétaire) errent librement, où les gens jettent des ordures un peu partout, où les gens conduisent ou roulent comme ils veulent. C'est du désordre, vous en conviendrez. Alors, par où commencer pour mettre fin au désordre ? Certainement pas en chassant simplement les animaux indésirables de nos villes ou en infligeant des amendes aux personnes qui polluent les rues ou ne respectent pas le code de la route.


Autrefois, l'éducation commençait au sein de la famille. Et jusqu'à récemment, l'éducation commençait à la télévision. Il y a un siècle, les enfants regardaient et écoutaient leurs parents pendant qu'ils parlaient. Il y a de cela quelques décennies, tout le monde regardait l'écran de télévision et se taisait si un bel acteur parlait ou une ravissante chanteuse chantait. Jusque-là, le Coran était la télévision. La Bible était la télévision. La vérité était la télévision. Le bonheur était la télévision. Et si vous ne ressembliez pas aux gens que vous aimiez à la télévision, alors vous n'apparteniez pas au monde d'aujourd'hui.

Même maintenant, alors que le Smartphone et l'iPad sont devenus si essentiels et si écrasants, alors que les réseaux sociaux ont fait des addictes de tout âge et partout, la télévision est toujours reine dans de nombreux foyers à travers le monde. Que voit-on à la télévision ? Eh bien, j'ai vu, entre autres, des émissions de télévision où une fille pouvait gagner en seulement une demi-heure, en nommant le maximum de chansons et de chanteurs, plus qu'un ingénieur distingué ne puisse gagner en soixante jours ou plus. J'ai vu des trucs qui donneraient l'impression qu'il serait bien mieux pour un écolier d'être un coureur de fond ou un joueur de tennis qu'un médecin dans sa propre clinique privée dans la plus grande ville du pays. J'ai vu des cuisinières illettrées et des chanteuses adolescentes amatrices devenir des vedettes de la télévision alors que les meilleurs esprits du pays ne sont rappelés à notre mémoire que lorsque leur mort est annoncée à la presse.


En regardant la télévision tous les jours, on pourrait avoir l’impression que les gens « qui ont réussi » sont déjà là – remplissant l’écran de télévision de leur sourire glamour & béat, et qu’l ne reste plus rien à rêver pour un téléspectateur pauvre. Cela arrivait avant même l’ère des influenceurs et influenceuses !


Est-ce la faute de la télévision, cependant ? La télévision est-elle la seule coupable ? Personnellement, j'ai beaucoup appris de la télévision comme j'ai beaucoup appris de l’internet. Alors est-ce un problème de télévision ou un problème de téléspectateurs ? En d'autres termes, un téléspectateur doit-il avoir une sorte d'immunité lorsqu'il regarde la télévision ? Comment peut-il avoir ce genre d'immunité ?


Autrefois, il n'y avait pas de télévision. Mais il y avait des écoles. Les gens allaient à l'école pour apprendre, mais aussi pour rêver. Lorsque vous êtes seul à lire un livre d'histoire ou un livre de poésie ou un roman, ou n'importe quel type de livre, vous pourriez penser à quelque chose pendant que vous lisez. Mais cela peut être vrai pour de nombreux téléspectateurs aussi ! Beaucoup de gens sont devenus des stars de cinéma ou même d'éminents scientifiques parce qu'ils ont vu des choses à la télévision. Même à l'école, tout le monde ne peut pas espérer trouver l'occasion de rêver à loisir.

Oui, à l'école, un élève peut en apprendre beaucoup sur le monde, sur la vie, sur les problèmes et sur les moyens de résoudre ses problèmes de manière créative sans compter sur l'État pour tout faire pour lui. Mais cela n’est pas donné à tout le monde. La vie peut parfois être, et le sera de plus en plus, complexe et compliquée même pour les personnes qui, enfants, étudiaient 40 heures de maths par semaine ou apprenaient la programmation informatique à l'âge de 6 ans. Vous ne pouvez pas résoudre tous vos problèmes en piratant les ordinateurs des gens ou en faisant du calcul mental. Connaître le monde est donc une bonne chose, surtout à notre époque où l'individu prime sur le groupe.

 

Et si vous alliez à l'école et que vous obteniez un diplôme, puis un bon travail et que vous voyiez beaucoup de télévision, seriez-vous heureux ? Ce n'est, en tout cas, pas l'impression que j'ai lorsque j'écoute la radio, par exemple, ou que je vois des choses sur le Web. Dans mon pays, au moins, j'entends beaucoup de gens se plaindre de la société, des voisins, des parents, etc. Exemples simples : de nombreuses personnes mariées ne savent tout simplement pas comment résoudre leurs problèmes avec leur partenaire ou avec leurs enfants ou avec leurs collègues de travail ou leurs employeurs. Beaucoup de gens ne peuvent tout simplement pas supporter leurs problèmes de santé. Beaucoup de gens ont des problèmes psychologiques auxquels ils ne peuvent pas faire face. Croyez-le ou non, j'ai entendu un invité fréquent d'une très respectable émission-débat radio dire qu'il connaissait un certain nombre de psychiatres et de psychologues qui consultaient eux-mêmes des psychologues ! De nombreux pays riches dont les citoyens sont généralement considérés comme heureux ont également de nombreux problèmes, dont l'obésité n'est pas le moindre. Nous sommes tous dans le même bateau !


Les problèmes sont partout. Ce n'est pas ça le problème, comme je l'ai dit au début de ce chapitre. Cela fait partie de la vie. Le problème est de savoir comment gérer nos problèmes. Certains vont à l'extrême : certains se suicident, d'autres changent de religion ou de mode de vie. De nombreux Occidentaux sont devenus musulmans et de nombreux musulmans se sont occidentalisés. S’agit-il d’un simple exutoire, pour dépasser des moments difficiles, ou fuir une quelconque réalité, ou d’une véritable solution ?

 

6

Préjugés

 

Quelqu'un m'a raconté cette histoire : « J'ai rencontré un couple européen, qui m'a dit : 'Quand nous avons voulu venir au Maroc en tant que touristes, nous avons donné nos maillots de bain et nos caleçons à nos amis en Espagne, parce que nous pensions que nous n'en aurions pas besoin une fois entrés au Maroc, qui est un pays musulman. Mais à notre arrivée, nous avons été stupéfaits de voir des Marocains en maillot de bain sur la plage de Tanger !’ »


Toujours à Tanger, quand j'étais étudiant là-bas, je suis entré une fois dans la bibliothèque de mon école et j'ai trouvé une femme américaine blanche d'une trentaine d'années vêtue d'une djellaba marocaine et d'un foulard. Assise à une table, elle lisait le Coran. Autour d'elle, il y avait des étudiantes marocaines en T-shirts et jeans serrés.


« Et alors ? » dirait quelqu’un. « Où est le problème ? »


Le problème est que, parfois, on juge avant de savoir. Entre les préjugés et la réalité il n’y a qu’un pas à franchir. C’est de savoir. Alors, que sait-on de notre région ? Dans mon pays, le Maroc, il existe au moins un magazine entièrement publié en arabe marocain. Et vous avez l'arabe libyen, l'arabe égyptien, l'arabe syrien, l'arabe irakien, l'arabe yéménite, et chacun a son propre arabe. Il ne faut surtout pas s'en étonner, du fait que beaucoup d'entre nous ne sont jamais allés à l'école, et ce n'est qu'à l'école que l'on peut apprendre l'arabe que nos ancêtres ont appris à la maison comme langue maternelle et dans lequel le Coran a été révélé. Maintenant cet arabe-là n'est plus la langue maternelle de personne. De plus, il n’y a pas que les Arabes dans le monde arabe. Chacun a donc sa langue bien-aimée. C'est pourquoi la plupart d'entre nous ne connaissent tout simplement pas le Coran. Et la plupart d'entre nous qui lisons le Coran ne le comprennent pas aussi facilement que nos ancêtres. Le Coran a donc eu un impact limité sur nos vies depuis longtemps maintenant. Même de nos jours, pour beaucoup d’entre nous, nous n'en connaissons qu'une partie à travers nos coutumes et traditions séculaires.

Ce lien ténu avec le Coran qui a toujours posé problème est loin d'être terminé. Une autre chose est la lutte pour le pouvoir. Les guerres de succession ont fait des ravages impardonnables tout au long de notre histoire. Et c'est toujours la même vieille soif de pouvoir, le même vieil amour du trône, la même vieille faim de gloire mondaine. C’est donc tout à fait naturel si chaque pays arabe a désormais son propre dialecte arabe, son propre « calife », sa propre armée, ses propres frontières. Inutile de dire que c'est bon ou mauvais. Il suffit de dire que c'est le monde où nous vivons aujourd’hui.


Pour moult raisons, ce même monde arabe, dans lequel je vis, a longtemps été très important pour de nombreuses personnes dans d'autres parties du globe. Dès le XIXème siècle, plusieurs auteurs russes de renom, par exemple, écrivaient de belles choses sur les Arabes et l’Islam. Curieusement, les Occidentaux, eux aussi, ont commencé à embrasser l'Islam par milliers après le 11 septembre. L’Amérique, a soudainement découvert qu'elle avait des imams à part entière qui parlaient l'arabe mieux que beaucoup d'Arabes, et qui connaissaient le Coran et les Hadiths par cœur - ce qui n’est pas donné à tous les Arabes et musulmans -, et qui étaient dûment autorisés à émettre des fatwas. Certains imams américains sont devenus alors des stars et ont été invités à s'exprimer sur les télévisions américaines. Il a ensuite été découvert que les musulmans américains ont montré à leurs frères et sœurs musulmans comment créer des sites Web islamiques et comment gérer des chaînes de télévision islamiques par satellite. Comme quoi il faut savoir avant de juger.


Quand, en 1995, les Qataris ont lancé Aljazira, de nombreux régimes arabes ont eu peur pour leur public local, craignant qu'il ne boude leurs stations de radio et de télévision bourrées de propagande. Après Aljazira est venue une myriade d'autres chaînes de télévision par satellite en langue arabe, principalement financées par des publicités télévisées. Cela a inspiré les gens dans de nombreux États arabes à lancer, sinon des stations de télévision « libres et indépendantes », du moins des stations de radio. (Cela n’est pourtant pas une critique. Vous savez mieux que moi que même dans les meilleures démocraties au monde il y a de moins en moins de liberté de la presse.) Et c’est ainsi que, au Maroc, par exemple, on a pas moins de 13 radios indépendantes, toutes financées essentiellement par la publicité. Au moins la moitié de ces stations de radio ont des émissions religieuses. Certaines de ces émissions se sont avérées si populaires, si réussies, que certains des prédicateurs et érudits religieux les plus connus du pays ont été embauchés pour augmenter l'audience, pour rapporter plus d'argent aux radios – quoique cet argent n’est jamais suffisant. Dans certaines de ces émissions, vous entendriez un professeur d'université islamiste discuter pacifiquement avec un militant communiste ; vous entendriez les gens parler de leurs problèmes, de leurs souffrances, de leurs critiques du gouvernement sans être inquiétés. De même, d'autres personnes sont devenues de plus en plus convaincues que les banques islamiques (également appelées banques participatives) auraient un énorme succès. Résultat : nous en avons plusieurs en ce moment. Je ne dis pas que c'est bon ou mauvais. Je dis juste que c'est le monde où je vis.


Pendant plusieurs décennies, notre pays a été occupé par la France. Il était donc tout à fait normal que la langue française ait été pour certains un moyen de mobilité sociale et pour d'autres un moyen de distinction sociale. Bien parler français en public a longtemps été synonyme d'appartenance à une certaine élite, à une certaine classe. La massification scolaire, la télévision, l'enrichissement progressif de certaines couches de la société par le biais du commerce ou de la fonction publique ou par l'expatriation (en France notamment) – tout cela a permis une bonne maîtrise du français par un plus grand nombre de personnes – jusqu'à ce que l'école publique, de plus en plus arabisée, soit devenue, au contraire, un frein empêchant des milliers et des milliers de personnes d'accéder à ce statut d'élite à la française.

Avant même l'Indépendance (en 1956), l'élite « conventionnelle », hautement qualifiée, était déjà influencée par la culture occidentale. Jean-Jacques Rousseau, Karl Marx, Hegel, Weber, Montesquieu, la littérature grecque, Freud… étaient des lectures courantes pour ces personnes, qui seraient naturellement tentées de se moquer de ceux qui lisaient encore des « livres jaunes », en langue arabe, imprimés localement ou importés du Machrek (le Moyen-Orient). Cette élite, souvent politisée, a naturellement su prendre des postes à responsabilité, ouvrant la voie à un certain héritage à perpétuer de père en fils. Et lorsque de nouvelles perspectives, encore plus prometteuses, s'ouvrirent devant la progéniture de cette élite, gâtée par l'opportunité historique de l'époque, l'évolution des événements obligea, après l'Indépendance, l'Etat à marocaniser l'administration. Cette marocanisation progressive signifiait que la langue arabe devait aller en parallèle ou au détriment de la langue française. Le facteur démographique a entraîné, entre autres, la prolifération des facultés et des universités, où, grâce à la traduction en arabe, des cours complets ont commencé à être dispensés en arabe. Et ainsi de plus en plus d'enseignants n'avaient plus besoin de maîtriser le français, ni même l'arabe littéraire. Un professeur d'histoire-géographie en arabe percevait le même salaire et les mêmes avantages sociaux qu'un professeur de physique-chimie en français. Tous deux pouvaient vivre décemment, construire une maison ou même une villa, avoir une belle voiture... L'un et l'autre pouvait s'exprimer comme bon lui semblait, ou lire ce qu'il voulait, ou adhérer au parti politique de son choix, etc.

Justement, on a toujours associé les élites d’ici et d’ailleurs à la politique. Et comme ce qui se passe ailleurs, ici aussi l’argent a son mot à dire dans la politique. On a beaucoup d’entrepreneurs polyglottes, très cultivés du coup, qui contribuent grandement aussi bien à l’économie qu’à la gestion du pays. Tout le monde a sa place.


Bien sûr que, ici comme ailleurs, il y a des problèmes tous les jours. Mais ce qui est beau c’est qu’il y a pourtant des solutions tous les jours. Presque toujours, les journaux télévisés commencent par le rouge du sang et s’achèvent avec le rouge des roses.

 

7

Solidarité

 

Que ressent-on (ou devrait-on ressentir) lorsqu'on regarde à la télévision des images horribles d'un tremblement de terre ou de survivants d'un volcan pleurant la mort de leurs proches ou encore des squelettes vivantes d'individus victimes de famine ou de faim aiguë ? Beaucoup d'entre nous regardent de telles scènes en mangeant ou en discutant avec leur famille ou leurs amis. Les philosophes parmi nous se demandent pourquoi ces choses arrivent en premier lieu. Un religieux dirait probablement que c'est une punition divine.


En fait, beaucoup de gens s'attardent sur ces événements malheureux. et commencent à méditer sur la vie. Une telle méditation pourrait amener à la dévotion tout comme elle pourrait conduire à l'incrédulité. Mais quelles leçons pourrait-on (ou devrait-on) tirer de telles calamités dans lesquelles des milliers de personnes perdent la vie et des milliers d'autres se retrouvent mutilées, orphelines, veuves ou sans abri ; où des villes et des villages entiers sont rasés ; où des paysages paradisiaques se transforment en lieux sinistrés ? Eh bien, cela a toujours été horrible. Des gens sains et saufs, bien calés dans leurs fauteuils, pourraient moraliser autant et aussi longtemps qu'ils le souhaiteraient – mais diraient-ils la même chose (avec les mêmes mots, sur les mêmes tons, avec la même force de conviction) s'ils étaient au milieu du désastre ?


Je me souviens avoir vu un programme mettant en vedette les forêts tropicales australiennes. Les caméras de télévision se déplaçaient avec grâce parmi des arbres à couper le souffle, de belles fleurs indigènes, des oiseaux et des animaux exotiques. Je pensai qu'il ne pouvait y avoir d'endroit plus tentant pour des vacances. Mais soudain, un incendie infernal s'est déclaré et a détruit tous les arbres, les fleurs, les oiseaux et les animaux. J'ai soupiré pendant que la voix commentant la scène m'expliquait que, en fait, de tels incendies étaient en quelque sorte monnaie courante dans ces forêts, et que c'était un phénomène très naturel. C'était bon que le programme ait donné cet avertissement aux touristes amoureux de la nature et cette leçon à ceux qui succombent facilement à la beauté. Malheureusement, les phénomènes naturels ne peuvent pas tous être prédits. Tant de touristes (de partout dans le monde) ont trouvé la mort dans le tsunami de décembre 2004. Personne – et encore moins la population locale – n'aurait pu prédire une telle catastrophe. Les gens se sont – alors et comme toujours – posé beaucoup de questions (existentielles). Certains ont opéré une sorte de changement, d'autres ont continué à vivre leur vie comme si de rien n'était. Personnellement, je me pose aussi des questions. J'ai lu sur le Web une question que je m'étais posée avant même qu'Internet n'entre dans notre pays. La Première et la Seconde Guerre mondiale étaient-elles une punition divine ? C'était la question. Je me demandais pourquoi une telle chose puisse arriver à des gens qui étaient à l'origine de tous les incroyables développements technologiques dont nous bénéficions dans notre vie de tous les jours. Ces gens ont fait de grandes inventions, travaillé dans des mines de charbon, lutté pour les droits de l'homme, etc. Alors pourquoi ont-ils été récompensés par deux guerres sanglantes ? Ce qui est curieux, c'est qu'au cours de ces deux guerres (et de la guerre froide qui a suivi), un développement technologique phénoménal a eu lieu - comme si nos avions (civils) d'aujourd'hui n'auraient pu voler aussi loin et aussi vite qu'ils le font aujourd'hui, comme si nos téléphones portables, nos connexions Internet, nos télévisions, etc., auraient pu rester des sujets de livres de science-fiction, s'il n'y avait eu deux guerres (mondiales) dévastatrices. L'ONU –q uoi qu’on en dise – n'est née qu'après ces guerres-là. La démocratie ne s'est généralisée qu'après ces guerres, lesquelles ont coûté la vie aux enfants et petits-enfants de grands inventeurs, ingénieurs, enseignants et travailleurs patients qui ont enduré la vie dans les mines de charbon. Serait-il superstitieux de lier cela à la soi-disant séparation de la religion et de l'État (comme ce fut le cas en France en 1905) ? Ou cela s'expliquerait-il par « l'immoralité croissante » des gens ? (Certains diront, cependant, que la « vraie immoralité » est devenue encore pire en 1968, plus de deux décennies après la guerre !) D'autres diront que la ou lesdites guerres furent plutôt le résultat de la lutte des grandes puissances pour la suprématie et leur rivalité sur les territoires d'outre-mer. Quelles que soient les raisons de telle ou telle calamité, il n'est jamais mauvais de se poser des questions à ce sujet.


Très souvent – mais pas toujours – ce sont des personnes qui ont frôlé la mort dans de telles catastrophes qui NE posent PAS les questions les plus difficiles, genre : « Pourquoi devrait-il y avoir une telle chose en premier lieu ? » J'ai été touché par l'histoire d'une jeune femme allemande et de sa mère qui se trouvaient au Sri Lanka pendant le tsunami de 2004. Dans une émission diffusée sur une chaîne arabe, la jeune femme a expliqué comment un jeune homme sri lankais l'avait sauvée, au péril de sa vie. Le jeune homme lui-même a parlé tandis que les deux femmes – qui étaient revenues au Sri Lanka pour le rencontrer et se souvenir de l'incident – écoutaient, en pensant et penchant la tête. Cette amitié inattendue est un exemple des choses paradoxalement merveilleuses qui se produisent pendant et après les catastrophes. Mais la question demeure, cependant : pourquoi devrait-il y avoir une telle chose en premier lieu ?


En d'autres termes, pourrait-il y avoir un bon côté au désastre ? Les tremblements de terre, les ouragans, les cyclones, les volcans, les incendies de forêt, les inondations, etc. sont-ils seulement des accidents naturels qui surviennent au hasard et gâchent la vie des gens ? Même si les scientifiques, qui n'ont commencé à développer des théories sérieuses à ce sujet que dans les années 1960, prouvaient par des preuves empiriques que les phénomènes susmentionnés ci-dessus sont essentiels à l'équilibre global de la planète Terre, certains se demanderaient encore : « Pourquoi la terre aurait-elle besoin de telles catastrophes simplement pour assurer son équilibre ? » Ceux qui voudraient « régler leurs comptes » avec Dieu se demanderaient quand même : « Si Dieu est parfait, alors pourquoi a-t-il créé une terre si imparfaite ? Pourquoi une population dans une partie du globe devrait-elle être impitoyablement sacrifiée pour sauver des populations ailleurs ? »


Je ne prétends pas avoir des réponses à ces questions. Mais voyons les choses telles qu'elles sont.


La terre n'est peut-être pas parfaite, mais que dirait-on de ces touristes qui attendent une année entière et dépensent beaucoup d'argent pour se rendre à un endroit donné ? Pourquoi choisissent-ils d'aller à tel endroit plutôt qu'à un autre ? Les touristes vont-ils dans des endroits paradisiaques ou dans des coins infernaux du globe ?


D'ailleurs, les scientifiques disent, par exemple, que « la plupart des tremblements de terre causent peu ou pas de dégâts ». Ils disent également que « la plupart des activités volcaniques sont sous-marines, formant de nouveaux fonds marins » – loin de nos villes et villages.


Ainsi, « l'imperfection », s'il y en a, est plutôt due à l'homme. Les scientifiques disent que la pollution causée par l'homme est en grande partie responsable du réchauffement climatique, qui, à son tour, est responsable d'au moins certaines des catastrophes telles que Katrina (2005) et les incendies de plus en plus fréquents en Amérique du Nord et les inondations en Europe occidentale, au centre de la Chine et ailleurs. Sinon, pourquoi y aurait-il l'Accord de Paris et toutes les conventions sur le climat ?


Les pauvres supplient maintenant les riches d'arrêter de polluer la terre (provoquant ainsi la sécheresse, les inondations, les cyclones, El Niño et d'autres catastrophes), tandis que les riches supplient les pauvres d'accepter de l'argent en échange du droit de polluer dans leur propre pays. Quelle logique !


Donc, que la terre ne soit pas parfaite ou que ce soit l'homme qui l'a rendue si imparfaite, il n'est jamais trop tard pour que l'homme essaie de la rendre parfaite - ou aussi parfaite que possible. Tous les rapports scientifiques alarmants qui sortent de temps en temps ne visent réellement qu’à pousser les politiques à agir.


En temps normal, on trouverait des endroits paradisiaques de part le monde. Sinon, pourquoi devrait-il y avoir du tourisme et des touristes ? Si de nomb²reux touristes étrangers se sont trouvés en Asie du Sud-Est lors du Tsunami de 2004, c'est justement parce qu'ils avaient été attirés par la beauté de cette région.

Même après qu'un endroit soit totalement détruit lors d'une catastrophe, l'homme est toujours là pour faire quelque chose. Cela amène à parler de solidarité. Plus récemment, des incendies de forêt ont ravagé la région italienne de la Sardaigne. Qui va donc aider cette île dévastée à se relever sinon les contribuables italiens ?


Lorsque nous parlons de solidarité, nous entendons aussi par là la charité, la compassion, l'altruisme, le bénévolat pour aider par amour. Quand vous voyez des gens de tous horizons se précipiter pour s'entraider ; quand vous voyez des milliers d'étudiants donner du sang et courir vers les zones les plus touchées pour sauver des vies, c'est de la pure solidarité. Et c'est beau. Qui oubliera l'aide que la communauté internationale a apportée (ou du moins s'est engagée à apporter) aux victimes du tsunami ou aux réfugiés syriens ou les efforts actuels pour aider les États pauvres avec la vaccination anti-Covid ?


Bien sûr qu’il y a homme et homme. Alors que les belligérants de tout bord et de tout genre se jurent et se battent, la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge unissent leurs forces pour sauver des personnes de confessions et d'origines différentes. L'essentiel est d'éteindre le feu, peu importe qui l'a allumé.


Quand vous apprenez que 200 sauveteurs ont perdu la vie alors qu'ils tentaient de secourir leurs concitoyens en Chine (en mai 2008), et que de nombreux enseignants ont péri dans la catastrophe après avoir sauvé leurs élèves, alors vous ne pouvez qu'être fier d'être un humain. Nous, les humains, sommes capables de rendre le monde meilleur – en nous servant les uns les autres.


Comparez cette solidarité manifestée par des personnes de l'intérieur et de l'extérieur des lieux touchés par les catastrophes aux pillages qui ont parfois lieu dans ces zones-là. Comparez cette solidarité aux rivalités qui ont conduit à la Première et à la Seconde Guerre mondiale. Comparez l'effusion de sang de ces guerres à l'esprit qui a conduit à l'Union européenne, par exemple. Décidément, l'homme est capable du meilleur et du pire.


Et qu'y a-t-il de plus beau que de reconstruire des vies brisées ? La destruction est sans aucun doute horrible. Les retombées peuvent durer des années et coûter de l'or et des vies humaines. Mais cela fait partie de la vie. Ce que nous avons tendance à oublier, c'est que la plupart des destructions sont causées par l'homme. Les catastrophes naturelles n'ont pas contribué à l'incroyable destruction qui s'est produite au cœur de l'Europe dans la première moitié du XXe siècle. Les catastrophes naturelles n'ont rien à voir avec les destructions qui ont eu lieu en Irak, en Syrie et au Yémen, par exemple, ou avec la famine ça et là.


Les esprits pratiques se mettent immédiatement au travail pour réparer les dégats, laissant à Dieu ce qui est à Dieu et à César ce qui est à César. Des fois, les destructeurs eux-mêmes se précipitent vers la reconstruction. Les États-Unis, qui ont aidé à faire tomber le Reich d'Hitler et l'empire du Japon, ont mis en place le plan Marshall pour reconstruire l'Europe et le Japon d'après-guerre. Une génération prospère de baby-boomers a profité des fruits de cette reconstruction, tournant ainsi la page des horreurs de la guerre dont leurs pères avaient été témoins. « Le malheur des uns fait le bonheur des autres », dit le proverbe.

Après chaque catastrophe, de nombreuses personnes trouvent beaucoup de travail, un revenu stable pendant des années. Beaucoup d'entreprises prospèrent pendant cette période et beaucoup d'échanges ont lieu. Non seulement ces écoles démolies, mais toute l'infrastructure (souvent ancienne et vétuste) devient bien meilleure qu'avant le tremblement de terre. Cela donne l'opportunité aux ingénieurs et techniciens nouvellement diplômés de prouver leur valeur et de construire leur vie et au PME et TPE de grandir.


Maintenant, qu'en est-il du châtiment divin ? Eh bien, la punition divine signifie différentes choses pour différents croyants. Les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans, par exemple, connaissent l'histoire de Noé, selon laquelle, le monde d'alors a été détruit par le Déluge. Mais alors la vie a continué avec juste un petit nombre de personnes et un nombre limité d'espèces. Le Dieu qui a rendu la vie possible après le déluge est naturellement capable de sauver la planète terre des pires conséquences du changement climatique, s'il le veut. Qu'il le veuille ou non, cela dépend probablement du comportement de l'humanité. D'où la crainte du châtiment divin pour certains. Le coran, par exemple, est plein d’avertissement dans ce sens.


Punition divine ou non, un nombre croissant de jeunes souffrent sous diverses formes et à divers degrés d'anxiété climatique (Climate Anxiety). Ils sont profondément préoccupés non seulement par l'avenir de la planète Terre, mais plus particulièrement par leur environnement immédiat. Certains croient simplement que notre planète est condamnée, qu’elle est « au bord du gouffre ». Le fait est que les conditions météorologiques extrêmes sont indéniables. Nous avons tous entendu ou lu des rapports alarmants d'experts qui prédisent le pire pour certaines parties du globe.

Mais allez dire cela à ces gens qui vont chercher fortune là où l'environnement est le plus hostile, là où prospèrent le commerce illégal d'espèces sauvages, l'exploitation forestière, l'exploitation minière, la pêche illégale … là où il n'y a ni 'écoles, ni hôpitaux, ni même de routes goudronnées…, là où le sourire ne veut rien dire.

Les détails ne manquent pas. Qui n’est pas au courant des côtes immergées avec toutes les conséquences que cela implique, de la montée des eaux, des véritables bombes à retardement que représentent les décharges sauvages dans de nombreuses villes de part le monde ? Bien sûr qu’il y a de quoi s’alarmer. Que dire encore des gens qui suffoquent sous la canicule en plein printemps, des gens qui voient leurs bêtes mourir de soif devant leurs yeux, des chèvres qui mangent leurs excréments, des chameaux qui mangent d’autres chameaux, des bords de mer qui disparaissent tous les jours un peu plus sous l’eau, des nappes phréatiques non renouvelables, des puits à sec ou presque… ? Ce n’est pas évident d’être mentalement costaud devant de tels malheurs. Mais parfois il suffit d’une pluie, d’un beau temps, d’une bonne récolte… pour se remonter le moral et se sentir bien. Sauf que, quand on a tout, on pourrait s’imaginer touché par la grâce divine Décidemment, cela se passe bel et bien dans la tête et non seulement dans la nature.


Et il n’y a pas que les conséquences du dérèglement climatique. Au jour d’aujourd’hui, des gens vivent dans la terreur à cause des gangs ou de l’insécurité alimentaire. Des gens mangent un jour sur deux. Certaines grandes villes dans des pays sûrs importent plus de 90 % de leurs besoins de nourriture. Dans d’autres villes 80 % de la population vit uniquement du tourisme. Que se passerait-il quand les touristes ne viennent pas ? Et pour ceux qui dépendent de l’agriculture pluviale, que se passerait-il s’il ne pleut pas ? En ce moment déjà, l’urbanisation incontrôlée engloutit d'innombrables terres agricoles irremplaçables. On rapporte que la résistance aux antibiotiques tuera 300 millions de personnes d'ici 2050. Mais tout cela n’est pas si nouveau que ça. Dans mon pays, le Maroc, au 18 et 19ème siècles, il y avait une famine ou une épidémie tous les 10 ou 15 ans ! Je ne sais pas ce qui pourrait arriver à l’avenir, mais, au moins, en presque 60 ans, il n’y a eu qu’une seule épidémie, c’est la Covid-19, et une seule « famine », c’était dans les années 1980s. De plus, on se dirige lentement mais sûrement vers une atmosphère de plus en plus décarbonisée (décarbonnée), avec l'utilisation des énergies renouvelables, des batteries électriques, etc. Comme quoi, il est encore possible d'espérer.


Ce n'est malheureusement pas toujours le cas Quoi qu’il en soit, nous continuerons de voir des incendies, par exemple, ravager des arbres plusieurs fois centenaires qui ne seront peut-être jamais remplacés. De nombreuses personnes perdront également leur gagne-pain dans le processus. Idem pour les tremblements de terre et les inondations. Les compagnies d'assurance ne sont pas prêtes à tout indemniser pour tout le monde. Mais c'est ça, une catastrophe. Nous ne sommes pas au Paradis. Une catastrophe reste une expérience douloureuse – qu'elle soit naturelle ou non, qu'il s'agisse d'un châtiment divin ou non. La bonne question qu'il faut se poser est : Et si j'étais parmi les victimes ?

  

8

Nous sommes tous intelligents

  

Nous avons tous été témoins ou entendu parler : de gros fermiers possédant de vastes étendues de terres agricoles ont dû tuer leur bétail de leurs propres mains à cause de la sécheresse ; de jeunes entrepreneurs qui ont tout perdu du jour au lendemain à la suite d'une soudaine crise économique ; des hommes et des femmes ordinaires qui ont acheté pour leur petite famille des maisons ou appartements à crédit, puis n'ont pu rembourser leurs dettes et se sont faits ensuite expulsés ; des étudiants pleins d'espoir qui ont également contracté des prêts ont fait faillite avant même de pouvoir les honorer; des parents qui ont perdu leur enfant unique alors qu'ils en étaient si heureux ; des gens qui cherchaient désespérément un partenaire aimant et quand ils l'ont eu, le divorce les a séparés pour de bon. Les mathématiques peuvent-elles résoudre de tels problèmes ? Le meilleur logiciel ou la meilleure IA peuvent-il résoudre de tels problèmes ? De telles personnes ont-elles eu de tels problèmes parce qu'elles étaient si nulles ? Ou ces choses-là ont-elles besoin d'un autre type de réflexion ?


Bien sûr, il est très facile de rejeter d’emblée l’idée de philosopher sur tout cela sous prétexte qu’il ne s’agit là que de simple excès de misérabilisme ou de catastrophisme et que la vie est de nature pleine de mauvaises surprises et que chacun doit assumer la responsabilité de son échec, point barre. Mais cela ne mérite-il pas vraiment un moment de réflexion tout de même ?


Les étudiants en journalisme apprennent que « lorsqu'un chien mord un homme, ce n'est pas une nouvelle » ; Quand « un homme mord un chien », ça c'est une nouvelle. Une femme a appelé un médecin en direct sur une émission de radio pour lui demander pourquoi sa fille de trois ans tétait encore son biberon (même s'il était vide !). CELA N'EST PAS UNE NOUVELLE, me direz-vous. Et c’est vrai. Un autre auditeur a appelé pour conseiller à cette femme de mettre quelque chose d'amer dans le biberon ou sur sa tétine pour le rendre dégoûtant à l'enfant. Il a dit qu'il avait lui-même essayé cela sur sa propre fille quand elle avait trois ans et cela a marché. ET CELA ENCORE NEST PAS UNE NOUVELLE. Mais ensuite l'homme a concédé qu'il y a eu un problème beaucoup plus grave. « Maintenant, ma fille a 27 ans », a-t-il expliqué. « Elle est professeure d'université dans un pays étranger et pourtant elle suce toujours son pouce ! » CECI EST BIEN UNE NOUVELLE, n'est-ce pas ? Mais est-ce assez étonnant pour émerveiller tout le monde ?


Alors qu'est-ce qui provoque de l'admiration ou de l'émerveillement en nous ? Un journal kenyan s'est exclamé : « C'est un mystère : les Africains ne peuvent pas tirer de flèches olympiques ! » Pour l'auteur de cet article, « il est surprenant que l'Afrique ne domine pas le tir à l'arc alors qu'aucun autre continent n'utilise autant d'arcs et de flèches à des fins primaires. »


Dans son livre « Le Collier Unique », Ibn Abd Rabbih (860 - 940) raconte l'histoire d'un tabi'i (disciple des compagnons du prophète Mahomet) qui voyageait avec certains de ses étudiants lorsqu'ils rencontrèrent un homme ivre chantant un beau couplet en arabe, quelque chose comme : Mon cœur est devenu malade d'amour, Mais il n'y a aucun moyen d'atteindre mon amour. (Avec la rime, ça sonne beaucoup plus beau que ça en Arabe.) Le tabi'i descendit alors de son cheval et s'empressa d'écrire ces lignes. Étonnés, ses étudiants lui demandèrent : « Vous écrivez des mots prononcés par un homme ivre ? » Le tabi'i a répondit : « N'avez-vous pas entendu le proverbe qui dit 'Une perle pourrait très bien être trouvée au milieu des ordures.' ? Eh bien, ceci est une perle dans une poubelle ! »


Quelqu'un a été présenté au calife abbasside Haroun al-Rachid comme étant un homme de génie qui pouvait faire entrer cent aiguilles dans les yeux les unes des autres de telle manière qu'aucune aiguille ne tombe. Le calife demanda à l'homme de lui montrer comment il pouvait faire cela, et quand ce dernier l'eut fait de la manière la plus brillante, le calife se tourna vers ses hommes et dit : « Donnez à cet homme cent dinars et cent coups de fouet. » Stupéfait, l'homme de génie demanda : « Majesté, je peux comprendre pourquoi vous me donnez cent dinars, mais pas pourquoi vous me donnez cent coups de fouet ! » Le calife répondit : « Je vous donne cent dinars pour votre génie, et cent coups de fouet parce que vous avez gaspillé votre génie sur des futilités. »


Nous sommes tous intelligents, n'est-ce pas, mais utilisons-nous toujours notre intelligence à bon escient ?


J'étais une fois seul, debout en face de notre salle de cours, lorsqu'un camarade de classe s'est approché de moi et m'a dit, tremblant de rire : « Sur le chemin de la Fac, un groupe de petits enfants m'a arrêté et m'a dit, 'Dis-nous, si tu sais : est-ce qu'une poule urine ?' Tu sais quoi, je n'y avais jamais pensé ! » Maintenant je vous pose la même question : est-ce qu'une poule urine ?


On a tendance à prendre tellement de choses pour acquises – de petites choses, je veux dire. Combien de fois vous êtes-vous arrêté pour penser au tic-tac de votre montre, à ce minuscule insecte que vous trouvez parfois en train de parcourir la page lorsque vous lisez un livre, aux feuilles mortes de votre jardin ou dans les bois, à l'esprit humain qui a fait toutes les inventions que vous utilisez tous les jours ? Comme les gens dans l'Antiquité, qui s'émerveillaient des Sept Merveilles et oubliaient les millions de petites merveilles qui les entouraient, nous nous émerveillons toujours de grandes choses et oublions de penser aux petites choses en nous-mêmes et dans notre environnement.


Les gens se sont émerveillés devant le premier vol en ballon (1786) du premier vol transatlantique en solo sans escale (1927), du premier vol à bord de l'Airbus A380. Ils s'émerveillent encore devant la Grande Muraille de Chine, les Pyramides de Guizeh, la Tour Eiffel et Lady Liberty. On s'émerveille encore devant les performances époustouflantes des animaux de cirque et des clowns, devant les robots qui auraient des sentiments, devant les exploits d'athlètes qui battent des records, devant les talents extraordinaires de nos artistes (que l'on prend parfois pour des dieux !). Presque chaque semaine, il y a une nouvelle entrée dans le célèbre Guinness World Records.


Quand les gens pensent à quelque chose, ils oublient souvent autre chose – quelque chose de plus important. Quand nous nous regardons dans le miroir, pensons-nous au miroir lui-même ? Quand nous utilisons notre ordinateur, pensons-nous à l'esprit qui l'a inventé en premier lieu ? Lorsque nous nous interrogeons sur notre pouvoir (humain) d'imagination, pensons-nous d'où vient l'esprit humain en premier lieu ? Combien d'entre nous s'étonnent que bien que nous ayons le même père et la même mère, nous ne sommes pas identiques. Même les soi-disant « jumeaux identiques » se distinguent par leurs empreintes digitales et leurs iris.


Parfois, vous vous retrouvez soudainement dans une situation où vous vous sentez comme un imbécile, lorsque les choses les plus évidentes deviennent difficiles à comprendre, lorsque votre vie devient comme par hasard un fardeau, dénué de sens. Devrait-on attendre jusqu’à ce moment-là pour se mettre à méditer ?


Si l'exercice physique débarrasse notre corps de ses « poisons », n’en va-t-il pas de même pour la méditation ? Ne pourrait-elle pas nous débarrasser des « poisons » de nos âmes. La méditation sur de petites choses – ces choses auxquelles la plupart des gens ne pensent même pas – ne pourrait-elle pas nous procurer une lumière que la plupart des gens n'ont pas ?


Un Américain a disparu en Australie. Après environ trois mois, il a émergé de l'autre bout du désert australien, vêtu d'une chemise ordinaire et d'un pantalon, avec des sandales en cuir et une bouteille d'eau à la main. Lorsqu'on lui a demandé pourquoi il avait bravé un désert si effrayant seul et avec si peu d'équipement, l'homme a répondu tout simplement : « Je voulais juste découvrir Dieu. » Personnellement, je ne pouvais pas en croire mes yeux et mes oreilles en voyant ces images télévisées, après avoir lu des récits sur l'époque où les chameliers afghans emmenaient les colons européens à travers les déserts inexplorés du continent australien.


Maintenant, faut-il que j'aille jusqu'au désert australien juste pour méditer ? Mais je peux regarder le soleil d'où je suis : n'est-ce pas le même soleil que tout le monde voit partout ? N'est-ce pas la même lune que tout le monde connaît ? N'est-ce pas le même ciel, les mêmes étoiles, la même terre, la même eau, le même air, le même corps humain, la même âme humaine ? Alors, ne pourrait-il pas être le même Créateur, quel qu'il soit, qui a fait toutes ces choses pour nous tous ? Ne devrions-nous pas nous étonner du fait que les gens partagent les mêmes choses et pourtant adorent des dieux différents ?


Est-ce facile de penser, d'ailleurs ? Comment peut-on « penser » devant toutes ces tonnes d'images qui nous tombent dessus comme une avalanche de la télé, du Web… ? Mais combien de personnes pourraient aller dans les bois (sans caméra, sans smartphone, sans cigarettes), avec juste un esprit et un cœur, et deux pieds prêts à aller d'un endroit à l'autre, et des yeux prêts à regarder de belles fleurs – de petites fleurs – se cachant derrière de petits rochers que peu de gens se soucient de regarder ? Qui de nos jours irait dans les bois et regarderait les feuilles tombées, les toucherait, les scruterait, et penserait aux insectes, aux oiseaux migrateurs, à toute la vie, en fait ?


Qui ? combien ? C’est pas facile. Les gens penseront plutôt à leur quotidien, à leur pouvoir d’achat en berne, à leurs dettes abyssales, à leur futur incertain. Vous avez des gens qui n’ont même de quoi acheter à manger. Vous avez même des étudiants de médecine, censés nous soigner un jour, qui ont le malheur d’affronter au quotidien le burn-out, la dépression et l’anxiété. Vous avez des gens qui, en plus de ça, ont tous les jours la peur au ventre parce qu’ils ne sont pas sûrs que leurs enfants reviendront de l’école sains et saufs. Dans ces conditions, comment peut-on réfléchir dans la bonne humeur ? et pourtant, il faut réfléchir. Nous avons tous vu que le ras-le-bol contre la classe politique ne résoudra rien à lui seul.


Avant nous, il y a eu de gros agriculteurs avec de vastes terres agricoles ; il y a eu des princes et des nobles ; il y a eu de petites gens pleines de rêve ; il y a eu des gens qui ont été heureux pendant un certain temps puis ont perdu leur bonheur du jour au lendemain. Et la liste est longue. Peut-être que ces gens qui ont vécu avant nous n'avaient pas de machines à calculer, d'ordinateurs sophistiqués et de logiciels de génie, mais eux aussi étaient intelligents d'une manière ou d'une autre. Peut-être que nous aussi devons être doublement intelligents, en pensant aux grandes choses et en méditant également sur les petites choses.


Prenons cet exemple. Nous, musulmans du monde entier, venons de célébrer l'aïd al-Adha (la fête du sacrifice). Est-ce que tout le monde a célébré cette fête de la même manière ? Eh bien, beaucoup de gens sacrifient un mouton mais ne peuvent pas manger de sa viande simplement parce qu'ils sont malades. D'autres personnes, en revanche, ayant pourtant un estomac et un corps sains, ne peuvent pas se permettre un mouton. Trop cher pour eux. Qui devrait envier l'autre : celui qui ne peut pas manger de son mouton ou celui qui ne peut pas en acheter un en premier lieu ?


Le problème est que les sentiments et les émotions sont parfois plus forts que les connaissances et les convictions. Il n'est pas facile pour quiconque de gérer le sentiment que son patron ou son supérieur soit moins qualifié que lui. Il n'est pas facile pour un bel homme de comprendre pourquoi sa belle bien-aimée devrait épouser un homme « moche ». Il n'est pas facile pour une femme de couleur de comprendre pourquoi elle devrait l'être, si cela lui cause un problème, ou pour un ingénieur de comprendre pourquoi son fils unique devrait être handicapé. Les scientifiques ne peuvent pas, par exemple, expliquer pourquoi un couple marié ne devrait pas avoir d'enfant, malgré tous les efforts imaginables et inimaginables. Mais ils peuvent évidemment expliquer la chose physiologique/pathologique, qui a empêché le couple d'avoir un enfant. Les scientifiques n'ont pas de problèmes avec le monde physique. C'est pourquoi ils ont eu la gentillesse de rendre notre monde physique si facile : ils ont développé pour nous de merveilleux moyens de transport, des moyens de télécommunication de conte de fées, des services médicaux inespérés. Nos cuisines, nos salons, nos bureaux, nos sacs regorgent de gadgets technologiques que nous devons à nos vénérables scientifiques. Mais les scientifiques sont comme nous, comme vous et moi. Eux aussi ont des sentiments et des émotions. Un scientifique restera dégouté toute sa vie si l’on attribue une de ses découvertes ou contributions scientifiques à quelqu’un d’autre. Vous et moi sommes conscients des souffrances de tant de personnels médicaux à travers le monde pendant la pandémie actuelle. Et ainsi de suite.

Les scientifiques peuvent aisément inventer des techniques révolutionnaires, traiter le corps humain et améliorer l'agriculture, etc., mais ne peuvent certainement pas empêcher la mort, la sécheresse ou les inondations. Les scientifiques peuvent envoyer des humains sur Mars mais ne peuvent pas empêcher les tremblements de terre ou les ouragans, qui causent plus de destruction en quelques heures que la science ne puisse en construire en des années. C'est encore un problème d'émotions. On ne peut rien expliquer à une veuve assise devant sa maison détruite par les inondations ou à des parents qui viennent de perdre leur fils unique à cause de la Covid. Que dire à une personne qui ne trouve pas de lit de réanimation ou d'oxygène pour sauver sa mère ou sa fille ?


Quid de la Foi ? Certaines personnes y croient. Elles s’y accrochent en temps normal et en temps de crise. Elles y trouvent des explications à même de les aider à dépasser une perte, ou surmonter une rupture amoureuse, une faiblesse ou un drame. Cette explication n’est pas fortuite ou anodine Elle implique un engagement. Si l’on demande de l’aide à un dieu on doit raisonnablement s’attendre à devoir lui rendre grâce d’une manière ou d’une autre. C’est là la ligne de démarcation entre foi et incroyance. Certaines personnes ne peuvent en aucun cas accepter l'idée d'être dépendant de quoi que ce soit ou obéissant à qui que ce soit. Ils se considèrent comme pleinement autodidactes, auto-dépendants, auto-suffisants, et qu'ils ne doivent rien à personne, à aucune divinité. Ils n'ont rien de quoi remercier Dieu : parce que s'ils acceptent l'idée d'être obligés envers une divinité, ils craignent qu'on ne leur demande de se comporter selon les souhaits de cette divinité, non comme ils l'entendent, eux.


En réalité, même le Coran, par exemple, ne dit pas que si vous ne croyez pas en Dieu et en l'au-delà, vous échouerez dans ce monde. Le succès mondain est ouvert à tous. Le problème est que, lorsque vous échouez, pour des raisons objectives, vous pourriez avoir du mal à vous expliquer objectivement votre échec. Parce que c'est dans la nature humaine que l'homme a tendance à blâmer les autres pour ses échecs et à être arrogant en période de succès.


D'où vient notre arrogance ? Cela vient naturellement de notre envie instinctive de se montrer, de se vanter. Nous voulons montrer aux gens autour de nous que nous sommes autonomes, que nous sommes les meilleurs. Nous voulons que le monde sache que nous avons obtenu notre poste parce que, comme on dit, « un Écossais vaut 3 Anglais ». Idem pour son conjoint. Idem pour ses enfants. Idem pour sa fortune. Tout est le fruit de notre ambition. Tout est une question de mérite.


Cela s’explique aussi par le fait que, la plupart du temps, nous pensons à un moment de notre vie. Prenons-nous vraiment en compte toute notre vie ? Pensons-nous toujours au temps où nous vieillissons, où nous ne pouvons plus ni chanter ni danser, où nous ne pouvons plus jouer au golf ou au tennis, où nous ne pouvons plus nager ou même marcher, où nous ne pouvons plus manger avec un couteau et une fourchette, quand nous sommes enfermés dans une maison de retraite, abandonnés à la fois par notre famille et par le personnel de notre maison de retraite ?


Beaucoup de gens divorcent après la retraite. Ce moment qu’ils attendaient avec impatience pour se reposer et profiter de la vie devient subitement un enfer à cause du conjoint, des enfants ou autre. Si l’on n’est pas préparé pour ça, à quoi nous sert notre cervelle ?


Oui, j'imagine qu’un peu d'Histoire, un peu de philosophie, un peu de spiritualité, un peu de tourisme « gratuit » (juste un petit tour à pied ou à vélo autour de notre lieu de vie), un peu de méditation) - tout cela peut s'avérer juste inestimable. Nous savons tous que beaucoup de gens ont une bonne assurance et pourtant sont malheureux. Beaucoup de gens qui ont les meilleures pensions de retraite sont également tout sauf heureux. Il y a certainement d'autres choses dans la vie qui sont tout aussi importantes.

 

9

Qui nous sommes

 

Avec le temps cela devient tellement évident que beaucoup d’entre nous n’y pensent même pas. Mais réfléchissons-y un peu. Est-ce juste un processus normal que chaque peuple doit se distinguer des autres peuples par sa propre langue, sa propre culture, etc. ? Un peuple change-t-il sciemment et délibérément sa langue et sa culture pour paraître différent des autres peuples ? Ou cela fait-il partie de la nature humaine – une sorte de développement naturel et historique qui se produit spontanément au fil du temps ?


Comment se produit ce changement/cette transformation, historiquement parlant ? L’Histoire dit que certains peuples sont venus en Europe d'Asie centrale. D'autres se sont déplacés vers le sud pour rejoindre les populations qui par la suite sont devenues les peuples de l'Inde, de l'Iran, du Pakistan, de l'Afghanistan d'aujourd'hui… C'est ce qu'on appelle communément la migration « vers un monde meilleur ». Ce phénomène migratoire, et je ne vous apprends rien de tout ça, a toujours été causé par la famine, la guerre, l'expansion militaire… Nous, les Arabes et, avant nous, les Berbères, sommes venus dans cette partie de l'Afrique du Nord, plus ou moins pour les mêmes raisons, de la péninsule arabique. Les États-Unis d'Amérique, le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et l'es pays d’Amérique latine et centrale sont tous des exemples évidents de la façon dont la migration fait des peuples ce qu'ils sont. Les Américains et les Australiens, par exemple, ne parlent pas avec le même accent et ont des constitutions différentes, etc., bien qu'ils soient originaires des mêmes endroits. Beaucoup de peuples ont les mêmes origines et pourtant vous entendrez parler de culture américaine, de culture australienne, de culture brésilienne…. Y-a-t-il un problème à cela ? Un Américain ne devrait-il pas se vanter que sa culture est bien plus importante que la culture marocaine, par exemple ? Comment un Marocain peut-il convaincre un Américain que, non, c'est la culture marocaine qui est la meilleure ? Avant même de se mettre d'accord sur ce que signifie la culture, il va sans dire que beaucoup plus de jeunes marocains aimeraient vivre aux États-Unis que les Américains n'adoreraient vivre au Maroc ? Les statistiques parlent d'elles-mêmes. Il y a des dizaines de milliers de Marocains qui sont devenus citoyens américains naturalisés et des milliers d'autres immigrés marocains aux États-Unis. Le nombre total d'immigrants légaux au Maroc est d'environ 100 000 et le nombre d'immigrants illégaux est d'environ 40 000 – sur une population de 34 000 000, dont plus de 4 000 000 vivent à l'étranger. Comment expliquer cela ? Pourquoi les Marocains vont-ils en Amérique ? Est-ce qu'ils vont plutôt pour le pain et le miel ou pour la culture américaine ?


Beaucoup de Marocains qui sont allés en Amérique, ou y vivent, parlent de démocratie américaine, du sens américain de l'organisation, du sens américain de l'initiative et de l'entreprise, du sens américain de la prise de risque… Dans ma ville natale de Mohammedia, il y a un grand MacDo et plusieurs pizzerias. J'ai eu parmi mes professeurs des Américains qui parlaient couramment l'arabe marocain. Si beaucoup de Marocains aux USA y sont allés pour l'argent, pourquoi les Américains (quel que soit leur nombre) viennent au Maroc ? Oui, certains d'entre eux viennent pour travailler (dans les écoles américaines, dans plus de 150 entreprises américaines présentes dans mon pays, etc.), mais viennent-ils tous pour l'argent ? Je ne sais pas.


Au Sénégal, par exemple, il y a pas moins de 4 000 Marocains, dont certains sont installés là-bas depuis 1870. Je ne vais pas parler ici de leurs problèmes. Je me demande seulement : pourquoi sont-ils allés là-bas et pas en Amérique ou en Europe ? Des milliers de Libanais et d'autres migrants arabes se sont bien entendu rendus aux Amériques, mais des milliers d'entre eux vivent également dans diverses parties de l'Afrique subsaharienne.


Au lendemain de la crise du golfe de 1990-1991, j'ai été de ceux qui se sont étonnés du nombre important de migrants américains et européens en Irak, par exemple. Pendant des décennies, aux yeux de beaucoup d'entre nous, les États arabes du Golfe étaient synonymes de richesse et d'opportunités d'emploi plus que toute autre chose. Maintenant, j'entends des intellectuels marocains et arabes respectables parler avec beaucoup de respect des « politiques visionnaires » de, disons, des dirigeants qataris et émiratis entre autres. D'où viennent de telles visions ? L'argent peut-elle à elle seule expliquer tout ? La culture n'a-t-elle pas quelque chose à voir là-dedans ?


Les questions sur la culture nous ramènent à des questions sur nous-mêmes, en tant qu'êtres humains. Qu'est-ce qui me fait écrire en anglais et en français et qu'est-ce qui fait que certains anglais et français apprennent l'arabe ? Pourquoi ne devrais-je pas écrire en arabe ? Si j'écris dans une langue étrangère, serais-je nécessairement influencé par la culture de la langue dans laquelle j'écris ?


Et cette culture-là est-elle si importante pour moi en tant que personne ? Eh bien, j'ai besoin de ma façon de penser quand j'ai un problème. J'ai besoin du sentiment d'appartenance quelque part, à quelque chose, même quand je n'ai pas de problème. Si je ne me sens pas appartenir à là où je suis, c'est un gros problème. C'est alors que j'aurai besoin de ma façon de penser pour m'aider à surmonter ce problème. En d'autres termes, mon identité est plus une nécessité psychologique que sociale. Ces aspects identitaires font tous partie de ma culture, ou plutôt de ma culture collective que je partage avec des millions de personnes dans mon pays. Mais il y a une partie plus spécifique de ma culture (ma culture individuelle) que je partage avec beaucoup moins de gens dans mon pays et avec beaucoup plus ailleurs.


Personnellement, je mange avec les mains et je ne serais jamais à l'aise avec un couteau et une fourchette. (D'ailleurs, on dit que c'est meilleur pour la santé !) Si je veux être moderne (quoique je ne sache ce que cela veut dire au juste), dois-je nécessairement manger d'une certaine manière ou m'habiller selon la mode ou parler de telle ou telle manière ? Eh bien, je crois, pour ma part, que même si je considère que ma voie est la meilleure, les autres sont libres d'avoir leur propre voie dans un cadre juridique général accepté par tous pour le bien d'une société apaisée. Je devrais donc pouvoir manger ce que je veux comme je veux quand je suis seul ou avec des gens comme moi. Je porte ce que je veux comme je veux sans provoquer ni blesser personne. Je parle comme je peux sans singer personne ni prétendre ce que je ne suis pas. C'est cela ma culture. Mon mode de vie est une représentation « ostentatoire » de ma culture. Si j'aimais un morceau de musique américaine, cela ferait partie de ma culture. Si j'aimais une radio ou un magazine français, cela ferait partie de ma culture. Je suis marocain et j'aime beaucoup de choses marocaines. Mais j'aime aussi beaucoup de choses qui ne le sont pas. J'aime le sens du devoir des Américains. J'aime l'amour des Allemands pour la lecture. J'aime la littérature française du XIXe siècle, etc. Et je suis absolument à l'aise avec ce que j'aime.


Si je peux m'offrir ce que j'aime, c'est super. Sinon, pas de problème. Je n'ai pas besoin d'avoir une voiture ou même un ordinateur portable pour être une personne moderne. Je peux très bien travailler dans des cybercafés et voyager en taxi ou en bus. Aucun problème. Si d'autres personnes pensent que je ne suis pas une personne moderne, quoi que cela signifie, ou que j'ai échoué socialement ou professionnellement, ce n'est pas un énorme problème pour moi. Ce qui est important pour moi, c'est que je travaille dur pour obtenir ce que je veux. Ce qui est important pour moi, c'est que je sois un homme d'aujourd'hui. J'ai besoin de savoir et de comprendre ce qui se passe dans le monde. J'ai besoin de comprendre l'Histoire pour voir ce qui était possible dans le passé qui ne l'est plus aujourd'hui et ce qui peut encore changer dans le futur pour le meilleur ou pour le pire. J'ai besoin de comprendre les façons de penser des autres. J'ai besoin d'en apprendre davantage sur les traditions et les modes de vie des autres. Si je sais comment les autres pensent et se comportent, j'améliorerai ma propre façon de penser.


Maintenant, devrais-je aller dans un pays étranger spécifique uniquement pour voir à quoi ressemblent ses habitants ? Pourquoi pas ? Pourtant, je peux le faire sans quitter ma ville natale. Ce qui est plus important pour moi, c'est de savoir comment ces gens sont devenus ce qu'ils sont, comment ils pensent, comment ils résolvent leurs problèmes, quels sont leurs rêves et leurs aspirations... Je peux savoir ceci à l'école, en lisant, à travers les médias. Quand j'en sais beaucoup là-dessus, je repousse un peu plus loin les limites de ma culture. Les auteurs français deviendraient donc mes auteurs, mes professeurs, et aussi les auteurs américains, les journalistes égyptiens, les poètes arabes… Ma culture deviendrait ainsi aussi vaste que mes connaissances. C'est ce que j'entendais par « culture spécifique » ou « culture individuelle ». Je ne ferais pas alors de différence entre culture et civilisation. Mais je ferai quand même une différence entre ma culture en tant que culture arabo-berbère et la culture occidentale, par exemple. Elles ne sont pas les mêmes. Et c'est très normal. Je ne vais pas commencer à comparer ce qui est le mieux. Ma culture est bonne tant qu'elle me convient, tant que je me sens à l'aise avec. Je ne m'attendrais pas à ce que quelqu'un s'habille comme je le fais, ou mange comme je le fais (même s'il était musulman comme moi) … Je m'attendrais seulement à ce qu'il me comprenne – même pas à ce qu'il m'accepte tel que je suis. Nous sommes tous des êtres humains : nous avons plus ou moins les mêmes problèmes et différentes manières de traiter ces problèmes. Quand j'écris, j'expose ma façon de penser, ma façon de résoudre mes problèmes – basée sur ma propre culture (individuelle), qui n'est ni pire ni meilleure que la culture de qui que ce soit.


Que se passerait-il si j’étais invité à un dîner spécial où je devais respecter une certaine étiquette ? Franchement, je serais très gêné et peut-être ridiculisé. Mais une fois sorti, j’oublierais tout ça et je redeviendrais moi-même. D’ailleurs, j’en ai déjà fait l’expérience et je n’hésiterais pas à la refaire

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Sécurité spirituelle  

 

 Si vous aimez votre pays, le quitteriez-vous ? Si vous aimez votre culture, l'abandonneriez-vous ? Nous savons tous que des milliers de migrants venant de zones de guerre, par exemple, paient des milliers de dollars pour des voyages en bateau ou autre moyen vers des pays plus sûrs. Mais des milliers d'autres migrants paient également des milliers de dollars aux passeurs alors qu'ils viennent de pays relativement sûrs.


Dans certains endroits, les gens ne se sentent pas en sécurité parce qu'ils craignent les inondations. Dans d'autres endroits, les gens ne se sentent pas en sécurité parce qu'ils craignent la sécheresse. Pourtant, la sécurité est-elle toujours physique ? Il y a des personnes mariées qui ne se sentent pas en sécurité pour leur mariage, des personnes employées qui ne se sentent pas en sécurité par rapport à leur travail, des personnes en bonne santé qui ne se sentent pas en sécurité sans assurance maladie appropriée, des personnes qui ne se sentent pas en sécurité à cause de leur couleur , « race » ou religion ; des gens qui ne se sentent pas en sécurité parce qu'ils sont constamment stéréotypés, stigmatisés, parce que les autres les jugent toujours par leur look, par leur caste, par leurs vacances...


Vous avez probablement vu à la télévision des images de Chinois voyageant dans des trains bondés à la veille des grandes vacances chinoises. Des personnes qui ont quitté leurs villages et hameaux pour travailler dans des villes lointaines se languissent de leurs familles, à qui elles apportent de l'argent et des cadeaux. Qui a besoin de l'autre ? Le travailleur migrant ou sa famille restée au village ? Qui a besoin de sécurité ? La solitude n'est-elle pas une forme de manque de sécurité ? Le sentiment de sécurité ne vaut-il pas de l'argent et des cadeaux ?

 
Mon frère cadet m'a invité un jour à partager l'Aïd al-Adha (La Fête du Sacrifice) avec lui dans la ville d'Essaouira. J'y suis allé la veille. Je suis arrivé à la gare routière de Casablanca en fin d'après-midi. Mais j'ai dû attendre plusieurs heures que le car d'Essaouira quitte la gare. Et je ne me suis pas du tout lassée d'attendre. J'ai été en quelque sorte ravi de voir à quel point les gens ont eu du mal à réserver leurs voyages vers presque toutes les destinations du pays. J'ai vu plusieurs personnes porter des moutons sur leurs épaules, d'autres hisser les moutons sur les toits d'autocars... Et quand notre car a quitté Casablanca, dans la soirée, un groupe de passagers se sont mis à chanter, certains en arabe, d'autres en berbère... Ils ont chanté et applaudi joyeusement. Ils auraient même dansé s'il y avait eu assez d'espace. L'autocar roulait sur quatre roues (en caoutchouc), la nuit, mais tout le monde se sentait tellement en sécurité que beaucoup ont succombé au sommeil. Tout le monde a fait confiance au chauffeur du car. Des petites choses qui ne mériteraient même d'être dites. Mais, d'une certaine manière, nous sommes tous ce petit enfant qui court dans les bras de sa mère pour se sentir en sécurité.

Pour certains, c'est une quête de sécurité, pour d'autres une quête du bonheur. Pourquoi les Romains sont-ils venus dans mon pays, le Maroc ? A cette époque, il n'y avait pas d'Arabes, pas d'Islam, dans ce pays. Mais ce n'était pas un no man's land. Volubilis, par exemple, la ville romaine la plus connue au Maroc, a été fondée au IIIe siècle avant JC. C'était alors la capitale de la Maurétanie, un territoire amazigh (berbère). Aussi les Phéniciens avaient établi leurs colonies sur nos côtes vers le 12ème siècle avant JC. Les Portugais, eux, ont construit leur première colonie sur notre côte atlantique au début du 16ème siècle. Ensuite, les Espagnols et les Français se sont partagé notre pays au début du 20ème siècle, mais de nombreuses autres nations européennes voulaient aussi ce privilège pour elles-mêmes. Pourquoi ? Eh bien, ils ont tous vu des opportunités dans ce pays ; ils y voyaient tous le moyen d'atteindre une sorte de bonheur et de prospérité pour une partie de leurs populations respectives. Nous allons tous là où nous voyons la possibilité du bonheur.


Certaines personnes sont préoccupées par un autre type de sécurité et de bonheur. J'ai écouté quelques émissions de radio non-musulmanes en anglais. Une question fréquemment posée est : « Si je fais ceci ou cela, serais-je sauvé ? » Est-ce que tout le monde pose de telles questions ?


Quand je m'allonge sur l'herbe dans un beau parc, dans un bois ou dans la verdure, je pourrais prendre ceci pour acquis. Je n'y penserais peut-être même pas. Quand je m'assois au soleil et que je sens la douce brise, je pourrais tenir cela pour acquis. Quand je bois un verre d'eau par une chaude journée d’été, je pourrais aussi le prendre pour acquis. Quand je mords dans une pomme, je tiendrais aussi cela pour acquis.


Je me demande si vous avez vu un petit enfant ou un adolescent dessiner quelque chose sur un vieux cahier qu'il ne montrerait à personne. Le cahier est plein de dessins de chevaux ou d'animaux domestiques ou de personnages de films ou d'autres personnages imaginaires ou réels – pourquoi ? Vous qui ne savez peut-être pas dessiner, vous diriez WOW ! Vous êtes étonné de la créativité de l'enfant. Mais pour lui, c'est tout à fait normal, c'est naturel. A supposer qu'il veuille montrer son « travail », qui serait intéressé ? Ne connaissez-vous pas des peintres/écrivains… qui n'ont été reconnus comme tels qu'après leur mort ou très tard dans leur vie ? Ne connaissez-vous pas des artistes qui sont morts pauvres alors que leur travail rapportait beaucoup d'argent à d'autres ? Un tel artiste a-t-il forcément quelqu'un en tête (un public) lorsqu'il crée quelque chose ?


L'autre jour, je me promenais dans le bois quand tout à coup mes yeux sont tombés sur une belle fleur sauvage. Alors que je regardais cette fleur en particulier, j'ai remarqué d'autres fleurs juste à côté – peut-être beaucoup moins belles, mais chacune avec une couleur différente, chacune avec une forme différente. Je sortais une fois d'une école où je donnais des cours du soir lorsqu'une élève de 17 ans m'a fait un signe de la main et m'a dit d'une voix remplie d'admiration : « Professeur, regardez là-bas ! » Elle montra d'une main presque tremblante une voiture garée en face de l'école. J'ai vu la voiture : elle était juste merveilleuse. J'ai donc compris pourquoi la fille la regardait avec révérence. Eh bien, moi aussi je me promenais ce jour-là dans ce bois, marchant lentement, allant de sentier en sentier, regardant avec tant d'émerveillement toutes ces fleurs sauvages, examinant, comme un botaniste passionné, la forme, la couleur, les particularités de chaque fleur. Quand on est dans un tel endroit, à regarder avec le cœur plutôt qu'avec les yeux, on ne peut s'empêcher de se demander : Mais pourquoi Dieu a-t-il fait pousser cette fleur ici, à cet endroit particulier, où personne ne la verrait ou ne s'en soucierait ? Combien de personnes viendraient passer une demi-heure à contempler des fleurs et à regarder leurs couleurs et leurs formes ? Eh bien, le nombre est-il vraiment si important ? Allah dit dans le Coran : « Et la plupart des gens ne sont pas croyants malgré ton désir ardent. » (12.103) « Et la plupart d'entre eux ne croient en Dieu, qu'en lui donnant des associés. » (12.106) « Combien y a-t-il de présages dans les cieux et sur la terre auprès desquels ils passent le visage détourné ! » (12.105) « Nul n'y prête attention, sauf celui qui se tourne (vers lui) repentant. » (40.13)


Imaginez que nous n'étions pas là. Imaginez qu'il n'y avait que des chiens, des cochons et des ânes errants là où nous étudions, travaillons, jouons, vivons maintenant. Imaginez que la télé, le Smartphone, la voiture, la chaise, le lit, le verre, la marmite, le vélo, le couteau, le livre, le jardin, la route goudronnée, le quartier, les gens n'existaient pas. De même pour la nation, le pays, et tout. Imaginez que les yeux, les oreilles, la bouche, le nez, les mains, les pieds, le cerveau, le cœur et tout le reste n'existaient pas. Bref, toutes les choses que nous tenons pour acquises. Imaginez qu'il n'y avait que des chiens, des cochons et des ânes dans ce monde magnifique Les gens en quête de sens, en quête de sécurité spirituelle, pensent à ça à un moment ou à un autre.


Maintenant, en quoi la sécurité spirituelle serait-elle si essentielle ? Au moins, les rois, les dignitaires et les riches qui vivaient il y a 3 000 ans avaient plus de richesse et de confort que de nombreux diplômés universitaires intelligents du 21e siècle. Nous, les gens du 21e siècle, avons des avions rapides, des navires gigantesques, des systèmes de communication et de transport de conte de fées. L'intelligence artificielle se développe chaque jour. La 5G n'est plus une curiosité. Notre présent est certainement sans aucune mesure avec l'avenir. Mais les Babyloniens, qui vivaient il y a 4000 ans, n'étaient pas moins intelligents que nous, vu les moyens dont ils disposaient. Les mathématiques d'aujourd'hui doivent beaucoup aux gens qui ont vécu il y a des milliers d'années. Et puis vous avez les Pyramides en Egypte, Petra en Jordanie ; vous avez Pythagore, Aristote, Avicenne, Galilée et ainsi de suite. Et pourtant, même aujourd'hui, nous nous posons encore des questions que les gens se posaient il y a 6 000 ans.


Certains oiseaux ont de très belles plumes, de très belles couleurs, de très beaux gazouillements, que d'autres n'ont pas. Pourquoi ? Certaines personnes ont toutes les bonnes et belles choses que d'autres n'ont pas. Pourquoi ?


Une fois on commence le questionnement, eh bien, on ne s’arrête plus ! Où dois-je me situer entre la quête de sens et la quête du plaisir ? Dois-je être content, satisfait ou heureux ? Le bonheur est-il légitime ? Le plaisir est-il légitime ? Puis-je être heureux seul, indépendamment des autres ? Puis-je être heureux au milieu de gens malheureux ? Puis-je être heureux en l'absence d'un certain minimum de choses mondaines ? Puis-je être heureux en souffrant d'une perte ou d'un manque ? Puis-je être heureux quand et où je veux sans attendre l'intervention divine tout le temps ?


En posant de telles questions, je pourrais donner l'impression de « juger » quelqu'un, de juger Dieu, en l’occurrence, comme s'il était un « candidat à la présidentielle ». Et pourtant, le Coran, par exemple, me donne, en tant que personne curieuse, la possibilité de demander, de penser – tant que je le fais de bonne foi. Mais le Coran a aussi des questions pour moi. Le Coran m'invite à réfléchir. Allah a dit au Prophète (psl) : « Et tu ne leur demandes aucun salaire pour cela. Ce n'est là qu'un rappel adressé à l'univers. » (12.104) « Ton devoir n'est que la transmission (du message). À nous le compte. » (13.40)


Le Coran est maintenant disponible en ligne gratuitement. Qui va le lire ? Combien de personnes le lisent en ligne ou sur papier ? Allah seul le sait. « Le Tout Miséricordieux a fait connaître le Coran. » (55.1-2) Pour un croyant, cela ne vient pas de n'importe qui, de n'importe quel créateur de contenu ; cela vient du Seigneur des mondes. « Ce n'est pas une plaisanterie. » (86.14) « Non, mais c'est plutôt un glorieux Coran. » (85.21) Allah dit : « Si Nous avions fait descendre ce Coran sur une montagne, tu l'aurais vu s'humilier et se fendre, déchiré par la crainte d'Allah. Et ces paraboles Nous les citons aux gens afin qu'ils réfléchissent. » (59.21) « En vérité c'est Nous qui avons fait descendre le Coran, et c'est Nous qui en sommes gardien. » (15.9) « En effet, Nous avons rendu le Coran facile pour la médiation. Y a-t- il quelqu'un pour réfléchir ? » (54.7) Le Coran est maintenant là, et alors chacun est libre de lire ou de ne pas lire. Noé (psl) a dit à son peuple : « Ô mon peuple ! Pensez-vous, si je m'appuie sur une preuve claire de mon Seigneur et qu'il m'est venu une miséricorde de sa part, et qu'elle vous soit obscurcie, devrons-nous vous l'imposer alors que vous la répugnez ? » (11.28)


Ce qui est certain, cependant, c'est que des millions et des millions de personnes ont lu le Coran au cours des 1400 dernières années dans diverses parties du monde, dans un certain nombre de langues différentes.


Alors pourquoi certaines personnes s'intéressent-elles et d'autres nullement au Coran ? Ne parlons pas de ceux qui n'en ont jamais entendu parler. Allah ne les tiendra pas pour responsables de ne pas l'avoir lu. « Allah n'impose à aucune âme une charge au-delà de sa portée. » (2.286) Mais qu'en est-il de ceux qui ont la possibilité intellectuelle de lire le Coran ? C'est à ces gens-là qu'Allah dit : « Ô gens ! Maintenant, une preuve évidente de votre Seigneur vous est parvenue, et Nous vous avons fait descendre une claire lumière. » (4.174) « Nous leurs avons, certes, apporté un Livre que Nous avons détaillé, en toute connaissance, à titre de guide et de miséricorde pour les gens qui croient. » (7.52) « Or, si Nous avions voulu, Nous aurions certes envoyé dans chaque cité un avertisseur. » (25.51) « Ne leur suffit-il donc point que Nous ayons fait descendre le Livre et qu'il leur est récité ? Il y a assurément là une miséricorde et un rappel pour des gens qui croient. » (29.51)


On pourrait naturellement remettre en question la véracité du Coran en tant que Parole de Dieu. Mais seul un ignorant jetterait des doutes sur le fait que les gens qui croient au Coran en tant que tel ont mis en œuvre ses enseignements sous la forme d'une civilisation indéniable, la civilisation islamique, à laquelle ont contribué diverses nations au cours de plusieurs siècles. Les grands empires islamiques ont été construits sur la base des enseignements coraniques. En d'autres termes, le Coran n'est pas que des mots. C'est une source de pouvoir et d'inspiration. S'il y a un problème, ce n'est pas avec le Coran ; cela doit être avec la façon dont les gens le traitent. C'est un fait, par exemple, que de nombreux musulmans ont vendu leur âme à des envahisseurs non musulmans, y compris les Mongols et les Croisés, en échange d'or et de pouvoir.


Maintenant, comment doit-on traiter le Coran ? Allah dit : « Ne méditent-ils pas alors sur le Coran ? Ou y a-t-il des cadenas sur leurs cœurs ? » (47.24) « Nous avons, dans ce Coran, cité pour les gens des exemples de toutes sortes afin qu'ils se souviennent. » (39.27) « Ne méditent-ils donc pas sur le Coran ? S'il provenait d'un autre qu'Allah, ils y auraient trouvé certes maintes contradictions ! » (4.82) « Le faux ne l'atteint [d'aucune part], ni par devant ni par derrière : c'est une révélation émanant du Sage, Digne de louange. » (41.42)


Le Coran ne prend pas le lecteur pour un idiot. Le Coran respecte mon intelligence en tant que lecteur, que je sois croyant ou non. Tout ce que j'ai à faire est d'être à la fois intelligent et honnête, ce qui veut dire que je dois d’abord lire et réfléchir avant de disputer. Allah dit : « Et assurément, Nous avons montré pour l'humanité, dans ce Coran, toutes sortes d'exemples. L'homme cependant, est de tous les êtres le plus grand disputeur. » (18.54) « … la plupart des gens s'obstinent à être mécréants. » (17.89) « En quelle déclaration, après cela, croiront-ils ? » (77.50) « Voici un avertissement, afin que quiconque le désire puisse choisir un chemin vers son Seigneur. » (76.29)


Ceci est une affaire sérieuse. Croire signifie un engagement. Comment puis-je faire des sacrifices pour quelque chose dont je ne suis pas sûr ? Je dois avoir le yaqine (la foi qui est sûre). C’est dans ce sens qu’Allah dit dans le Coran : « Ceci [le Coran] constitue pour les hommes une source de clarté, un guide et une miséricorde pour les gens qui croient avec certitude. » (45.20) « Il détaille les révélations, afin que vous soyez certains de la rencontre de votre Seigneur. » (13.2) Le Coran parle de « science certaine » (102.5), de « l'oeil de certitude » (102.7) et de « pleine certitude » (56. 95). C'est seulement quand j'ai ce yaqine que je peux moralement prétendre à récolter le fruit de ma croyance. C'est pourquoi les prophètes ont été soumis à épreuve après épreuve jusqu'à ce qu'ils acquièrent un yaqine absolu (foi inébranlable). Allah dit : « Et Nous avons désigné parmi eux des dirigeants qui guidaient (les gens) par Notre commandement aussi longtemps qu'ils enduraient et croyaient fermement en Nos révélations. » (32.24) Si vous n'êtes pas sûr vous-même, comment pouvez-vous guider les autres ?


Que les scientifiques musulmans des premiers siècles de l'Islam aient inventé des choses par eux-mêmes ou simplement copié les Grecs et d'autres nations, ils étaient en tout état de cause conscients des limites de la science des hommes. Ils ont fait de leur mieux ; ils ont contribué autant qu'ils ont pu au développement de la science tout en restant humbles dans leur relation avec Allah. Ils avaient la ferme conviction que leur science était une provision d'Allah et pas seulement le fruit objectif de leur cerveau et de leur sueur. S'ils vivaient aujourd'hui, ils ne seraient guère bluffés par quelque chose comme Metaverse ou une station spatiale habitée sur Mars ou même la meilleure application de traduction instantanée. Les gens qui croient au Coran croient qu'il y avait au moins deux peuples qui ont atteint les plus hauts niveaux en science et à la fin leur science ne leur a servi à rien quand Allah a voulu les anéantir. Aad et Thamoud sont peut-être trop éloignés de notre époque, mais qui nierait l'histoire des Pharaons ou l'existence même des anciens Egyptiens, par exemple ? Même les scientifiques d'aujourd'hui n'ont pas encore réussi à percer le mystère des tunnels de Saqqarah en Égypte.


Maintenant que j'en suis convaincu, en quoi le Coran peut-il m'être utile ? Allah dit : « Certes, ce Coran guide vers ce qui est le plus droit, et annonce aux croyants qui font de bonnes œuvres que la leur sera une grande récompense. » (17.9) « Voilà une déclaration pour l'humanité, un guide, et une exhortation pour les pieux. » (3.38) « C'est un guide et une miséricorde pour les croyants. » (27.77) « Et Nous révélons du Coran ce qui est une guérison et une miséricorde pour les croyants. » (17. 82)


Donc, si je ne suis pas croyant, je ne peux pas espérer obtenir "une guérison et une miséricorde" de la part d'Allah. Mais est-ce que cela me suffirait comme récompense si je crois ? En d'autres termes, n'aurais-je pas vraiment besoin d'une guérison et d'une miséricorde ne serait-ce qu’en temps de crise ? Quelqu'un d'autre qu'Allah peut-il m'accorder une guérison et une miséricorde à une époque où personne ne se sent vraiment en sécurité ?


Mais comment puis-je croire ? Que dois-je croire ? La première chose que je devrais croire est que le Coran est la Parole d'Allah. Ensuite, je crois qu'Allah est Dieu. Ensuite, je crois aux promesses et aux avertissements d'Allah.


Le Coran dit que c'est Allah qui a créé le monde. Il se peut qu’une personne scientifique puisse demander des preuves matérielles que c'est bien réellement Allah qui a créé le monde. C’est dans cet esprit qu’Allah parle dans le Coran de la terre, du ciel, des montagnes, de la mer, de la pluie, des vents, etc.


Mais pourquoi une personne non scientifique devrait-elle croire à tout cela ? Allah a créé le monde, et c'est tout. Non, nous ne sommes pas faits comme cela. Nous sommes oublieux. Lorsque nous allons au marché pour acheter des fruits et légumes, nous pensons aux prix, pas à Allah qui les a créés. Nous regardons à l'intérieur de notre réfrigérateur avec notre estomac, pas avec notre cœur et notre âme. Lorsque nous ouvrons notre armoire, nous ne pensons pas à (Allah qui a créé) la laine, le coton, la soie, etc. Nous ne pensons pas à notre vue et à notre ouïe jusqu'à ce que nos yeux et nos oreilles nous fassent mal. Nous ne pensons pas à notre cœur jusqu'à ce que nous soyons malades. Nous devons donc être rappelés encore et encore. Nous devons nous rappeler sans cesse qu'Allah a quelque chose à voir avec notre vie et notre mort. Les feux de forêt ont besoin d'eau pour être éteints. Seul Allah peut nous aider avec les précipitations – même si certains feux de forêt sont déclenchés par des humains. La sécheresse, qui peut aussi être causée par les activités humaines, tue les humains, les animaux et les récoltes. Seul Allah peut donner ou retenir la pluie. Allah est présent dans tous les aspects de notre vie individuelle et collective. Notre gagne-pain dépend d'Allah. Nous devons donc écouter ce qu'Allah a à nous dire sur notre monde et sur nous-mêmes. Et tout cela est dans le Coran.


En fin de compte, c'est une question de choix personnel. Allah dit : « La vérité émane de votre Seigneur. Alors, quiconque le veut, qu'il croit, et quiconque le veut, qu'il ne croie pas. » (18.29) « Ceci est un rappel. Que celui qui veut prenne donc le chemin vers son Seigneur ! Cependant, vous ne saurez vouloir, à moins que Dieu veuille. » (76.29-31) « S'est-il écoulé pour l'homme un laps de temps durant lequel il n'était même pas une chose mentionable ? En effet, Nous avons créé l'homme à partir d'une goutte de sperme mélangé [aux composantes diverses] pour le mettre à l'épreuve. Nous l'avons fait entendant et voyant. Nous lui avons montré le chemin, qu'il soit reconnaissant ou ingrat. » (76.1-3) « Dis : Croyez-y ou n'y croyez pas. Ceux à qui la connaissance a été donnée avant cela, lorsqu'on le leur récite, tombent, prosternés, le menton contre la terre, et disent : "Gloire à notre Seigneur ! La promesse de notre Seigneur est assurément accomplie". Et ils se prosternent face contre terre en pleurant, et cela augmente leur humilité. Dis : Invoquez Allah ou invoquez le Tout Miséricordieux. Quel que soit le nom par lequel vous l'appelez, il a les plus beaux noms. (17.107-111)


Si je dois choisir, je choisis quoi au juste ? Eh bien, je dois choisir entre la voie d'Allah qui consiste à dire qu'il y a deux vies, en fait : celle-ci sur terre et une autre après la mort. Je dois trancher, car seuls celles et ceux qui croient et suivent la voie d'Allah seront admis au paradis, les autres iront en enfer. Il n'y a pas d'autre possibilité.


Pour qu'il y ait un paradis, logiquement, il devrait y avoir une vie après la mort. Dans le Coran on lit : « Ou (pensez à) à celui qui, passant par une commune qui était tombée en ruine totale, s'écria : Comment Allah donnera-t-il vie à cette commune après sa mort ? Et Allah le fit mourir cent ans, puis le ramena à la vie en disant : Combien de temps as-tu demeuré ainsi ? (L'homme) dit : je suis resté un jour ou une partie de jour. (Il) dit : Non, mais tu es resté cent ans. Regarde ta nourriture et ta boisson qui n'ont pas pourri ! Regarde ton âne ! Et pour faire de toi un signe pour l'humanité, regarde ces ossements, comment Nous les assemblons et les revêtons de chair ! Et devant l'évidence, il dit : Je sais maintenant qu'Allah est capable de faire toutes choses. Et quand Abraham dit : Seigneur ! Montre-moi comment Tu ressuscites les morts, Allah dit : Ne crois-tu pas encore ? "Si ! dit Abraham ; mais que mon coeur soit rassuré. (Son Seigneur) dit : Prends donc quatre oiseaux et fais-les pencher vers toi, puis place une partie d'eux sur chaque colline, puis appelle-les, ils viendront à toi en toute hâte, Et sache que Dieu est Puissant et Sage. » (2. 259-260)


Un bon croyant croirait à ceci Mais un non-croyant ne se contenterait pas de telles paroles. Il demanderait quelque chose de concret. Il voudrait voir pour croire. C’est ainsi que le Prophète (psl) a tenu à nous éclairer tous, croyants et non-croyants, là-dessus, en disant clairement : « Tout le corps humain périra sauf le dernier os du coccyx (partie terminale de la moelle épinière), et à partir de cet os, Allah reconstruira tout le corps. Alors Allah enverra de l'eau du ciel et les gens pousseront comme des légumes verts ».


Nous devons donc être rappelés afin de calmer nos nerfs dans des moments difficiles comme ceux-ci. Dans le Coran, nous lisons : « Ceux qui ne croient pas disent : Si seulement un présage était envoyé sur lui de la part de son Seigneur ! Dis : En vérité, Allah égare qui Il veut et Il guide vers Lui celui qui se repent, ceux qui ont cru, et dont les coeurs se tranquillisent à l'évocation d'Allah. En vérité, c'est dans l'évocation d'Allah que les cœurs trouvent le repos ! » (13.27-28)

 

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                         Divinité et humanité

 

Que pensons-nous savoir d'Allah ? Pas autant qu'Il en sait sur nous, en tout cas. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'Allah est au-delà de toute comparaison. Il ne change point : la même puissance que jamais, la même connaissance infinie, la même vigilance, la même disponibilité, la même divinité. Allah est Dieu. L'homme est l'homme. Allah est un. L'homme est nombreux. L'homme ne peut même pas être maître de la planète terre. Et quand il oublie ce fait, et se comporte comme s’il était Dieu, Allah n’hésiterait pas à le lui rappeler par toutes sortes de malheur et de souffrances. Et pourtant Allah demeure « Miséricordieux, Aimant. » (11.90) « N'est-ce pas Lui qui répond à l'angoissé quand il L'invoque, et qui enlève le mal ? » (27.62) « Et si Allah s'en prit aux gens pour ce qu'ils acquièrent, Il ne laisserait à la surface [de la terre] aucun être vivant. Mais Il leur donne un délai jusqu'à un terme fixé. Puis quand leur terme viendra... (Il se saisira d'eux) car Allah est Très Clairvoyant sur Ses créatures. » (35.45) « Allah est plein de pitié, Miséricordieux envers l'humanité. » (2.143) C’est ça la règle. Allah pense même à nos sentiments, indépendamment de nos croyances religieuses. Dans le Coran, nous lisons : « Ô vous qui croyez ! Qu'un groupe ne se raille pas d'un autre groupe : ceux-ci sont peut-être meilleurs qu'eux. Et que des femmes ne se raillent pas d'autres femmes : celles-ci sont peut-être meilleures qu'elles. Ne vous dénigrez pas ni insultez-vous les uns les autres par des surnoms. Mauvais est le nom de l'obscénité après la foi. Et quiconque ne se repent pas... Ceux-là sont les injustes. » (49.11)


Il est donc normal qu'Allah n'aime pas que nous Lui soyons indifférents. Quoi que nous fassions, notre croyance en Allah restera limitée, tout comme notre gratitude envers Lui. Nous ne pourrons jamais remercier nos parents de leur bienveillance, qu'en est-il d'Allah ? Mais si nous ne faisons pas de notre mieux pour remercier Allah, qui devons-nous remercier ?


Allah est grand et veut que l'Homme soit grand lui aussi : en ayant plus de vertus que de vices, en ayant de grandes valeurs, en étant à la hauteur de ses valeurs, en se purifiant. Allah a dit au Prophète Muhammad (pssl) : « Et tu es certes d'une nature formidable. » (68.4) La gratitude est une grande valeur, n’est-ce pas ? La prosternation devant Allah, par exemple, est un honneur pour l'homme, pas une dépréciation ou une humiliation. La prosternation est la glorification d'Allah et la sublimation de la conduite et de l'âme des fidèles.


Quand je crois en Allah, je ne fais, en fait, qu’apporter mon témoignage quant à un fait existant. Je reconnais cela en tant qu’un fait objectif – que j'existe ou non, que je croie ou non. Avant Galilée (1564 – 1642), la plupart des gens croyaient que la terre était plate. Avant Hubble (1889 – 1953), la plupart des scientifiques croyaient qu'il n'y avait qu'une seule galaxie dans le monde. Ce qui devrait être étonnant pour nous, c'est que ce petit cerveau qu'Allah a créé dans nos (petites) têtes en sait déjà tant sur le monde. Ce que nous ne pouvons pas savoir, par contre, eh bien, nous devons le croire. Nous devons admettre que « Et de la connaissance, vous n'avez été que peu doués ». (17.85) Et pourtant, Allah ne veut pas que nous croyions aveuglément en Lui. Comme nous l'avons vu dans les versets ci-dessus, Allah nous appelle à réfléchir, à méditer, à contempler le monde qui nous entoure.


Même quand on est paresseux ou n'avons pas le temps ou les moyens, nous n'avons pas forcément besoin de voyager dans des endroits lointains pour méditer. Juste dans le marché le plus proche, nous trouvons d'innombrables variétés de fruits locaux et importés de toutes les couleurs, formes et goûts. Mais nous tenons souvent cela pour acquis. Un bon croyant de notre temps peut ne pas être capable de plonger dans la mer et de voir par lui-même la vie incroyable des poissons et des plantes marines. Il ne pourra peut-être pas explorer la forêt amazonienne et d'autres jungles ou marcher et faire de la randonnée dans les hautes montagnes ou les glaciers et voir comment les gens, les animaux et les plantes y vivent. Il n'est peut-être pas un neurologue, un cardiologue ou un botaniste, mais lorsqu'il est devant son écran de télévision et autres et qu'il regarde des films documentaires ou lit des livres, il ne peut tout simplement pas s'empêcher de chanter subhanallah (Gloire à Allah) avec son cœur et sa langue. De son petit coin sûr à la maison, il peut méditer sur le vaste espace au-dessus et sur ces faibles créatures vivant dans la nature sauvage parmi les prédateurs et sur ces personnes isolées vivant, dans des conditions météorologiques extrêmes, dans des territoires lointains à l’écart du monde, ou encore sur les cellules de son propre corps… Les leçons apprises de ces méditations ne peuvent que remonter le moral de « quiconque a un coeur, ou prête l'oreille avec une pleine intelligence. » (50.37) Un croyant qui médite ainsi sur la puissance et la connaissance infinies d'Allah ne peut que devenir de plus en plus fort. Et quand les circonstances sont plus fortes que lui (drame personnel, guerre, chômage aigu, maladie, inflation soudaine …), et que le diable et les démons l’entourent de tous côtés, eh bien, cette précieuse connaissance d’Allah le sauve, ne serait-ce que pour dépasser une crise le temps de recouvrer sa force mentale. Et c'est ce que l'on entend par « une guérison et une miséricorde ». Allah dit : « Et Nous révélons du Coran ce qui est une guérison et une miséricorde pour les croyants. » (17.82) Allah « guide vers Lui ceux qui se repentent, ceux qui ont cru et dont les coeurs se tranquillisent à l'évocation d'Allah. En vérité, c'est dans l'évocation d'Allah que les cœurs trouvent le repos ! » (13.27-28)


Réfléchissez-y bien. Combien de fois vous êtes-vous senti fatigué, malade, démoralisé ou déprimé ? Peut-être quelques ou plusieurs fois. Mais combien de fois avez-vous déjà réussi à empêcher que vos jours et vos nuits ne soient rongés comme l'épargne d'un chômeur par le Temps qui passe et nous dépasse ? Jamais. Nous sommes faibles. Nous sommes mortels. Allah est Dieu. Allah n'est pas comme nous. Cela semble évident, pour un croyant du moins, mais nous avons souvent tendance à l'oublier lorsque nous sommes aisés.


Supposons que je me lève au milieu de la nuit et que je pense à l'ensemble du tableau, pas seulement à mes soucis quotidiens et à ma routine, que ressentirais-je ? Eh bien, première chose, même si j'adore Allah pendant les veilles de la nuit, Il est toujours occupé par le reste du monde – tout le temps. « Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent. » (2.255) Pour Allah, la JOURNÉE n’est qu’une – ni soleil ni lune. Même si je faisais ce genre d'effort que beaucoup d'autres ne voudraient pas faire, qu'est-ce que cela ajouterait à Allah ? Tout est symbolique, et Allah aime ça. "Il est indulgent, reconnaissant." (35.30) C'est juste un signe d'amour. C’est Allah « le Pardonneur, l'Aimant. » (85.14) Même la meilleure expression de gratitude ne peut vraiment rendre grâce à Allah pour la moindre de Ses faveurs. Je dois tout à Allah, ma vie plus. Si je suis beau, c'est Allah qui m'a donné ma beauté. Si je suis fort, c'est Lui qui m'a donné ma force. Si je suis intelligent, c'est Lui qui m'a donné mon intelligence. Si je suis riche, c'est Lui qui m'a pourvu. Si je deviens célèbre, c'est Allah qui me le rend. Si j'appartiens à un État riche, démocratique et puissant, c'est aussi une faveur d'Allah. Quoi que je sois, quel que soit l'état dans lequel je me trouve, c'est par la grâce d'Allah. Quel que soit le bien que je fasse, c'est grâce à Lui, c'est par la permission d'Allah. Dans le Coran, nous lisons : « Et tout ce que vous avez comme bienfait provient d'Allah. » (16.53) Et cela inclut l'adoration d'Allah ! « ... et parmi eux il y en a qui devancent [tous les autres] par de bonnes actions, par la permission d'Allah. Telle est la grande faveur ! » (35.32)


C'est à Allah que je dois la vie, c'est pourquoi je le loue, et devant Lui je me prosterne. A Lui et de Lui je dis : Gloire à Allah, louange est à Allah. Il n'y a de divinité digne d'adoration qu'Allah. Allah est Grand. Il n'y a de force et de puissance que par la permission d'Allah, l'Exalté, le Puissant.


QUESTION : si tout en moi appartient à Allah, que me reste-t-il pour m'enorgueillir ? Qu'est-ce que je fais dans ce monde ? Que vaux-je en tant qu'être sur cette terre ? Eh bien, je suis enseignant. Je ne suis pas propriétaire de l'école où je travaille. Mais je peux faire mon travail correctement ; je peux profiter de ma vie d'enseignant ; je reçois mon salaire et j'achète les choses dont j'ai besoin. Et je peux très bien m'en réjouir. Beaucoup de gens ne sont pas propriétaires de leur habitation et pourtant cela ne leur pose aucun problème. Voyez-vous ce que je veux dire ?


Est-ce que je « possède » ma vue et mon ouïe, par exemple ? Allah dit : « A qui appartient l'ouïe et la vue, et qui fait sortir le vivant du mort et fait sortir le mort du vivant ? » (10.31) « Dis : Voyez-vous ? Si Allah vous enlevait l'ouïe et la vue et scellait vos cœurs, quelle divinité autre qu’Allah vous les rendrait ? » (6.46)


Suis-je « propriétaire » de mon corps ? M’appartient-il vraiment ? Allah dit : « Celui que nous amenons à la vieillesse, Nous le renversons dans la création (le faisant revenir à la faiblesse après la force). Ne comprendront-ils donc pas ? » (36.68) « Allah est Celui qui vous a créés faibles ; puis après la faiblesse, Il vous donne la force ; puis après la force, Il vous réduit à la faiblesse et à la vieillesse : Il crée ce qu'Il veut. Il est le Connaisseur, le Puissant. » (30.54) « Et Allah vous crée, puis vous fait mourir, et parmi vous est celui qui est ramené à l'étape la plus abjecte de la vie, de sorte qu'il ne sait rien après (avoir eu) la connaissance. Allah est, certes, Connaisseur, Puissant. » (16.70) « Allah reçoit les âmes au moment de leur mort et cette (âme) qui ne meurt pas (encore) dans son sommeil. Il retient celles à qui Il a décrété la mort, tandis qu'Il renvoie les autres jusqu'à un terme fixé. Il y a certainement là des preuves pour les gens qui réfléchissent. » (39.42)


« Possédons-nous » « notre » eau ? Allah dit : « Que vous en semble ? Si votre eau venait à être absorbée au plus profond de la terre, qui pourrait alors vous apporter de l'eau jaillissante ? » (67.30)


Sommes-nous « les maîtres » de nos récoltes ? Et si Allah envoyait contre elles le déluge et les sauterelles et la vermine ou juste quelques mois de sécheresse ? Lisez, si vous voulez : « Et Nous avons alors envoyé contre eux le déluge, les sauterelles, les poux, les grenouilles et le sang - une succession de signes clairs. Mais ils s'enflèrent d'orgueil et demeurèrent un peuple criminel. » (7.133)


« Dis : Avez-vous pensé, si Allah a fait pour vous la nuit éternelle jusqu'au Jour de la Résurrection, quelle divinité à part Allah qui pourrait vous apporter la lumière ? N'entendrez-vous pas alors ? Dis : Avez-vous pensé, si Allah a fait pour vous le jour éternel jusqu'au Jour de la Résurrection, quelle divinité autre qu'Allah qui pourrait vous apporter une nuit où vous vous reposeriez ? N'observez-vous donc pas ? » (28.71-72) « Dis : Qui donc peut vous servir quelque chose contre Allah, s'Il veut vous faire du mal ou s'Il veut vous faire du bien ? Non, mais Allah est toujours Conscient de ce que vous faites. » (48.11) « Quel est celui qui constituerait pour vous une armée [capable] de vous secourir, en dehors du Tout Miséricordieux ? Les mécréants ne sont que dans l'illusion. » (67.20)


« Et souvenez-vous de la faveur d'Allah envers vous. » (3 .103) « Eh bien, rappelez-vous les bienfaits de votre Seigneur, afin que vous réussissiez. » (7.69)


Oui, pour beaucoup de gens, Allah n'a rien à voir avec notre vie ni notre succès. Mais celles et ceux qui croient en Allah et en l'au-delà veulent savoir comment ils peuvent exprimer au mieux leur gratitude envers Lui.


Eh bien, si je ne peux pas rendre grâce à Allah pour ses innombrables faveurs, je pourrais quand même faire de mon mieux. Le coran est plein d’exemples de ce que je pourrais faire comme adoration. Dans le même temps, je pourrais compléter ceci par rendre service aux gens – à l'humanité. Allah nous dit : « Ne savent-ils pas que Allah est Celui qui accepte le repentir de Ses créatures et prend l'aumône ? » (9.104) Allah prend l'aumône, non pas pour Lui-même, mais pour Ses créatures – croyants et non-croyants. « Allah est Plein de Pitié, Miséricordieux envers l'humanité. » (2.143) « Allah donne des bénédictions sans réserve à qui Il veut. » (24.38), c'est-à-dire aux croyants comme aux non-croyants. « Chacun d’eux Nous fournissons, ceux-ci et ceux-là, de la générosité de ton Seigneur. Et la générosité de ton Seigneur ne peut jamais être murée. » (17.20) Et pourtant Allah me donne, en tant que croyant, la chance (et l'honneur) de faire le bien, de faire la charité, si je le peux, à Ses créatures, par amour pour Lui, en signe de gratitude envers Lui, et je ne dis pas, comme les non-croyants, qui, « quand on leur dit : Dépensez de ce qu'Allah vous a pourvu, ceux qui ne croient pas disent à ceux qui croient : Nourrirons-nous quelqu'un qu’Allah aurait nourri s'Il avait voulu ? Vous n'êtes que dans un égarement évident. » (36.47)


De plus, il se pourrait que je fasse des études supérieures très poussées et accumuler une expérience intéressante, puis obtenir un emploi bien rémunéré et en être fier. Si je perds cet emploi en période de ralentissement économique, que pourrais-je faire alors ? J'ai peut-être un grave problème social ou de santé qui m'empêche de terminer mes études et d'obtenir l'emploi de mes rêves : quelle serait donc la solution ? Certes, la foi ne va pas m’apporter une solution concrète à un problème concret, du moins pas tout de suite, sauf dans le cas de « l'angoissé » quand il invoque Le Seigneur (verset (27.62)). Ce n’est pas parce que je suis « un saint » que je vais marcher sur l’eau ou passer par un trou de sourie. Mais le fait que je crois que mes moyens de subsistance (rizq) et mon âge ('omr) et tout ce qui me concerne sont entre les mains d'Allah, de Dieu, le Seigneur des mondes, cela me procure une certaine sérénité. Quand quelqu'un refuse de m'embaucher ou me licencie, je sais que ce n'est qu'une épreuve pour moi, et que cette personne ou cette entreprise ne peut pas m'empêcher d'obtenir ce que je veux ailleurs, si et quand Allah le veut. Nous avons tous besoin d'une sorte de protection. Les syndicats ont été créés à cet effet. Les soins de santé et toutes sortes d'aides sociales ont été conçus à cette fin. Or il se trouve que le plan de sauvetage le plus généreux, l'aide de l'État la plus aimable, est limité dans le temps. Mais quand on a du mal avec des loyers à payer, avec de la nourriture à acheter à ses enfants..., c'est normal, c'est tout à fait humain, de demander de l'aide aux humains. Nous avons tous besoin de protection. Mais quel est le problème si Allah est mon, notre, votre Protecteur ? Au contraire, c'est notre meilleure assurance ! Allah dit dans le Coran : « Vous n'adorez que des idoles, en dehors d'Allah, et vous forgez un mensonge. Ceux que vous adorez en dehors d'Allah ne possèdent aucune provision pour vous. Cherchez donc votre provision auprès d'Allah, et servez-Le, et rendez-Lui grâce, (car) à Lui vous serez ramenés. » (29.17) « Dis (leur) : Si vous possédiez les trésors de la miséricorde de mon Seigneur, vous les retiendriez sûrement par peur de dépenser, car l'homme est très avare ! » (17.100) « Ou ont-ils même une part dans la Souveraineté ? Alors dans ce cas, ils ne donneraient aux gens même pas le creux d'un noyau de datte. » (4.53) Donc tout ce qui m'arrive, de bon ou de mauvais, est censé être une sorte d'éducation, une bonne éducation, un gentil rappel pour moi. Je devrais donc penser aux autres autant qu'à moi-même. Si j’arrive à juguler ma cupidité, mon avarice et mon égoïsme, cela ne me fera que du bien. Allah dit : « Et quiconque se prémunit contre sa propre avarice, tels sont ceux qui réussissent. » (59.9)


Avez-vous déjà vu un nid ? Y avez-vous pensé ? Si un homme et une femme prennent soin de leur progéniture, ils peuvent espérer en bénéficier dans leur vieillesse. Mais lorsqu'un couple d'hirondelles se donne beaucoup de mal pour faire un nid, puis se donne la peine de nourrir et de protéger leurs petits, ceux-ci vont grandir, devenir matures et s'envoler. Qui peut vraiment remercier ses parents de toute leur gentillesse ? Ceci n'est qu'une miséricorde d'Allah. Dans le Hadith on apprend que : « Allah a réparti la miséricorde en cent parties. Il en conserva quatre-vingt-dix-neuf auprès de Lui et en fit descendre une seule sur terre. C'est grâce à cette partie que les créatures font preuve de miséricorde les unes envers les autres, au point que la bête soulève sa patte de peur d'écraser son petit. »


Je pourrais me dire cela lorsque je suis en mesure de donner ; et quand c’est moi qui ai besoin d'aide ? Eh bien, quand vous voyez un troupeau d'hirondelles, pouvez-vous les différencier, pouvez-vous dire qui est qui ? Allah dit : « Nulle bête marchent sur terre, nul oiseau volant de ses ailes, qui ne soit comme vous en communauté. Nous n'avons rien négligé dans le Livre (de Nos décrets). Puis, c'est vers leur Seigneur qu'ils seront ramenés. » (6.38) Nous ne pouvons probablement pas le dire, à moins que nous n’utilisions des caméras spéciales, mais ces hirondelles se connaissent, d'une manière ou d'une autre, et chacune connaît son Dieu. « N'as-tu pas vu qu'Allah est glorifié par tous ceux qui sont dans les cieux et sur la terre ; ainsi que par les oiseaux déployant leurs ailes ? Chacun, certes, a appris sa façon de L'adorer et de Le glorifier. Dieu sait parfaitement ce qu'ils font. » (24.41) De même, quand je me lève au milieu de la nuit et que je vais dans la cuisine pour prendre un verre d'eau, qui s'en rend compte ? Si je rends culte à Allah au milieu de la nuit, qui le sait ? Personne d'autre qu'Allah, qui dit : « Votre Seigneur est le plus conscient de ce qui est dans vos pensées. Si vous êtes bons, alors Il a toujours pardonné à ceux qui se tournent (vers Lui). » (17.25) « Ceux qui évitent les énormités du péché et des abominations, sauf les offenses involontaires - (pour eux) ton Seigneur est d'une grande miséricorde. C'est Lui qui vous connaît le mieux quand Il vous a produits de terre, et aussi quand vous étiez des embryons dans les ventres de vos mères. Ne vantez pas vous-mêmes votre pureté ; c'est Lui qui connaît mieux ceux qui [Le] craignent. » (53.32) « Et toi (Mohammad) n'es occupé d'aucune affaire et tu ne récites pas un passage du Coran, et vous (l'humanité) n'accomplissez aucun acte, sans que Nous soyons témoin au moment où vous y êtes engagé. Et pas le poids d'un atome sur la terre ou dans le ciel n'échappe à ton Seigneur, ni ce qui est plus petit ou plus grand que cela, mais c'est (écrit) dans un Livre clair. » (10.61) « Demandez pardon à votre Seigneur et tournez-vous vers lui repentant. Il vous assurera une vie heureuse ici-bas jusqu’au terme fixé, et Il accordera Sa grâce à tout homme de mérite. » (11.3) Oui, dirait-on, ça se comprend, mais, quand même, cela ne répond pas à la question ! Et quand j'ai besoin d'aide, je fais quoi ?


Eh bien, quand je fais quelque chose de bien, j'établis une connexion directe avec mon Seigneur, avec Allah le Tout-Puissant. Je fais part de mon intérêt à la parole d’Allah et Il se soucie de mes moindres souffrances – même quand, à cause de mes malheurs apparemment sans fin, j'ai le sentiment qu'Allah m'a complètement oublié. La vérité est que personne ne sait quand le salut viendra ni à quoi il ressemblera. Même les prophètes ne peuvent pas savoir. Allah dit : « Quand les messagers faillirent perdre espoir (et que leurs adeptes) eurent pensé qu'ils étaient dupés voilà que vint à eux Notre secours. Et furent sauvés ceux que Nous voulûmes. Et Notre colère ne peut être épargnée par les coupables. » (12.10) « Et (mentionnez) Dhu'n-Nun (Jonas), lorsqu'il s'en alla en colère, Il pensa que Nous N'allions pas l'éprouver. Puis il fit, dans les ténèbres, l'appel que voici : Il n'y a pas d'autre divinité que Toi. Pureté à Toi. J'ai été un malfaiteur. Alors Nous l'exauçâmes et le sauvâmes de son angoisse. C'est ainsi que nous sauvons les croyants. » (21.87-88) Allah a dit cela à Son dernier Prophète ! Quid de nous qui souvent désespérons si vite. ?


L’épreuve n'est pas facile. Ce n'est pas facile de voir les gens vous mépriser parce que vous êtes sans emploi, célibataire, malade ou autre. Ce n'est pas facile de voir les gens vous abandonner à l'heure du besoin. Ce n'est pas facile de vous voir fermer toutes les portes au nez. C'est douloureux de se sentir seul, de se voir comme un oiseau sans ailes et sans queue. Mais l'épreuve n'est pas la même pour tous. Comme dans le Hadith, un homme a dit : « O Messager d'Allah ! Laquelle des personnes est la plus sévèrement éprouvée ? Il dit : Les prophètes, puis ceux qui sont les plus proches d'eux, puis ceux qui sont les plus proches d'eux. Un homme est éprouvé selon sa religion ; s'il est ferme dans sa religion, alors ses épreuves sont plus sévères, et s'il est faible dans sa religion, alors il est mis à l'épreuve selon la force de sa religion. Le serviteur continuera à être mis à l'épreuve jusqu'à ce qu'il soit laissé marcher sur la terre sans aucun péché. » Également dans le Hadith : « Le croyant n'est pas touché par une épine ou par quelque chose de plus grave sans qu'Allah ne l'élève d'un degré et ne lui enlève un péché » Ibn Mas'oud, un compagnon du Prophète (pssl), a rapporté : « J'ai rendu visite au Prophète (pssl) alors qu'il souffrait de fièvre. J'ai dit : ‘Vous semblez souffrir énormément, ô Messager d'Allah.’ Le Prophète (pssl) a répondu : ‘Oui, je souffre autant que deux personnes.’ J'ai dit : ‘Est-ce parce que vous avez une double récompense ?’ Il a répondu qu'il en était ainsi et a ensuite dit : ‘Aucun musulman n'est affligé par un mal, que ce soit la piqûre d'une épine ou quelque chose de plus (douloureux que cela), mais Allah fait ainsi tomber ses péchés tout comme un arbre perd ses feuilles’. » Aïcha a déclaré que le Prophète (pssl), (son mari), a dit : « Si une épine pique un croyant ou qu'il est blessé plus que cela, alors c'est une expiation pour ses péchés. » Quoi de plus clair que les Hadiths ci-dessus ?


Allah n'éprouve personne sauf dans un but que Lui seul connaît. Le par l'affliction signifie la perte et la souffrance. Dans le Hadith on apprend que « Le croyant fort est meilleur et plus aimé d'Allah que le croyant faible, et en chacun d'eux il y a du bien. » Mais est-ce que le malheur n'arrive qu'aux croyants forts ? Qu'en est-il des gens ordinaires, croyants ou non-croyants, qui sont durement frappés par les inondations, la sécheresse, les incendies, la guerre, l'épidémie, le chômage, l’inflation… ? Allah dit : « Il lance la foudre et frappe qui Il veut pendant qu'ils se disputent (dans le doute) au sujet d'Allah, alors qu'il est redoutable en Sa force. » (13.13)


À l'heure actuelle, des millions d'âmes ont trouvé la mort à cause de la Covid-19. Combien de personnes en ont tiré une leçon ? Combien de personnes ont perdu non seulement un revenu ou un être cher, mais leur vie ? Dans le Coran, nous lisons : « Si vous souffrez, eh bien ! ils souffrent comme vous souffrez et vous espérez d'Allah ce qu'ils ne peuvent espérer. Allah est Omniscient, Sage. » (4.104) « Les hommes s'imaginent-ils qu'ils seront laissés (à l'aise) parce qu'ils disent : Nous croyons, et ne seront pas testés par l'affliction ? Certes, Nous avons testé ceux qui ont vécu avant vous. Ainsi Allah connaît ceux qui sont sincères, et connaît ceux qui feignent. » (29.2-3) « Si vous avez reçu un coup, le peuple (incrédule) a reçu un coup semblable. Ainsi faisons-Nous alterner les jours (bons et mauvais) parmi les gens, et ce afin qu'Allah reconnaisse ceux qui croient et puisse choisir parmi vous des témoins, et Allah n'aime pas les injustes. » (3.140) « Pourquoi Allah vous infligerait-il un châtiment si vous êtes reconnaissants et croyants ? Allah a toujours été Reconnaissant et Omniscient. » (4.147)


C'est cet espoir (d'obtenir l'amour et l'agrément d'Allah) qu'il faut chérir. Allah rappelle aux fidèles que « ... La miséricorde de ton Seigneur vaut mieux, que ce qu’ils amassent. » (43.32) « Cette vie d'ici-bas n'est qu'amusement et jeu. La Demeure de l'au- delà est assurément la vraie vie. S'ils le savaient. » (29.64) Cela est pour les croyants uniquement. Même si j'avais tout ce que je voulais, mon bonheur ne serait ni devrait être total dans un monde où je ne suis pas seul, où il y a des millions de sans-abris, d'orphelins, de mères seules sans revenus...


De plus, l’épreuve a un prix. Lorsque vous réussissez une épreuve, vous gagnez – à terme – à la fois la vie du monde et celle de l'au-delà. Si je ne me soucie pas de l'au-delà, si je veux uniquement la réussite sociale, le bonheur, la joie et le plaisir éternel ici et maintenant, pourquoi Allah devrait-il se soucier de moi ?


Allah dit : « Dis : Qui a interdit l'ornement d'Allah qu'Il a produit pour Ses serviteurs, et les bonnes choses de Sa provision ? Dis : Tel, au Jour de la Résurrection, ne sera que pour ceux qui ont cru pendant la vie du monde. Ainsi détaillons-nous Nos révélations pour les gens qui ont la connaissance. » (7.32) « Alors Allah leur a donné la récompense du monde et la bonne récompense de l'au-delà. Allah aime ceux dont les actions sont bonnes. » (3.148)


Allah dit encore : « Qu'ont-ils (à craindre) s'ils croient en Allah et au Jour dernier et dépensent (correctement) de ce qu'Allah leur a accordé, alors qu'Allah est toujours au courant d'eux (et de tout ce qu'ils font). Allah ne fait de tort même pas au poids d'une fourmi ; et s'il y a une bonne action, Il la doublera et donnera (à l'auteur) de Sa présence une immense récompense. » (4.39-40) « C'est parce qu'ils ont choisi la vie du monde plutôt que l'au-delà, et parce qu'Allah ne guide pas les gens mécréants. » (16.107)


Si nous sommes vexés à cause de nos conditions de vie matérielles, dans le Coran on lit : « Que de jardins et de sources d'eau ils ont laissés derrière eux, Et que de champs de maïs et de superbes résidences, Et que de choses agréables où ils se sont délectés ! Il en fut ainsi, et Nous en avons fait un héritage pour les autres. » (44.25-28) Ces personnes, qui vivaient il y a des milliers d'années, avaient tous les signes du succès et de réussite. Ils avaient tout le confort matériel qu'ils escomptaient. Quand ils sont décédés, eh bien, ils ont tout laissé derrière eux. Allah dit : « Mangez de ce qu'Allah vous a accordé comme nourriture licite et bonne, et observez votre devoir envers Allah en qui vous croyez. » (5.88) « O vous qui croyez ! Observez votre devoir envers Allah. Et que chaque âme regarde ce qu'elle envoie avant pour demain. Et observez votre devoir envers Allah, car Allah est Informé de ce que vous faites. » (59.18) « Cette vie d'ici-bas n'est qu'amusement et jeu. La Demeure de l'au- delà est assurément la vraie vie. S'ils le savaient. » (29.64) « Le jour où chaque âme se trouvera confrontée à tout ce qu'elle aura fait de bien et tout ce qu'elle aura fait de mal ; elle souhaitera qu'il y ait entre elle et ce mal une longue distance ! Allah vous met en garde à l'égard de Lui-même. Et Allah est plein de pitié pour (Ses) serviteurs. » (3.30)


C'est de la prédication, oui. Mais le fait est que même ceux qui ne croient pas en l'au-delà ne sont pas vraiment sûrs de ce qu'il va advenir d’eux après la mort. Allah dit : « Si tu obéis à la plupart de ceux qui sont sur terre, ils t'égareraient loin du chemin d'Allah. Ils ne suivent rien d'autre qu'une opinion, et ils ne font que deviner. » (6.116) « La plupart d'entre eux ne suivent que des conjectures. Assurément, les conjectures ne peuvent en aucun cas prendre la place de la vérité. Allah est Conscient de ce qu'ils font. » (10.36)


Même si le marchand de glaces ne vous voit pas, vous ne pouvez pas simplement prendre la glace et partir. Il vous donne ce que vous voulez, alors vous le payez. Même si Allah ne nous avait rien demandé du tout, nous devrions cependant Lui être reconnaissants pour tout ce qu'Il nous donne -d'autant plus que « Ceux qui sont dans les cieux et la terre L'implorent. Chaque jour, Il accomplit une oeuvre nouvelle. » (55.29) « Ne voyez-vous pas comment Allah vous a rendu utile tout ce qui est dans les cieux et tout ce qui est sur la terre et vous a comblés de Ses bienfaits apparents et cachés ? » (31.20)


Combien de personnes connaissent le fleuve Mississipi ? Combien de personnes connaissent les affluents qui se jettent dans le Mississipi, l'Amazone ou le Nil ? La plupart des gens soit ne savent pas soit ne s'en soucient guère. Mais Allah sait et s'en soucie. « Pas une feuille ne tombe sans qu'Il le sache, pas un grain au milieu des ténèbres de la terre, rien de frais ou de sec, qui ne soit noté dans un dossier clair. » (6.59) Eh bien, dites cela aux experts qui disent qu'ils craignent que le stockage de données ne devienne de plus en plus difficile en raison de l'expansion mondiale d'Internet.


Beaucoup peuvent imaginer le passé et l'avenir, mais l'imagination ne vaut pas la vérité. Allah dit par exemple : « Assurément, les conjectures ne peuvent en aucun cas remplacer la vérité. » (10.36) Allah non seulement « imagine », Il sait. En écrivant un roman, par exemple, il se peut qu’un romancier oublie un détail. Il peut oublier qu'un personnage avait un cheval, un chapeau ou qu’il avait reçu un coup de fil. Mais Allah n'oublie rien. « ... et ton Seigneur n'oublie jamais. » (19.64) « Mon Seigneur ne s'égare ni n'oublie. » (20.52) « Et pas le poids d'un atome sur la terre ou dans le ciel n'échappe à ton Seigneur, ni ce qui est inférieur ou supérieur, mais c'est (écrit) dans un Livre clair. » (10.61)


Les humains ne connaîtront peut-être jamais le gars qui a déclenché cet incendie de forêt dévastateur ou les gars cupides qui ont contribué à la sécheresse dans un endroit à cause de la déforestation sauvage et de l'exploitation forestière illégale. Allah les connaît tous. « Ne croyez pas qu'Allah ignore ce que font les méchants. » (14.42) L'État peut ne pas connaître tous les citoyens qui ont besoin d'une aide urgente. Allah les connaît tous. Il dit : « (L'aumône est) pour les pauvres qui sont à l'étroit pour la cause d'Allah, qui ne peuvent pas voyager dans le pays (pour le commerce). L'homme irréfléchi les considère riches à cause de leur retenue. Ils ne mendient pas les hommes avec importunité. Et tout ce que vous dépensez de bien, eh bien ! Allah le sait. » (2. 273) « Et que ta main ne soit pas enchaînée à ton cou, ni ne l'ouvre avec une ouverture complète, de peur que tu ne t'assieds, réprimandé, dénudé. En vérité ton Seigneur étend Ses dons largement à qui Il veut ou les accorde avec parcimonie. Il a toujours été connaisseur, voyant de Ses créatures. » (17.29-30)


Avant de demander pourquoi Allah ne vient pas au secours de ceux qui en ont un besoin urgent (ce qui n’est pas toujours vrai), il faut plutôt se demander : pourquoi Allah prend-il la peine de compter chaque feuille qui tombe, chaque grain au milieu des ténèbres de la terre, chaque frais ou sec dans un endroit où personne ne va, où la vie est impossible ? Nous pouvons comprendre pourquoi Allah tient compte de nos moindres pensées et actions. Il dit : « … chaque âme sera rétribuée selon ce qu'elle aura acquis. Ce jour-là, pas d'injustice, car Allah est prompt dans [Ses] comptes. » (40.17) « Et Il pardonne beaucoup » (42.30) Mais quel livre peut contenir toute cette quantité inimaginable d'informations sur les personnes, les animaux, les plantes, les rivières, les montagnes, les déserts, les glaciers, les nuages, les cultures, les moyens de subsistance – pour ne parler que de notre terre... ? Quelle intelligence peut traiter toutes ces données ? « Allah est prompt dans Ses comptes. » (14.51) « Ne sais-tu pas qu'Allah connaît tout ce qui est dans le ciel et sur la terre ? Tout ceci est dans un Livre, et cela est bien facile pour Allah. » (22.70)


Et pourquoi tout ça ? Une raison probable est que l’intérêt et l’attention accordés à ces données font partie de la bonté d'Allah. Allah « a créé les cieux et la terre et qui, du ciel, a fait descendre l'eau grâce à laquelle Il a produit des fruits pour vous nourrir. Il a soumis à votre service les vaisseaux qui, par Son ordre, voguent sur la mer. Et Il a soumis à votre service les rivières. Et pour vous, Il a assujetti le soleil et la lune à une perpétuelle révolution. Et Il vous donne tout ce que vous Lui demandez, et si vous voulez compter la bonté d'Allah, vous ne pouvez pas la compter. » (14.32-34)


Quand je pense à tout cela, je me dis : hé, si Allah se soucie tellement de tant de choses, de tant de personnes, mon humble personne incluse, comment ne puis-je pas me soucier de Lui ? Avec quel visage retournerai-je à Allah s'Il n'est pas satisfait de moi ? Sera-t-Il content que je sois revenu vers Lui ? Sera-t-Il heureux de me revoir ? Dans le Coran, je lis : « Ce sont ceux-là qui mécroient aux révélations de leur Seigneur et à la rencontre avec Lui. C'est pourquoi leurs œuvres sont vaines et, au Jour de la Résurrection, Nous ne leur accordons aucun poids. » (18.105) « Allah ne leur parlera ni ne les regardera le Jour de la Résurrection, et Il ne les fera pas grandir... » (3.77) Ne devrais-je donc pas respecter Allah MAINTENANT afin qu'Il me respecte ALORS ? Allah dit : « Ils ont oublié Allah, alors Il les a oubliés. » (9.67) « [Allah lui] dira : "De même que Nos révélations te sont parvenues mais tu les as oubliées, ainsi aujourd'hui tu es oublié. » (20.126) Si j'aime une chanson, par exemple, je pourrais être tenté de la chanter à longueur de journée, mais qu'en est-il d'Allah, qui dit : « Souvenez-vous donc de Moi, Je me souviendrai de vous. Remerciez- Moi et ne soyez pas ingrats envers Moi. » (2.152) « Et ne soyez pas comme ceux qui ont oublié Allah, c'est pourquoi Il leur a fait oublier leurs âmes. » (59.19) « Et quand vous aurez achevé vos rites, alors invoquez Allah comme vous invoquez vos pères, et plus ardemment encore. » (2.200) « … qui, debout, assis, couchés sur leurs côtés, invoquent Allah et méditent sur la création des cieux et de la terre (disant) : Notre Seigneur ! Tu n'as pas créé cela en vain. Gloire à Toi ! » (3.191)


Quand j'ai tout ce que je veux, je pourrais être complaisant dans ma relation avec le Seigneur ; et quand tout sera fini, quand je ne pourrai plus jamais revenir dans ce monde, je dirais probablement : « Oh, si seulement j’avais préparé ma vie (éternelle) ! » (89.24) « Hélas pour moi ! Comme j'aurais aimé n'être que poussière ! » (78.40) Et il me serait dit : « Tu étais dans l'insouciance de cela. Eh bien, Nous ôtons ton voile ; ta vue est perçante aujourd'hui. » (50.22) « Lis ton livre. Aujourd'hui, tu te suffis d'être ton propre comptable. » (17.14) « Vous avez gaspillé vos biens dans la vie du monde et y avez cherché du réconfort. Aujourd'hui, vous êtes récompensés par le châtiment avilissant, pour l'orgueil dont vous vous enfliez injustement sur terre, et pour votre perversité. » (46.20) « Ne vous ai-Je pas chargé, ô fils d'Adam, de ne pas adorer le diable - Il est votre ennemi déclaré ! - Mais que vous m'adoriez ? Voilà un chemin bien droit. Et il a très certainement égaré un grand nombre d'entre vous. Ne raisonniez-vous donc pas ? » (36.60-62)

Lorsque nous sommes mis à l'épreuve par l'affliction, nous pensons tout de suite à la délivrance. Mais l’épreuve est, paradoxalement, dans le meilleur intérêt de l'homme. Cela a pour but d'ouvrir nos yeux à la vérité de notre existence dans ce monde. C'est pourquoi Allah dit : « Et si Allah élargissait la provision pour [tous] Ses serviteurs, ils se rebelleraient sûrement sur la terre, mais Il fait descendre avec mesure ce qu'Il veut. » (42.27) En d'autres termes, Allah veut nous sauver de nos convoitises et de nos illusions. Il dit : « Est-ce que celui qui s'appuie sur une preuve claire venant de son Seigneur est comparable à ceux pour qui le mal qu'ils font est embelli tandis qu'ils suivent leurs propres convoitises ? » (47.14)


Beaucoup de choses ont changé dans le monde au fil du temps, mais beaucoup de choses chez l'homme sont restées plus ou moins les mêmes. L'homme tue toujours l'homme et c’est toujours l'homme qui sauve l'homme de la mort. Pensez à ce verset : « Allah (lui-même) est témoin qu'il n'y a de Dieu que Lui. Et les anges et les hommes de science (aussi sont témoins). Il est le Mainteneur de la justice. Point de divinité à part Lui, le Puissant, le Sage ! » (3.18) Il y a donc justice humaine (justice des hommes) et justice divine. Un aspect de cette justice divine dans ce monde d’ici-bas est que nous voyons tous qu'Allah ne pourvoit pas les croyants uniquement. Dans le Coran, nous lisons : « Et il n'y a pas une bête sur terre mais sa subsistance dépend d'Allah, Il connaît sa demeure et son dépositaire ; tout est dans un Livre explicite. » (1.6) (... Cela concerne aussi bien les croyants que les non-croyants !) « Quiconque désire [la vie] immédiate Nous nous hâtons de donner ce que Nous voulons à qui Nous voulons. Puis, Nous lui assignons l'Enfer où il brûlera méprisé et repoussé. Et ceux qui cherchent l'au-delà et fournissent les efforts qui y mènent, tout en étant croyants... alors l'effort de ceux-là sera reconnu. Nous accordons abondamment à tous, ceux-ci comme ceux- là, de la bonté de ton Seigneur. Et la bonté de ton Seigneur ne peut jamais être murée. » (17.18-20) C'est ce que signifie le mot « justice » (en arabe Al-Quist) dans le verset « Il est le Mainteneur de la justice » (3.18) C’est la justice divine. En d’autres termes, c’est un exemple pour l’Homme ; c'est ce qu'Allah voudrait que l'homme fasse sur terre. Allah dit : « Allah aime les équitables » (49.9) « Nous avions proposé aux cieux, à la terre et aux montagnes la responsabilité (de porter les charges de faire le bien et d'éviter le mal). Ils ont hésité à la porter et en ont eu peur, alors que l'homme s'en est chargé. » Dit autrement : « Nous avons offert la confiance aux cieux, à la terre et aux collines, mais ils ont hésité à la porter et en ont eu peur. Et l'homme l'a assumée. » (33.72) Quelle est donc cette « confiance » (en arabe amana) ? C'est le fait « que les gens établissent la justice » (57.25) Expliqué dans le Coran : « Et Il a établit la balance, afin que vous ne transgressiez pas dans la pesée. » (55.7-8) « Et donnez la pleine mesure quand vous mesurez ; et pesez avec une balance exacte. C'est mieux [pour vous] et le résultat en sera meilleur. » (17.35) « Observez [toujours] strictement la mesure, et ne faussez pas la pesée. » (55.9) « Donnez la pleine mesure, et ne soyez pas de ceux qui donnent moins (que ce qui est dû). Et pesez avec la vraie balance. N'abusez pas les gens dans leurs biens, et ne commettez pas de désordre et de corruption sur terre. » (26.181-183) « Malheur aux fraudeurs qui, lorsqu'ils font mesurer pour eux-mêmes exigent la pleine mesure, et qui lorsqu'eux-mêmes mesurent ou pèsent pour les autres, [leur] causent perte. Ceux-là ne pensent-ils pas qu'ils seront ressuscités, en un jour terrible, le jour où (toute) l'humanité se tiendra devant le Seigneur des mondes ? » (83.1-6) « O vous qui croyez ! (...) aidez-vous les uns les autres à la justice et au devoir pieux. Ne vous aidez pas les uns les autres au péché et à la transgression, mais gardez votre devoir envers Allah. » (5.2) « Ô vous qui croyez ! Soyez fidèles à la justice, témoins d'Allah, même si cela est contre vous-mêmes ou contre (vos) parents ou (votre) parenté, qu'il s'agisse d'un homme riche ou d'un pauvre homme, car Allah a priorité sur eux deux (et Il est plus connaisseur de leur intérêt que vous). Ne suivez donc pas la passion, afin de ne pas dévier de la justice. Si vous portez un faux témoignage ou si vous le refusez, alors Allah est toujours informé de ce que vous faites. » (4.135) « O vous qui croyez ! Soyez des témoins inébranlables d'Allah dans l'équité, et ne laissez pas la haine de qui que ce soit vous séduire par le fait que vous n'agissez pas avec justice. Pratiquez l'équité : cela est plus proche de la piété. Observez votre devoir envers Allah. Car Allah est certes Informé de ce que vous faites. » (5.8) « ... Et si tu juges, alors juge entre eux en équité. Car Allah aime ceux qui jugent équitablement. » (5.42) « Allah vous ordonne de restituer les dépôts à leurs propriétaires, et, si vous jugez entre les hommes, que vous jugez avec justice. » (4.58) « Et si deux groupes de croyants se battent, alors faites la paix entre eux. Si l'un d'eux se rebelle contre l'autre, combattez le groupe qui se rebelle, jusqu'à ce qu'il se conforme à l'ordre d’Allah. Réconciliez-les avec justice et soyez équitables car Allah aime les équitables. » (49.9)


« O vous qui croyez ! Lorsque vous contractez une dette à terme fixe, notez-la par écrit. et qu'un scribe l'écrive, entre vous, en toute justice; un scribe n'a pas à refuser d'écrire selon ce qu’Allah lui a enseigné; qu'il écrive donc, et que celui qui contracte la dette dicte, et qu'il observe son devoir envers Allah son Seigneur, et n'en diminue rien. Si celui qui doit la dette est peu intelligent, ou faible, ou incapable lui-même de dicter, alors que le gardien de ses intérêts dicte en toute justice. Et appelez à témoin, parmi vos hommes, deux témoins. Et si deux hommes ne sont pas (à portée de main) alors un homme et deux femmes, de ceux que vous approuvez comme témoins, de sorte que si l'une se trompe (par oubli), l'autre se souviendra. Et les témoins ne doivent pas refuser lorsqu'ils sont convoqués Ne vous lassez pas d'écrire la dette, ainsi que son terme, qu'elle soit petite ou grande : c'est plus équitable aux yeux d'Allah et plus sûr pour le témoignage, et plus susceptible de dissiper le doute entre vous ; sauf dans le cas où il s'agit de marchandises réelles que vous transférez entre vous de main en main. Dans ce cas, ce n'est pas un péché pour vous si vous ne l'écrivez pas. Et ayez des témoins lorsque vous faites une transaction entre vous ; et qu'il ne soit fait aucun mal au scribe ou au témoin. Si vous le faisiez, cela serait une perversité en vous. Observez votre devoir envers Allah. Allah vous enseigne. Et Allah est connaisseur de toutes choses. » (2.282)


« Prouvez les orphelins jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge nubile ; puis, si vous les trouvez de bon jugement, livrez-leur leur fortune ; et ne la dévorez pas en gaspillant et en hâte de peur qu'ils ne grandissent. Quiconque (des gardiens) est riche, qu'il s'abstienne généreusement (de prendre les biens des orphelins) ; et quiconque est pauvre, alors qu'il y puise une quantité convenable, à titre de rémunération de tuteur.) Et quand vous livrez leur fortune à des orphelins, prenez des témoins à leur encontre. Allah suffit comme Juge. » (4.6) « Et donnez aux orphelins leurs biens ; n'y substituez pas le mauvais au bon ni n'absorbez leur richesse dans votre propre richesse. Ce serait un grand péché. » (4.2)


« Que soit issue de vous une communauté qui appelle au bien, ordonne le convenable, et interdit l'indécence. Car ce seront eux qui réussiront. » (3.104) « C'est beau ce qu'Allah vous exhorte. Allah est toujours Auditeur, Voyant. » (4.58)


D'où l'importance de la loi et de l'ordre (d'ÉTAT). Le calife Othman Ibn Affan (576/573 – 656) a dit : « Allah enlève avec le souverain ce qui n'est pas atteint grâce au seul Coran » (C'est parce que certaines personnes obéissent aux règles par crainte du souverain plutôt que du Coran.) L'ordre est d’une importance capitale. Si les gens ne peuvent pas vivre en paix et en sérénité, la plupart d’entre eux ne peuvent pas accomplir leurs deux missions principales sur terre : la gratitude envers le Créateur et la solidarité entre les humains.


Et cela l’homme l'a toujours fait, aussi bien dans les systèmes tribaux qu’étatiques. Allah dit : « Et si Allah n'avait pas repoussé certains hommes par d'autres, la terre aurait été corrompue. Mais Allah est un Seigneur de bonté envers (Ses) créatures. » (2.251) C’est ainsi que nous avons eu des lois ; nous avons un pouvoir judiciaire (justice formelle) et nous avons, en principe au moins, une justice sociale.


On peut se demander : si Allah est si « catégorique » sur la justice, pourquoi rend-Il les gens si différents les uns des autres en termes de couleur, de santé physique et de forme, de conditions de vie matérielles, etc., etc. ? Oui, effectivement, c'est bien Allah qui est derrière ces différences. Il dit : « Regarde comment Nous favorisons certains sur d’autres. Et dans l’au-delà, il y a des rangs plus élevés et plus privilégiés. » (17.21) Les différences sont bien là – si ce n’est pas ici et maintenant, dans la vie du monde d’ici-bas, elles seront en tout cas là et visibles dans l'Au-delà. Alors toléreriez-vous ces différences dans ce monde (qui ne sont d’ailleurs que temporaires) ou celles de l'Au-delà (qui seront éternelles) ? Si vous y réfléchissez un peu plus objectivement, vous vous demanderez si ces différences mondaines ne sont pas en réalité la meilleure preuve, la preuve la plus claire, qu'il y a bel et bien une vie après la mort et que toutes nos différences ici ne sont qu'une épreuve pour chacun d'entre nous.


Plus concrètement, Allah ne m'a pas rendu pauvre ou faible pour que les autres se délectent de ma misère et de mes souffrances, mais pour que vous, quand Allah vous en donne les moyens, m'aidiez d'une manière digne en tant qu'être humain ayant une âme humaine comme vous. Ce faisant, vous exprimez votre gratitude envers Allah et, en même temps, votre solidarité envers l'humanité. Bien sûr, Allah pourrait m'aider directement, Il aurait pu vous mettre à ma place, mais qu'est-ce qui fait de vous un humain si vous ne m'aidez pas ? Qu'est-ce qui fait de moi un humain si je ne vous aide pas ? Dirais-je alors : « Devons-nous nourrir ceux qu'Allah, s'Il le voulait, nourrirait ? » (36.47)


Cependant, on n'est pas censé être « angélique ». Un individu a sa part de responsabilité, l'État/la communauté a la sienne. Même si vous avez les moyens d'aider tout le monde autour de vous, vous n'êtes pas censé donner tout votre argent aux gens, ce n'est pas votre devoir ; et votre argent n'est pas entièrement à vous. Le Prophète (pssl) a dit à quelqu'un qui voulait léguer tous ses biens : « Un tiers (c'est bien), mais c'est encore trop, car vous feriez mieux de laisser vos héritiers riches que de les laisser pauvres, mendiant les autres. Tout ce que vous dépensez sera considéré comme une sadaqa (une charité) pour vous, même la bouchée de nourriture que vous mettez dans la bouche de votre femme. » Alors faites simplement ce que vous pouvez, manifestez votre humanité. Allah dit : « Et que ta main ne soit pas enchaînée à ton cou, et ne l'étend pas non plus trop largement, sinon tu te trouveras blâmé et chagriné. Il a toujours été connaisseur, voyant de Ses serviteurs. » (17.29-30) « Et ceux qui, quand ils dépensent, ne sont ni prodigues ni avares ; mais se tiennent au juste milieu. » (25.67) Soyez juste un humain, traitant les nécessiteux avec humanité.


La pandémie de la Covid a fait que des États européens riches ont demandé de l'aide, et personne, moi d'abord, n'y voit une quelconque honte. « Ô hommes ! Vous êtes les pauvres dans votre relation avec Allah. Et Allah ! Il est l'Absolu, Le Digne de louange. » (35.15)


La solidarité humaine, tant au niveau individuel que collectif, rend les humains beaux ; il répand l'amour parmi les Hommes honnêtes. En Argentine, par exemple, de nombreuses personnes ont échangé des biens ou des services pendant la crise économique. La crise peut disparaître, mais les bons souvenirs restent avec soi pour toute la vie. A Gruissan, village français, les pêcheurs ont établi une sorte de tribunal pour partager équitablement les zones de pêche et ils enregistrent tout ce qui concerne leurs activités de pêche dans des registres spéciaux, certains vieux de plusieurs siècles. C'est incroyable, et tout est humain. Au Maroc, aussi, on a eu un système un peu similaire pour le partage de l’eau dans les anciennes médinas. Certaines personnes bienveillantes récupèrent la nourriture inutilisée dans les restaurants et les hôtels, au lieu de la laisser jeter, et l'utilisent pour nourrir les personnes dans le besoin. D'autres font de gros efforts pour réduire la pollution plastique et autre des océans et des rivières... Bref, je ne peux pas énumérer tout le bon travail accompli par tant de personnes à travers le monde. Tout cela est humain et tout cela est merveilleux ! Même en temps de guerre, vous avez des personnels de santé qui risquent leur vie pour sauver les gens du danger. Vous avez aussi beaucoup de gens qui donnent de l'argent ou quoi que ce soit pour s'occuper des animaux. Comme je l'ai dit, Allah est grand et veut que l'homme soit grand aussi. Tout au long de l'histoire islamique, de nombreux musulmans l'ont parfaitement compris. Il y a toujours eu l'institution des Waqf, qui collecte les dons des donateurs et les dépense, selon les souhaits de chaque donateur, pour la scolarité, pour des projets de pont/route/puits d'eau, etc. L'État lui-même est une forme de solidarité dans le sens où il perçoit des impôts et ainsi de suite et les utilise pour les dépenses publiques sur les questions d’intérêt général. Lorsqu'une ville est rasée par un tremblement de terre ou une tornade, pauvres et riches sont touchés. Tous les riches n'ont pas de jets privés. Beaucoup ont besoin de routes, de ponts et d'écoles pour leurs enfants, et l'État est là pour les servir. Mais l'État ne peut pas tout faire. Il se peut que les calamités soient un moyen de rappeler ce fait à l'homme.


Bien sûr, mon état peut me donner des bons d'alimentation, des allocations de chômage ou toute sorte d'aide en compensation de la perte d'emploi, etc. Et si je perdais la vie à cause de la Covid-19 ou d’un ouragan ou des crues-éclair, etc. ? Allan peut me donner une autre vie après la mort. Aucun État ne peut faire cela. Beaucoup de gens sont reconnaissants pour le simple fait qu'ils ont survécu à une catastrophe. Dans le Coran nous lisons : « N'as-tu pas su (l'histoire de) celui qui, parce qu’Allah l'avait fait roi, argumenta contre Abraham au sujet de son Seigneur ? Abraham a dit : Mon Seigneur est Celui qui donne la vie et cause la mort. L'autre dit : Moi aussi, je donne la vie et la mort. Abraham dit : Allah fait lever le soleil à l'Est, fais-le donc lever à l'Ouest. » (2.258) Nous lisons aussi ceci : « Est-ce eux qui répartissent la miséricorde de ton Seigneur ? C'est Nous qui avons réparti entre eux leur subsistance dans la vie présente et qui les avons élevés en grades les uns sur les autres, afin que les uns prennent les autres à leur service. La miséricorde de ton Seigneur vaut mieux, cependant, que ce qu'ils amassent. » (43.32) « Cette vie d'ici-bas n'est qu'amusement et jeu. La Demeure de l'au- delà est assurément la vraie vie. S'ils savaient ! » (29.64) « Tout ce que vous possédez s'épuisera, tandis que ce qui est auprès d’Allah durera. Et Nous récompenserons ceux qui ont été constants en fonction du meilleur de ce qu'ils faisaient. » (16.96) « Ne sais-tu pas que c'est à Allah qu'appartient la souveraineté des cieux et de la terre ; et qu'en dehors d'Allah vous n'avez ni protecteur ni secoureur ? » (2.107) « Allah est capable de faire toutes choses. » (18.45) « ... et Il n'associe personne à Son commandement. » (18.26) « Telles sont les similitudes que Nous citons pour l'humanité, mais nul n'en saisira le sens sauf le sage. » (29.43)


Pourquoi lit-on des choses comme ceci ? La meilleure explication ne peut pas convaincre tout le monde. L'esprit peut être fort, le cœur peut être fort, mais le psychisme, lui, perd de sa force, brutalement ou progressivement, en l'absence de soutien matériel ou moral ; ainsi la nafs ammara se révolte contre la nafs lawama, et cela peut prendre un certain temps avant que l'âme soit apaisée. Parfois, il en faut très peu pour que l'âme se calme si l'esprit est déjà préparé. D'où l'importance de la lecture du Coran. Tôt ou tard, le Coran, s'il est lu correctement, aide à apaiser les craintes du chômage, de la maladie, de la perte... Dans le Coran, nous lisons : « ... et leur donnera en échange la sécurité après leur peur. » (24.55) « Ton Seigneur étend Ses dons largement à qui Il veut, et accorde avec parcimonie Il a toujours été Connaisseur, Voyant de Ses créatures. » (17.30)

 

Alors sur qui dois-je m'appuyer ? Soit dit en passant, pendant le règne du calife Omar (584-644) et de certains autres dirigeants musulmans, aussi bien les musulmans que les non-musulmans avaient droit à l'aide de l'État. Ceci était basé sur de véritables principes islamiques et ne dépendait nullement du bon vouloir des dirigeants. C'est seulement une question de disponibilité des fonds publics. C'est de l'argent public qu’il s’agit. C'est le devoir de l'État, quand il peut se le permettre, d'aider les nécessiteux, pas une faveur de ceux qui sont au pouvoir. Très peu de dirigeants donneraient de leur poche. Ce peut être un geste injuste envers les générations futures que mon État emprunte excessivement pour m'aider sans s'assurer qu'il peut rembourser dans un avenir prévisible. Des statistiques récentes montrent que les niveaux d'endettement public n'ont jamais été aussi élevés depuis la Seconde Guerre mondiale. Dans de nombreux États du monde, de nombreuses personnes ne peuvent même pas toucher leur salaire mensuel ou leur pension de retraite à temps et de nombreuses entreprises font faillite parce qu'elles sont submergées par les retards de paiement de l'État. De même, si Allah exhorte les fidèles à s'entraider dignement par la zakat et l'aumône, même en temps normal et lorsque les caisses de l'État sont pleines, c'est parce que, philosophiquement parlant, la seule différence entre les nantis et les démunis est qu'Allah pourvoit les nantis directement et les démunis indirectement, par l'intermédiaire des nantis. Allah me donne mon salaire par l'intermédiaire de mon patron. Donc, pour cette raison, je remercie Allah, plutôt que mon patron ou qui que ce soit d'autre. Je remercie les humains quand ils me font du bien pour le bien qu'ils me font « par la permission d'Allah », mais, au fond de moi, je crois que tout vient d'Allah. C’est dans cet esprit que je vote pour la personne qui a fait du bien à ma communauté, car il est naturel d'aimer et d'encourager les gens qui font du bien. Le problème se pose quand, à chaque fois que j'ai un problème, je me tourne vers le gouvernement /l'État pour obtenir de l'aide. Je pourrais obtenir l'aide que je veux, mais le risque est que mon Iman pourrait s'affaiblir avec le temps du fait de cette dépendance de l’Etat. Et puis, tout état a des moyens tout sauf illimités. Si chaque gouvernement qui vient commence à dépenser à tour de bras, pour assurer la paix sociale ou pour toute autre raison, cela pourrait mener à des catastrophes socio-économiques, voire politiques. L'hyperinflation, le défaut de paiement… ça vient de ça. Et puis j'aurais peut-être besoin de l'aide d'Allah, dans le cas d'une maladie, d’une perte, etc. Après tout, la vie est un sentiment, ou un ressenti ; ce n'est pas qu'une question d'argent. « Allah ! C'est lui qui donne la subsistance, le Seigneur de la puissance inébranlable. » (51.58)

C'est pour ces raisons-là que l'Islam a été accepté, au moins au début, comme mode de vie par les nations non arabes et est devenu la Foi de grands empires sur une longue période de temps. Si nous, musulmans d'aujourd'hui, ne sommes peut-être pas si grands, c'est très vraisemblablement parce que nous ne voulons pas de l'islam comme mode de vie, mais seulement comme religion, comme rituels. Le problème n'est donc pas avec l'Islam. Le problème, c'est nous les musulmans, moi d'abord. Pensez à ce Hadith : « Nul d'entre vous ne croit (vraiment) jusqu'à ce qu'il aime pour son frère" - ou il a dit "pour son prochain" - "ce qu'il aime pour lui-même ». Dans le Coran, nous lisons : « Si vous publiez votre aumône, c'est bien, mais si vous la cachez et la donnez aux pauvres, ce sera mieux pour vous et expiera certains de vos méfaits. Allah est Informé de ce que vous faites. » (2.271) « O vous qui croyez ! Ne rendez pas vain votre aumône par l'opprobre et l'injure, comme celui qui ne dépense ses biens que pour être vu des hommes et qui ne croit pas en Allah et au Jour dernier. Sa ressemblance est comme la ressemblance d’un rocher sur lequel est de la poussière de terre ; une tempête de pluie le frappe, le laissant lisse et nu. Ils n'ont aucun contrôle sur ce qu'ils ont acquis. Allah ne guide pas les gens mécréants. » (2.264) « Une parole gentille avec pardon vaut mieux qu'une aumône suivie d'une blessure. Allah est Absolu, Clément. » (2.263) « Ne savent-ils pas qu'Allah est Celui qui accepte le repentir de Ses serviteurs et reçoit l'aumône, et qu'Allah est Celui qui Persévère, le Miséricordieux. » (9.104) Nous sommes tous pauvres, d’une manière ou d’une autre. Vous êtes peut-être riche, mais vous regarderiez votre médecin d'un air suppliant lorsque vous êtes malade. Aimeriez-vous alors qu'une personne nécessiteuse vous regarde d'un air suppliant ? Si nous croyons au Coran, nous devrions croire que l'argent est l'argent d'Allah. Encore une fois dans le Coran, nous lisons : « ... et donnez-leur des biens d'Allah qu'Il vous a accordées. » (24.33) « Et que ceux qui amassent ce qu'Allah leur a accordé de Sa générosité ne pensent pas que c'est mieux pour eux. Au contraire, c'est pire pour eux. » (3.180) « ... Si vous craignez la pauvreté (à cause de la perte de leur marchandise) Allah vous préservera de Sa générosité s'Il le veut. Allah est Savant, Sage. » (9.28) « Et tout ce que vous avez de confort, cela vient d'Allah. Puis, quand le malheur vous atteint, c'est Lui que vous implorez a haute voix. » (16.53) « C'est lui qui vous a placés vice-rois sur terre et a élevé certains d'entre vous au-dessus des autres, afin de vous éprouver en ce qu'Il vous a donné. Le Seigneur est prompt en punition, Il est aussi Pardonneur et Miséricordieux. » (6.165) « Ton Seigneur agrandit la provision pour qui il veut, et resserre (ce qu'il veut). Il a toujours été connaisseur, voyant de ses créatures. » (17.30) « Et ne convoitez pas la chose dans laquelle Allah a fait que certains d'entre vous surpassent les autres. Aux hommes une fortune de ce qu'ils ont gagné, et aux femmes une fortune de ce qu'elles ont gagné. (Ne vous enviez pas les uns les autres) mais demandez à Allah de Sa bonté. Allah est toujours Connaisseur de toutes choses. » (4.32)


La plupart des gens ne semblent pas comprendre cela. Allah dit : « En vérité Allah a entendu la parole de ceux qui ont dit : Allah est pauvre, et nous sommes riches ! » (3.181) « Et lorsqu'il leur est dit : Dépensez de ce que Allah vous a attribué, ceux qui ont mécru disent à ceux qui ont cru : Allons-nous nourrir ceux qu'Allah, s'Il le voulait, nourrirait ? Vous n'êtes en rien d'autre que l'erreur manifeste. » (36.47)

 

« En vérité, les bien-aimés d'Allah sont à l'abri de toute crainte, et ils ne seront point affligés. » (10.62) « La puissance appartient entièrement à Allah. Il est l'Audient, l'Omniscient. » (10. 65) « Ils n'ont pas estimé Allah à sa juste valeur. Allah est Fort, Tout-Puissant. » (22.74) « Et il n'est rien dont Nous n'ayons les réserves et Nous ne le faisons descendre que dans une mesure déterminée. » (15.21) « Et il n'y a pas une bête sur la terre dont la subsistance n'incombe à Allah. Il connaît son habitation et son dépôt. Tout est dans un registre clair. » (11.6) « Et combien y a-t-il d'animaux qui ne portent pas leurs propres provisions ! Allah pourvoit à eux et à vous. Il est l'Audient, l'Omniscient. » (29.60) « En Allah, que les croyants placent leur confiance. » (58.10) « Et quiconque garde son devoir envers Allah, Allah lui assignera une issue, Et lui pourvoira d'où il ne s'était jamais attendu. Et quiconque place sa confiance en Allah, Il lui suffira. Allah fait accomplir Son commandement. Allah a assigné une mesure pour toutes choses. » (65.2-3) « Et Allah était prédominant dans Sa carrière, mais la plupart des hommes ne le savent pas. » (12.21) « Et Allah est souverain en Son Commandement: mais la plupart des gens ne savent pas. » (12.21) « Vos biens et vos enfants ne sont qu'une tentation, alors qu'auprès d’Allah est une énorme récompense. » (64.14)


« Quiconque désire la récompense du monde, (qu'il sache que) auprès d'Allah est la récompense du monde et de l'au-delà. Allah est toujours auditeur, voyant. » (4.134) « Aucune âme ne peut jamais mourir sans la permission d'Allah et à un terme fixé. Quiconque désire la récompense du monde, Nous lui en accordons; et quiconque désire la récompense de l'au-delà, Nous lui en accordons. Et nous récompenserons les reconnaissants. » (3.145)


MON TÉMOIGNAGE II